SNCF s’est très tôt dotée d’une salle de crise qui, lorsqu’elle est ouverte, permet de coordonner les actions de tous les services concernés de l’entreprise, en cas d’événement affectant d’une manière générale les circulations ferroviaires et, partant, nos clients. Cela peut aller d’un droit de retrait exercé par certains agents qui perturbe le trafic, jusqu’à un accident majeur qui a atteint nos voyageurs.
Il y a plusieurs organisations de salles de crises, en fonction des situations :
• situation perturbée (distorsions significatives du service opérationnel) : ouverture d’une salle de crise régionale ;
• situation fortement perturbée, voire crise du système ferroviaire (distorsion importante du système et répercussion médiatique d’ampleur nationale) : ouverture de la salle de crise nationale des opérations ferroviaires (CNOF).
Pourquoi le directeur juridique peut-il être amené à faire partie de ces instances ?
Il n’y a aucune crise qui ne pose un ou plusieurs problèmes juridiques d’importance et le plus souvent urgents. Le directeur juridique apporte naturellement les éclairages juridiques nécessaires à la prise de décisions en situation de crise.
Son rôle est alors d’agir pour la sauvegarde des intérêts de SNCF, en orientant les actions pour une bonne prise en compte des risques (responsabilité ou sociaux, le plus souvent) pouvant avoir un impact potentiel sur l’entreprise.
Est-il membre permanent ou peut-il intervenir ponctuellement selon les crises ?
Le directeur juridique ou son représentant sont requis par le directeur de la salle de crise en tant que de besoin.
L’astreinte juridique peut alors faire valoir son expertise, notamment dans les cas suivants : accidents collectifs avec victimes, manifestations d’ampleur dans les emprises SNCF, dégradations et destructions des biens si l’événement est majeur, accidents du travail graves ou incendies, événements médiatiques mettant en cause SNCF sur des sujets sensibles…
Le directeur juridique a-t-il un rôle préventif ou curatif ?
De par sa fonction, il doit faire bénéficier le président ou son représentant du recul, de la distance, dont il jouit par rapport aux opérationnels confrontés à une réalité parfois éprouvante.
Son rôle est avant tout préventif. Comme pour un dossier normal, son rôle est de sécuriser la décision qui est prise par le président ou son représentant. Il est là pour assurer la conformité des interventions, défendre les intérêts, la réputation de l’entreprise et préserver son crédit sous toutes ses formes.
Son rôle peut être plus curatif, lorsqu’il lance des actions judiciaires, notamment en déposant plainte lorsque les intérêts de l’entreprise ont été lésés. C’est également lui qui choisit ses conseils et élabore la stratégie de sa défense après que le président l’a validée.
Pouvez-vous expliquez ces rôles ?
Par exemple, dès les premiers instants qui ont suivi le déraillement survenu à Brétigny en juillet 2013, SNCF, par la voix de son président, s’est déclarée moralement responsable de cette catastrophe et a lancé un processus d’indemnisation amiable des différents préjudices subis par les victimes qu’ils soient matériels, corporels ou psychologiques.
La direction juridique - avec le soutien de la direction financière - a d’abord mis en place des circuits courts pour accélérer le versement des aides d’urgence. Par la suite, elle a dirigé la construction du processus d’indemnisation des victimes (traitement égalitaire et individualisé des victimes, expertises selon les nomenclature judiciaires, prise en compte de tous les postes de préjudices, versement de provisions régulières, préservation du libre choix des victimes de ne pas entrer dans le processus, ni d’accepter l’indemnisation proposée avec versement de 80% de son montant, maintien du droit pour elles de se constituer parties civiles, etc…), qui a été formalisé deux mois plus tard dans la convention d’indemnisation des victimes de Brétigny.
Dans un autre domaine, c’est la direction juridique qui a suggéré de déposer plainte contre les coureurs cyclistes de la dernière édition de la course Paris-Roubaix qui, sous les yeux de millions de téléspectateurs, ont franchi un passage à niveau, malgré les injonctions de s’arrêter des forces de l’ordre, évitant de justesse un grave accident et obligeant un TGV à freiner d’urgence.
Ce qui se passe et dit dans ces instances est-il confidentiel ?
Bien sûr, d’autant que le directeur juridique doit se borner à faire des propositions au président ou à son représentant. La décision finale ne lui appartient pas. Quelle qu’elle soit, une fois prise, tous les responsables de l’entreprise doivent l’appliquer et l’expliquer et le juriste, la sécuriser.
Peut-il être amené à communiquer ? En interne ? En externe (média, pouvoirs publics) ?
En interne, sans doute. En externe, rarissimement : il y a des professionnels pour cela et nous en avons de très compétents à SNCF !
Tout juste est-il habilité, dans des limites strictes, à communiquer avec les procureurs de la République ou les procureurs généraux, voire avec les juges d’instruction qui le souhaitent (cela peut arriver…) pour leur faire connaître le point de vue de l’entreprise sur certains aspects d’un dossier.
Comment est perçu le juriste dans ces instances ?
Incontournable !