La garantie décennale des constructeurs (article 1792 du Code civil), qui consiste en une présomption de responsabilité pour les désordres les plus graves, est d’une durée de 10 ans courant à compter de la réception (article 1792-4-1 du Code civil).
Après ce délai, la responsabilité des personnes tenues sur le fondement de la garantie décennale ne peut être recherchée, sauf en cas de faute dolosive.
La faute dolosive peut être définie comme étant celle résultant de l’intention de nuire ou de l’inexécution délibérée de ses obligations par le constructeur.
Il a ainsi été jugé que « le constructeur, nonobstant la forclusion décennale, est sauf faute extérieure au contrat, contractuellement tenu à l’égard du maître de l’ouvrage de sa faute dolosive lorsque, de propos délibéré même sans intention de nuire, il viole par dissimulation ou par fraude ses obligations contractuelles » (Civ. 3ème, 27 juin 2001, n°99-21017).
Dans le cas d’une faute dolosive, outre les dommages, il faudra rapporter la preuve de la faute dolosive.
Cette solution est classique.
L’arrêt commenté se prononce sur le fait de savoir si l’action fondée sur la faute dolosive se transmet avec le bien vendu.
Pour sa part, l’action en responsabilité décennale contre les constructeurs se transmet avec le bien vendu.
Les faits ayant conduit à l’arrêt du 27 mars 2013, concernant la faute dolosive, sont les suivants :
Un couple avait acquis en 2004 une maison d’habitation construite en 1985.
Constatant sur celle-ci des fissures évolutives, les acquéreurs ont assigné le constructeur de la maison en invoquant sa faute dolosive.
Leur action a été accueillie et le constructeur a été condamné à les indemniser par la Cour d’appel.
Le constructeur a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel.
A l’appui de son pourvoi, ce constructeur faisait valoir que l’action des acquéreurs était irrecevable, au motif que l’action fondée sur la faute dolosive des constructeurs ne pouvant être invoquée que par celui qui en a été victime, non par l’acquéreur de l’immeuble.
La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement, et rejette le pourvoi.
Elle estime en effet que l’acquéreur d’un immeuble peut se prévaloir de la faute dolosive dont a été victime son vendeur.
La motivation de sa décision est la suivante : l’action fondée sur la faute dolosive est de nature contractuelle, et est attachée à l’immeuble, et donc transmissible à l’acquéreur.
Par conséquent, celui-ci est recevable à rechercher la responsabilité du constructeur après l’expiration du délai de garantie décennale sur le fondement de sa faute dolosive.
Discussion en cours :
Bonjour,
avec un peu de retard... la C.cass marche sur la tête.
D’abord en ôtant au DOL son caractère intentionnel...alors qu’elle lui conserve la force de tout corrompre...le dol est devenu une notion subjective qui se rattache aux personnes de l’auteur et de la victime, (dans ce cas, la notion de BPF devrait jouer à plein, or, il n’en ait rien !). Ce qui est déjà problématique sur le plan juridique.
Ensuite, en l’attachant au contrat, alors que l’action contre le dol, est une action personnelle, particulièrement depuis que celui-ci n’est plus attaché à l’intention de nuire, la C.cass dénature l’essence même du dol. En somme la C.cass fait entrer le dol dans le champ du devoir contractuel (avec la force de tout corrompre). Si le manquement contractuel devient un dol, c’est la mort des aménagements contractuels...
Pour le cas d’espèce, en permettant au second acquéreur de bénéficier d’une action personnelle au premier acquéreur, la C.cass à trop vouloir moraliser le monde des contrats, a réussi à le dénaturer.
La C.cass semble vouloir faciliter la responsabilité sans faute des constructeurs, alors qu’il existe, et le cadre contractuel en est justement le support, la responsabilité contractuelle pour faute.
à trop vouloir protéger on finit par fabriquer des assistés !
@+