Accord collectif et liberté contractuelle, par Jean-François Gallerne, Avocat

Accord collectif et liberté contractuelle, par Jean-François Gallerne, Avocat

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Explorer : # Égalité salariale # accord collectif # raison objective # contrôle judiciaire

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Un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 28 octobre 2009 illustre la règle « à travail égal, salaire égal » résultant de divers textes du Code du Travail.

Il indique qu’un accord d’entreprise ne peut prévoir de différences de traitement entre salariés d’établissements différents d’une même entreprise exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elles reposent sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Il ajoute que le choix des partenaires sociaux de priver un certain nombre de salariés du site de Val de Reuil du bénéfice de la prime anniversaire aux fins de permettre au plus grand nombre de salariés des autres établissements de bénéficier sans délai de la plupart des avantages issus de l’accord-cadre, choix que l’employeur justifiait par l’insuffisance de ses capacités financières, ne reposait sur aucune explication objective relative à la situation des salariés, propre à justifier les différences de traitement constatées entre les salariés de l’établissement de Val de Reuil et ceux affectés dans les autres établissements de l’entreprise.

Au-delà de cette décision commentée le plus souvent sous l’aspect « à travail égal, salaire égal », le rôle du juge induit-il le contrôle de la négociation collective souvent appelée par tous ?

Selon la décision précitée, la réponse est affirmative, puisqu’aussi bien il est dit que le juge doit contrôler la réalité et la pertinence d’un article d’un accord collectif.

Si, assurément les partenaires sociaux dans l’accord rapporté ont rompu une forme d’égalité entre salariés d’une même entreprise, la disposition querellée était-elle pour autant illégale ou non conforme à l’ordre social ?
La Cour de cassation n’interdit pas une différence de traitement, elle la limite à l’hypothèse de raisons objectives.

En première approche, les partenaires sociaux avaient retenu l’insuffisance des capacités financières de l’entreprise.

En première analyse, il s’agit là d’une raison objective pour autant que les partenaires sociaux aient pu appréhender la situation financière de l’entreprise, la loi au demeurant leur offrant cette possibilité telle que recours à expertise.

S’agissant de la pertinence de la raison, il y a lieu de se rapprocher du droit prétorien issu de l’assemblée plénière de la Cour de Cassation en date du 8 décembre 2000 (arrêt SAT) selon lequel le juge n’a pas le pouvoir de contrôler le choix effectué par l’employeur entre les solutions possibles (options de gestion en cas de réorganisation entraînant des suppressions d’emploi) dans le cadre d’une procédure de licenciement pour motif économique.

L’arrêt rapporté se heurte d’autant à la décision ci-dessus mentionnée dès lors que l’accord collectif se situe à un niveau qui n’est pas celui d’une décision unilatérale.

En d’autres termes, en matière de licenciement collectif, le pouvoir du chef d’entreprise est moins encadré que ne l’est un accord collectif relatif à une politique salariale.

Cette différence de traitement dans les sources du droit s’explique mal sauf à considérer que le juge peut être appelé à se substituer à la volonté des partenaires sociaux.

Il serait heureux que la Cour de Justice des Communautés Européennes soit saisie ou se prononce afin d’éloigner l’insécurité juridique interne.

Jean-François GALLERNE

Avocat à la Cour

Conseil en droit social

GRANT THORNTON SOCIETE D’AVOCATS

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