Le 19 novembre 2008, la Chambre de Recours Technique de l’OEB (Office Européen des Brevets) a statué de manière inattendue dans l’affaire Myriad Genetics.
Cette société américaine a lancé en 1996 un test génétique basé sur la détection des mutations du gène BCRA1, afin de déterminer les risques de développement du cancer du sein. Myriad est titulaire, en copropriété avec l’Université d’Utah, de trois brevets européens qui revendiquent de manière très large ce gène, ses mutations et la méthode de diagnostic correspondante.
Ces trois brevets ont été délivrés par l’OEB en 2001. Des organismes de recherche notamment européens avaient développé des tests génétiques alternatifs pour le gène BCRA1, presque simultanément avec l’Université de l’Utah qui fut la première à déposer des brevets. Compte tenu de la politique de commercialisation et de communication de Myriad, et craignant que ces brevets européens ne confèrent à Myriad un monopole sur le gène BCRA1, ces organismes de recherche engagèrent une procédure d’opposition devant l’OEB.
En 2004, la Division d’Opposition de l’OEB révoqua les trois brevets pour « non-conformité avec la Convention sur le Brevet Européen », notamment pour défaut de nouveauté. Le gène BCRA1 et l’implication de ses mutations dans le cancer du sein avaient été mis en évidence par d’autres laboratoires que celui de l’Université d’Utah, avant le dépôt des brevets.
Myriad fit appel de cette décision devant la Chambre de Recours Technique de l’OEB qui vient de rendre une décision, maintenant deux des brevets sous une forme modifiée, en limitant les revendications à certaines mutations du gène, laissant « libres » les tests sur les autres mutations.
Les organismes de recherche ayant fait opposition s’inquiètent de cette décision devenue définitive. En effet, les tests qu’ils ont développés pourraient être argués de contrefaçons en Europe.
Plus généralement, cette décision soulève à nouveau la question de la portée des revendications relatives à des séquences génétiques ou des gènes complets et le monopole sur la recherche qu’elles confèrent sur la base d’un brevet européen.
Karine VILOTTA
Ingénieur Brevets
Cabinet WAGRET
Pour en savoir plus :
Décision OEB T0666/05 (non-publiée)
Article de Jean-Yves Nau, Le Monde, 21/11/08
Rapport : Case study : Myriad Genetics : In the Eye of the Policy Storm, E. Richard Gold, Julia Carbone, International Expert Group on Biotechnology, Innovation and Intellectual Property, Sept 2008