Contractuels : 1 – Fonctionnaires stagiaires : 0, la plus grande précarité des stagiaires dans la fonction publique.

Par Karin Hammerer, Avocate.

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Explorer : # précarité des fonctionnaires stagiaires # droit au reclassement # fonction publique # inaptitude physique

Depuis plusieurs années, les droits des agents contractuels de droit public en matière de reclassement n’ont eu de cesse de se renforcer.

Il n’en va pas de même pour les fonctionnaires stagiaires qui ont été sévèrement exclus de ce mouvement par deux arrêts récents du Conseil d’État.

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Comme expliqué dans un précédent article [1], la pérennisation accrue des engagements des agents contractuels de droit public a conduit la jurisprudence puis le législateur et, in fine, le pouvoir réglementaire à reconnaître à ces personnels le droit d’être reclassés notamment en cas d’inaptitude physique ou de suppression d’emploi.

Dans le prolongement de cette construction, plusieurs cours administratives d’appel avaient, assez naturellement, étendu aux fonctionnaires stagiaires cette protection sous la forme du principe général du droit dont le Conseil d’État s’était servi initialement pour les agents contractuels [2].

A tort d’après la haute juridiction qui a jugé successivement que :

  • « Considérant que si, en vertu d’un principe général du droit dont s’inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés que les règles statutaires applicables aux fonctionnaires, en cas d’inaptitude physique définitive, médicalement constatée, à occuper un emploi, il appartient à l’employeur de reclasser l’intéressé dans un autre emploi et, en cas d’impossibilité, de prononcer son licenciement dans les conditions qui lui sont applicables, ni ce principe général ni les dispositions citées ci-dessus de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 7 octobre 1994 ne confèrent aux fonctionnaires stagiaires, qui se trouvent dans une situation probatoire et provisoire, un droit à être reclassés dans l’attente d’une titularisation pour toute inaptitude physique définitive » (CE, 17 février 2016, n° 381429) ;
  • « Si, en vertu d’un principe général du droit dont s’inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés dont l’emploi est supprimé que les règles du statut général de la fonction publique, qui imposent de donner, dans un délai raisonnable, aux fonctionnaires en activité dont l’emploi est supprimé une nouvelle affectation correspondant à leur grade, il incombe à l’administration avant de pouvoir prononcer le licenciement de proposer à l’intéressé un emploi de niveau équivalent ou, à défaut d’un tel emploi et si l’intéressé le demande, de tout autre emploi et, en cas d’impossibilité, de prononcer le licenciement dans les conditions qui lui sont applicables, ce principe général ne confère aux fonctionnaires stagiaires, qui se trouvent dans une situation probatoire et provisoire, aucun droit à être reclassés dans l’attente d’une titularisation en cas de suppression de leur emploi » (CE, 5 octobre 2016, n° 386802).

Autrement dit, les fonctionnaires stagiaires qui ont le malheur de devenir définitivement inaptes physiquement ou dont l’emploi est supprimé avant leur titularisation peuvent être directement licenciés.

Ils ont seulement le droit d’être réinscrits par la suite à leur demande sur la liste d’aptitude sous réserve qu’il n’ait pas été mis fin à leur stage pour une cause tenant à leur manière de servir.

Pourtant, les fonctionnaires stagiaires ont vocation à être titularisés et donc à faire carrière dans la fonction publique, contrairement aux agents contractuels auxquels cette possibilité continue à être déniée.

Mais, dans l’attente de ladite titularisation, ils se trouvent dans une situation probatoire et provisoire, extrêmement précaire, qui leur ouvre uniquement droit à accomplir leur stage dans des conditions leur permettant d’acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de leurs capacités pour les fonctions auxquelles ils sont destinés.

A l’inverse, les agents contractuels tiennent de leurs contrats respectifs le droit d’être employés.

Une seule exception tout de même à l’absence de droit au reclassement des stagiaires : si l’inaptitude physique définitive est imputable à un accident de service ou à une maladie professionnelle [3].

Il serait, en effet, pour le moins inéquitable de ne pas chercher à compenser les problèmes de santé inhérents au service accompli au profit de la collectivité publique par l’agent durant son stage.

Reste donc plus aux fonctionnaires stagiaires qu’à espérer ne pas être victimes de problèmes de santé ou d’une réorganisation de service durant la période relativement brève que dure leur stage. Ce serait le comble de la malchance…

Karin Hammerer, Avocate au Barreau de Lyon spécialiste en droit public
www.hammerer-avocat.fr

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[2voir par exemple : CAA Versailles, 1er avril 2014, n° 12VE01799 ou encore CAA Douai, 30 octobre 2014, n° 13DA00878.

[3CE, 26 février 2016, n° 372419.

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