Les chauffeurs « Uber » peuvent réclamer en justice le remboursement des cotisations versées en qualité de travailleur indépendant.

Par Pierre-Damien Venton, Avocat.

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Explorer : # requalification # cotisations sociales # travail indépendant # relation de subordination

Aux termes d’un contrôle URSSAF, les chauffeurs VTC collaborant avec la société UBER ont été requalifiés en début d’année 2016 en travailleurs salariés alors qu’ils étaient jusqu’alors déclarés en qualité de travailleurs indépendants.

Ce faisant, la société Uber s’est vue réclamer le paiement des charges sociales -tant patronales que salariales- dues au titre de cette activité salariée.

Or, en leur qualité de travailleurs indépendants, ces chauffeurs avaient déjà réglé des charges sociales afférentes à leur activité de VTC, directement auprès des organismes sociaux dont ils dépendaient à ce titre.

En reprenant à leur compte la position retenue par l’URSSAF, un nombre croissant de ces chauffeurs -relevant avoir été privé de leur qualité de travailleur indépendant pour la période objet du redressement-, estiment logiquement être fondés à réclamer auprès du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale, le remboursement des sommes qu’ils ont réglées dans la limite de la prescription applicable.

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L’épopée des chauffeurs Uber est loin d’être terminée.

Après les actions prud’homales intentées en 2015 par plusieurs chauffeurs Uber (insatisfaits des nouvelles conditions tarifaires imposées par la plateforme collaborative) afin de faire reconnaître l’existence d’une relation salariée entre eux et la plateforme, l’ACOSS a diffusé au début du mois de mai 2016, l’information selon laquelle l’URSSAF d’Ile de France a elle-aussi décidé de se saisir de cette problématique.

Considérant à l’instar des chauffeurs VTC, auteurs des recours prud’homaux précités, qu’il existerait un « lien de subordination » dans cette relation contractuelle, l’URSSAF francilienne a requalifié les travailleurs indépendants du réseau, en travailleurs salariés et procédé consécutivement à un redressement de cotisations représentant plusieurs millions d’euros.

I. L’anomalie résultant de la décision de l’URSSAF : deux prélèvements au titre d’un même revenu d’activité

Dans le cadre de ses relations contractuelles avec ses chauffeurs partenaires, Uber encaisse directement sur son compte bancaire les courses payées par les passagers.

Ce n’est que dans un second temps que Uber reverse aux chauffeurs intéressés, les sommes leur revenant après prélèvement de la commission convenue.

A ce stade, les charges sociales inhérentes à cette activité ne font l’objet d’aucune démarche de la part de la plateforme de mise en relation.

Comme n’importe quel travailleur indépendant, ce sont les chauffeurs partenaires de Uber -qu’ils soient autoentrepreneurs, en exercice individuel ou dirigeant d’une société- qui déclarent « après coup » ces revenus auprès de leurs organismes sociaux et payent les charges sociales afférentes.

Toutefois, la requalification en travailleurs salariés de ces chauffeurs et consécutivement le redressement URSSAF de Uber -à qui il est réclamé de payer les charges sociales au titre de cette même activité-, pose une difficulté d’ordre juridique.

En effet, une telle position aboutit, en l’état, à soumettre les revenus de cette activité VTC à deux prélèvements sociaux, ce qui ne saurait être admis par les textes.

II. Si les chauffeurs Uber sont des travailleurs salariés, rien ne justifie que les organismes sociaux conservent les charges sociales versées en qualité de travailleurs indépendants.

Si l’on suit la solution retenue par l’URSSAF francilienne -contestée à ce jour par Uber devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale-, consistant à considérer que les chauffeurs partenaires de Uber sont des travailleurs salariés au sens du Code de de la sécurité sociale, rien ne saurait justifier que les organismes sociaux des travailleurs non-salariés conservent les charges sociales qui leur ont été versées au cours des 3 dernières années.

C’est la raison pour laquelle un nombre croissant de chauffeurs « Uber » se rapprochent d’avocats justifiant d’une expertise sur ces questions, pour initier des actions en répétition de l’indu contre leurs caisses, dans le but d’obtenir le remboursement des sommes dont ils estiment s’être acquittés à tort dans un tel contexte.

L’intérêt principal d’une telle procédure est qu’elle est dirigée à l’encontre des organismes sociaux via le Tribunal des affaires de sécurité sociale -et non pas à l’encontre d’UBER via le Conseil de prud’hommes-, de telle sorte que les chauffeurs concernés peuvent poursuivre normalement leur collaboration avec UBER sans crainte d’être exclus du réseau.

On relèvera cependant que pour être recevable, de tels recours devront nécessairement être initiées en respectant la prescription applicable, ce qui suppose une réactivité des chauffeurs.

Pierre-Damien VENTON
Avocat à la Cour
VENTON AVOCATS
CONSEIL ET CONTENTIEUX EN DROIT SOCIAL
E-mail : pierre.venton chez venton-avocats.fr
Site internet : www.venton-avocats.fr

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  • par Damien98 , Le 24 août 2016 à 13:21

    Les chauffeurs ont raison ! S’ils deviennent des salariés et ne sont plus des travailleurs indépendants, il doivent être remboursés de ce qu’ils ont versé !
    Je n’approuve pas du tout la mentalité des grosses sociétés américaines comme Uber, je préfère passer par de petits VTC comme Les Chauffeurs Perisiens ou Eden Transports, par principe !

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