Inscription de l’IVG dans la Constitution de 1958.
L’inscription de l’IVG dans la Constitution a été adoptée le 4 mars 2024, avec 92% des suffrages exprimés.
Une majorité des 3/5e des suffrages exprimés était requise pour approuver cette révision constitutionnelle, la première depuis 2008.
Sur les 924 parlementaires, réunis en Congrès au château de Versailles, 852 se sont exprimés. La révision constitutionnelle a été adoptée lundi 4 mars 2024, à 780 voix pour et 72 voix contre.
Une cérémonie de scellement, ouverte au public, a lieu le 8 mars 2024, à 12h00, place Vendôme (Paris) devant le ministère de la Justice.
Consultez le replay de la cérémonie ici (chaîne YouTube de l’Élysée).
Non nécessaire à l’entrée en vigueur de la loi, c’est un événement solennel qui donne aux textes juridiques considérés comme particulièrement importants une portée symbolique forte. Il en a notamment été ainsi pour la loi de 1981 portant abolition de la peine de mort [1].
Constitutionnalisation de la liberté d’avorter : quelques éléments de contexte.
La question de l’inscription du droit à l’avortement dans notre Constitution n’est pas si récente que cela. Elle est néanmoins revenue sur le devant de la scène si l’on peut dire, à la suite d’une décision de la Cour suprême américaine de juin 2022, mettant fin à la jurisprudence Roe v. Wade de 1973, qui accordait à l’avortement une protection au niveau fédéral, pour donner le pouvoir aux États de légiférer sur l’IVG.
À consulter : Arrêt Dobbs (24 juin 2022)
À l’automne 2022, plusieurs propositions de loi constitutionnelle sont déposées à l’Assemblée nationale et au Sénat pour protéger constitutionnellement le droit à l’IVG :
- PPLC "Vogel" (sept. 2022), visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception Texte ici (site du Sénat) ; Dossier législatif ici). Texte rejeté par le Sénat le 19 octobre 2022 ;
- PPLC "Bergé-Rixain" (oct. 2022), visant à garantir le droit à l’interruption volontaire de grossesse Texte ici (site de l’Assemblée nationale) ; Dossier législatif ici). Texte examiné en commission des lois ;
- PPLC "Panot" (oct. 2022), visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception (Texte ici (site de l’Assemblée nationale) ; Dossier législatif ici).
En septembre 2023, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) appelle les pouvoirs publics à inscrire le droit à l’avortement dans la constitution « pour que jamais ce droit ne soit remis en cause en France ».
À consulter : CNCDH, 28 sept. 2023, avis n°A-2023-1
Si les deux assemblées se sont clairement prononcées en faveur de l’inscription de l’IVG dans la Constitution, les parlementaires ne se sont pas mis d’accord sur la manière de rédiger le texte. Le Gouvernement a donc décidé de présenter un projet de loi constitutionnelle sur la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse. Le projet de loi constitutionnelle a été enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 décembre 2023, après avis du Conseil d’État.
À consulter :
Texte du projet de loi constitutionnelle (site de l’Assemblée nationale).
CE, avis, 7 déc. 2023, avis n°407667
Ce texte a été adopté en 1re lecture par l’Assemblée nationale le 30 janvier 2024, puis, sans modification, par le Sénat le 28 février 2024. Le Président de la République convoque le Congrès le lendemain (D. 29 févr. 2024, NOR : HRUX2406047D, JO 1er mars). Le texte est adopté le 4 mars 2024.
À consulter : Texte adopté par le Congrès du Parlement ici (site du Sénat)
Un peu d’histoire. Repères juridiques.
- 1971 : le « manifeste des 343 » est publié en Une du Nouvel Observateur. 343 femmes, connues et inconnues, s’accusent volontairement d’avoir eu recours à l’avortement, alors pénalement sanctionné.
- 1972 : au procès de Bobigny, Gisèle Halimi défend le droit à l’avortement
À consulter : Plaidoirie de Me Halimi (bibliothèque du droit du Barreau de Paris)
- 1975 : la loi Veil dépénalise l’avortement, pour une durée expérimentale de 5 ans (L. n°75-17, 17 janv. 1975, JO 18 janv.)
À consulter : Discours de Simone Veil à l’Assemblée nationale
- 1979 : la loi Veil est reconduite sans limite de temps (L. n°79-1204, 31 déc. 1979, JO 1er janv. 1980)
- 1993 : création du délit d’entrave à l’IVG et dépénalisation de l’auto-avortement (L. n° 93-121, 27 janv. 1993, JO 30 janv.)
- 2012 : l’avortement est remboursé à 100% (L. n°2012-1404, 17 déc. 2012, JO 28 déc.)
- 2014 : la notion de « détresse » est supprimée de la loi sur l’IVG, remplacée par l’expression « qui ne veut pas poursuivre une grossesse » (L. n°2014-873, 4 août 2014, JO 5 août)
- 2014 : résolution adoptée par l’Assemblée nationale, réaffirmant le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse en France et en Europe (Texte ici)
- 2017 : extension du délit d’entrave à l’IVG (L. n°2017-347, 20 mars 2017, JO 21 mars)
- 2 mars 2022 : allongement du délai légal pour avorter de 12 à 14 semaines (L. n°2022-295, 2 mars 2022, JO 3 mars)
- 4 mars 2024 : la liberté de recourir à l’IVG est protégée par la Constitution. Texte adopté par le Congrès du Parlement (site du Sénat).
Ressources complémentaires.
- Site officiel d’information sur l’IVG ivg.gouv.fr ;
- Accès à l’avortement : où en est-on dans le monde ? ;
- Rapport de la Fondation des femmes, janv. 2024, IVG et réseaux sociaux ;
Le coin des lectures...
- [Parution] Simone Veil, un héritage humaniste
- [Spectacle et livre] Gisèle Halimi, une farouche liberté
- Bobigny 1972. Le procès qui a rendu possible la légalisation de l’avortement.
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