La déclaration d’un compte bancaire à l’étranger : focus sur les nouveautés 2023.

Par Nathalie Aflalo, Avocat.

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Explorer : # déclaration de compte bancaire # fraude fiscale # résident fiscal français # conseil d'État

En période fiscale, il semble opportun d’aborder le thème de la déclaration d’un compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l’étranger.
Les contribuables disposant de ce type de compte bancaire se sont familiarisés depuis quelques années avec la rédaction de l’imprimé n°3916.
La jurisprudence au fil des années, est venue préciser les contours de cette obligation déclarative.
Aussi, la dernière décision du Conseil d’Etat en la matière, ne passera certes pas inaperçue, puisqu’elle apporte une précision de taille s’agissant du champ de l’obligation déclarative desdits comptes bancaires prévue par l’article 1649 A du Code général des Impôts.
CE 8e-3e ch. 8-3-2023 no 463267

-

Très brièvement, les faits sont les suivants :

Dans le cadre de la dénonciation des agissements de la société France Offshore auprès du parquet national financier, l’administration fiscale décidait d’opérer divers contrôles fiscaux auprès de sociétés clientes de cette dernière.

Les faits relatés dans la présente décision, sont les suivants :
Le schéma classique proposé à ses clients, consistait en la création d’une société de droit chypriote doublée de l’ouverture d’un compte bancaire auprès d’un établissement letton.
Au cours d’une vérification de comptabilité d’une des sociétés et d’un examen de la situation fiscale personnelle du dirigeant et de son épouse, l’administration fiscale notifie des redressements conséquents assortie de la majoration de 80% pour manœuvres frauduleuses.
Le contrôle permet de mettre en lumière, entre autres agissements, le fait que le compte bancaire letton de la société chypriote n’avait pas été déclaré par le représentant légal de ladite société, résident fiscal français et ce au visa de l’article 1649 du CGI.

La décision précise :

« Il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond qu’à l’issue d’un contrôle sur pièces des déclarations de M. et Mme C au titre des années 2009 et 2010, l’administration a considéré, sur le fondement des dispositions de l’article 1649 A du code général des impôts, que le solde créditeur du compte bancaire letton de la société chypriote provenant de la facturation de sa prestation d’intermédiaire devait être regardé comme un revenu taxable entre leurs mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ».

La question qui nous occupe est celle de savoir si au visa de l’article 1649 A du CGI, un compte bancaire ouvert au nom d’une société commerciale établie à l’étranger doit-il être déclaré en France.

Le Conseil d’Etat répond par l’affirmative.

Une lecture littérale de cet article semblait néanmoins aller à l’encontre de cette décision.

L’article mentionne expressément, que seules sont tenues de déclarer les comptes « ouverts, utilisés ou clos à l’étranger » les personnes physiques, les associations, les sociétés n’ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France.

En effet, L’article 1649 du CGI dispose :

« Les personnes physiques, les associations, les sociétés n’ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret.
Les sommes, titres ou valeurs transférés à l’étranger ou en provenance de l’étranger par l’intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables
 ».

La société en question, convient-il de le rappeler, au risque d’être redondant, est une société commerciale de droit chypriote, dès lors, résidente étrangère.

Au soutien de son raisonnement le Conseil d’Etat, avance plusieurs arguments :

  • L’utilisateur du compte est une personne physique résidente fiscale française.
  • L’article 1649 A du CGI, ne vise pas simplement, le titulaire du compte bancaire mais également son utilisateur [1]
  • La personne physique en l’espèce détenait une procuration sur ce compte.

« Il en résulte que la cour administrative d’appel, après avoir relevé, par une appréciation souveraine des faits non arguée de dénaturation, d’une part, que M. B C, actionnaire à 50 % de la société chypriote HohmannJ Lirtos LTD, avait tout pouvoir sur le compte bancaire de la société ouvert en Lettonie en 2009 et, d’autre part, que ce compte avait été débité sur son ordre pour le paiement des fournisseurs d’un montant de 178 476 euros en 2009 et 1 152 150 euros en 2010, a pu en déduire sans erreur de droit que celui-ci était tenu, en application des dispositions de l’article 1649 A du code général des impôts, de déclarer ce compte qu’il avait utilisé, sans qu’aient d’incidence à cet égard les circonstances, d’une part, que la société Hohmann Lirtos LTD était une société commerciale non établie en France et, d’autre part, que M. C avait agi en qualité de mandataire social de cette société ».

En conclusions, et au visa de l’article 1649 A ; tout compte bancaire utilisé à l’étrange doit être déclaré, y compris aux comptes ouverts au nom de sociétés commerciales.

Le Conseil d’Etat y apportant la réserve suivante :
la personne physique résidente de France a tout pouvoir sur le compte (procuration, signature bancaire) ce qui lui permet d’utiliser les fonds comme les siens propres.

Nathalie Aflalo, Avocat,
Barreau de Paris
126, Boulevard Haussmann, 75008 Paris,
www.aflalo-avocat.fr
avocat.aflalo chez yahoo.fr

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[1CE 30-12-2009 no 299131.

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