Interview extraite de la revue Actus des Barreaux n°15.
Au sommaire de ce numéro : "Majeurs vulnérables, les avocats portent la voix des plus fragiles"
Maître Aïckel Hachfi est entré dans la profession à un âge où d’autres la quittent ou envisagent de le faire. « Avant, ce métier me paraissait inaccessible », se souvient le jeune quadra.
Les prétoires lui sont d’ailleurs familiers depuis l’époque où, élève du Lycée Bonaparte, il assiste avec sa classe et ses profs à des audiences qui se tiennent au Palais de Justice, face à son établissement. Plus que la matière juridique, c’est surtout le « super métier d’avocat » qui lui plaît et l’attire, même s’il est persuadé qu’il est « trop beau et trop dur » pour lui.
« Par manque de confiance, confie Aïckel Hachfi, je n’aspirais pas à de longues et difficiles études pour y arriver ». « De plus, poursuit-il, je ne connaissais ni notaire, ni juge, ni avocat et je n’avais aucune relation personnelle dans ce milieu professionnel ».
D’ un parcours atypique et varié...
Bac STT (sciences et techniques tertiaires) en poche en 2002, il entre très tôt dans la vie active pour y faire des petits boulots. D’abord serveur dans une brasserie du centre-ville, il est plus tard manœuvre sur des chantiers de construction. « Je vivotais un peu comme ça », explique-t-il, enclin à l’époque à « s’intégrer plus rapidement dans le monde du travail ».
Dans la même « optique », il poursuit son surprenant parcours en devenant marin-pompier volontaire à Marseille et vendeur dans une grande enseigne de prêt-à-porter. Épris de théâtre, il intègre en même temps le Conservatoire Toulon Provence Méditerranée (TPM) et signe dans la foulée un contrat de figurant dans la série télévisée Sous le soleil.
« Après une belle première année au Conservatoire, raconte t-il, je suis monté à Paris pour mieux me former en m’inscrivant au Cours Florent ».
... vers une profession plus normale...
À 27 ans, se pose à lui la question d’un devenir professionnel.
« Je n’avais pas vraiment la motivation pour m’engager dans une vie de Bohême, avec un statut d’intermittent du spectacle occupé à courir les cachets », admet Aïckel Hachfi. « J’arrivais à un âge où il me fallait un emploi plus stable et plus rémunérateur ». « Une profession normale pour des gens normaux », sourit-il.
L’idée d’entreprendre un cursus universitaire se fait dès lors plus précise. « J’avais décroché des études, mais je lisais beaucoup et j’avais conservé une appétence particulière pour le savoir ». Des amis en licence de droit à la Sorbonne ravivent sa vocation pour le métier d’avocat, quelque part en sommeil dans un coin de sa tête.
« Nourri de multiples expériences professionnelles, confie-t-il, je me sentais prêt, avec la maturité nécessaire que je n’avais peut-être pas auparavant ». En 2010, l’étudiant valide sa première année de droit à Paris VIII. L’année suivante, il épouse Mina, rencontrée à Aix-en-Provence.
Le chemin de la fac met le cap en octobre vers le sud et l’université de Toulon en vue d’une deuxième année suivie d’une licence et d’un master. « Un parcours somme toute assez classique », résume Aïckel Hachfi, devenu "pion" dans des collèges et des lycées varois pour financer études et vie de famille. « Pendant ces années, précise t-il, je n’assistais qu’aux travaux pratiques et je bossais mes cours en surveillant des salles de permanence ».
... jusqu’à celle d’avocat en droit pénal.
Admis en 2016 à l’examen d’entrée à l’École des avocats du Sud-Est (EDASE, Marseille), il en sort deux ans plus tard avec son CAPA. Il prête aussitôt serment à Aix-en-Provence, puis il ouvre son cabinet à Toulon, non loin du quartier de son enfance.
Sa matière, c’est le droit pénal dont il est féru. Plaider lui plaît vraiment.
L’avocat rechigne cependant à lier l’exercice de son métier à son passé de comédien (dont il « évite de trop parler ») tant l’un et l’autre sont éloignés. Excepté la prise de parole d’un orateur devant un auditoire, « les différences sont fondamentales », affirme Aïckel Hachfi. Les salles d’audience solennelles, empreintes d’humanité, sont à l’opposé des « lieux de comédie » qu’il fréquentait naguère. Aussi s’interdit-il « les plaidoiries ampoulées, l’absence de sincérité, l’emphase et les effets de manches qui sont à bannir ». Il dit humblement plaider « sans théâtralité », « avec vérité, spontanéité et sincérité ».
Après cinq ans de barre, Aïckel Hachfi se considère humblement comme un débutant conscient qu’il a « encore à apprendre ». Il garde notamment sous le coude le projet de s’ouvrir aux droits des sociétés et des affaires même si, pour l’heure, il ne voit pas vraiment quelle autre matière pourrait le passionner autant que le pénal.
Interview à retrouver dans son intégralité dans la revue Actus des Barreaux n°15 (pages 44 et 45).
Discussions en cours :
Merci pour ce témoignage encourageant.
A combien s’élève la formation à la préparation de l’examen d’entrée à l’École des avocats et les deux ans pour parvenir au CAPA ?
Dans l’attente, en vous remerciant,
Cordialement
Un grand bravo. Je sais les difficultés que cela représente. Pour ma part, avocat à 50 ans et mes études seule avec 3 enfants...
Et la "bourlingue", ça aide...
Courage et encore tout mon respect.
Bravo ! votre parcours est inspirant !
A 40 ans + 2 enfants, M1 en droit de la santé, j’envisage repartir là ou je suis arrêtée et devenir avocate. C’est possible !?