Au sommaire de cet article...
- Obligation nationale.
- Périmètre des obligations de l’employeur.
- La formation professionnelle continue.
- La formation : droit du salarié.
- Droit à la formation des non-salariés.
- Financement partagé.
- Bilan de compétences.
- Validation des acquis de l’expérience (VAE).
- Formation du salarié en situation de handicap.
Objectif national hautement vertueux, la formation professionnelle garantit l’accès à la connaissance et l’acquisition, continue et progressive, de compétences.
Obligation nationale.
Afin de favoriser l’accès à la formation, chaque personne dispose, dès son entrée sur le marché du travail, d’un compte personnel de formation et du droit à être informé, conseillé et accompagné en matière d’orientation professionnelle [1].
Objectif qui implique l’accès à la formation, assorti logiquement du principe d’égalité d’accès entre les femmes et les hommes [2].
En cela, les actions concourant au développement des compétences qui entrent dans le champ d’application des dispositions relatives à la formation professionnelle sont selon l’article L6313-1 Code du travail :
« 1° Les actions de formation ;
2° Les bilans de compétences ;
3° Les actions permettant de faire valider les acquis de l’expérience, dans les conditions prévues au livre IV de la présente partie ;
4° Les actions de formation par apprentissage, au sens de l’article L6211-2 ».
Obligation nationale, la formation professionnelle, tout au long de la vie, est, en vertu des dispositions de l’article L6111-1 Code du travail, un droit reconnu au salarié.
Au fond, ceci concerne, indistinctement, selon l’Article L6111-1 Code du travail, les actions tendant à :
« acquérir et d’actualiser des connaissances et des compétences favorisant son évolution professionnelle,
progresser d’au moins un niveau de qualification au cours de sa vie professionnelle ».
En outre, ajoute l’article précité, cela “constitue un élément déterminant de sécurisation des parcours professionnels et de la promotion des salariés”. Une stratégie nationale dévolue aux pouvoirs publics, celle-ci est coordonnée, définie et mise en œuvre par l’État, les régions et les partenaires sociaux [3]. Prérogative qui se décline en mesures en faveur de l’emploi, la formation et de l’orientation professionnelles.
Aussi, en tant qu’obligation, celle-ci comporte la formation initiale, incluant notamment l’apprentissage, et les formations ultérieures, qui constituent la formation professionnelle continue, destinées aux adultes et aux jeunes déjà engagés dans la vie active ou qui s’y engagent [4].
Tout aussi concerné, le droit à la valorisation de l’expérience permet à toute personne de faire valider les acquis de son expérience, notamment professionnelle [5].
Concrètement, à l’effet de garantir l’accès à la formation professionnelle tout au long de la vie :
« Chaque personne dispose dès son entrée sur le marché du travail et jusqu’à la retraite, indépendamment de son statut, d’un compte personnel de formation qui contribue à l’acquisition d’un premier niveau de qualification ou au développement de ses compétences et de ses qualifications en lui permettant, à son initiative, de bénéficier de formations ». [6]
Périmètre des obligations de l’employeur.
Le droit de la formation professionnelle a connu d’importantes réformes, à la faveur de la Loi du 5 mars 2014 [7]. Et, par la suite, la Loi "Avenir professionnel" du 5 septembre 2018 [8].
Cette dernière réforme vise un double objectif :
- libérer la formation professionnelle pour renforcer l’efficacité,
- permettre de diversifier les actions de formation professionnelle éligibles et faciliter l’apprentissage.
Moment d’appréciation des besoins du salarié en termes de formation, l’entretien professionnel, à l’occasion de son embauche, le salarié est informé qu’il bénéficie tous les deux ans d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi.
En clair, selon l’article L6315-1 Code du travail :
« Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. Cet entretien comporte également des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience, à l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle ».
Tous les six ans (durée appréciée en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise), cet entretien professionnel fait un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié selon les modalités précisées à l’article L6315-1 Code du travail. Celui-ci n’est pas, toutefois, revêtu du caractère obligatoire.
Que ce soit sous l’angle de la finalité ou du contenu, l’entretien professionnel se distingue de l’entretien annuel d’évaluation, qui permet de faire le bilan de l’année écoulée et, partant, fixer les objectifs professionnels et les moyens à mettre en œuvre pour l’année à venir (voir l’article : Entretien annuel/professionnel : modalités et conséquences sur la carrière du salarié. Par M. Kebir, Avocat et Brando Marcolini, Juriste-Stagiaire.).
A cet égard, s’impose à l’employeur une obligation légale consistant à assurer la formation du salarié et l’adaptation du travail à l’Homme [9] :
« L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences… » [10].
Sur ce fondement, il est de jurisprudence constante que le manquement de l’employeur à son obligation d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, entraîne un préjudice distinct de celui résultant de la rupture [11].
De même, au visa de l’article L6321-1 Code du travail, l’absence de formation au bénéfice du salarié constitue un manquement de l’employeur à son obligation de maintien de leur capacité à occuper un emploi :
« Le fait que les salariés n’avaient bénéficié d’aucune formation professionnelle continue pendant toute la durée de leur emploi dans l’entreprise établit un manquement de l’employeur à son obligation de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, entraînant pour les intéressés un préjudice qu’il appartient au juge d’évaluer » [12].
Tel est le cas lorsque, notamment, aucune demande de formation n’est formalisée par le salarié. En ce sens que l’employeur a l’obligation de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi, même si les salariés n’ont formulé aucune demande de formation au cours de l’exécution de leur contrat de travail [13].
Du point de vue de la preuve, c’est au salarié de faire la démonstration que le défaut de formation lui a causé un préjudice :
« Le fait que le salarié n’a bénéficié d’aucune formation professionnelle continue pendant toute la durée de son emploi dans l’entreprise établit un manquement de l’employeur à son obligation de veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi, entraînant pour l’intéressé un préjudice qu’il appartient au juge d’évaluer ; qu’en rejetant la demande de réparation après avoir pourtant constaté que durant 16 années le salarié n’a reçu aucune formation, aux motifs inopérants que le salarié n’indique pas les postes auxquels il aurait pu prétendre ou les formations demandées qui lui ont été refusées et que ses droits au DIF lui ont été régulièrement notifiés, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard de l’article L6321-1 du Code du travail ». [14]
La formation professionnelle continue.
La formation professionnelle continue est une composante de la formation professionnelle.
Depuis le 1er janvier 2019 [15], les actions entrant dans le champ de la formation professionnelle continue sont :
- celles qui concourent au développement des compétences ; action de formation, bilan de compétences, validation des acquis de l’expérience et actions de formation par l’apprentissage [16].
- droit à la qualification professionnelle [17], le salarié bénéficie périodiquement d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi ou faisant un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié [18].
La formation : droit du salarié.
En vertu du contrat de travail, tel que souligné supra, l’employeur se doit de satisfaire à ses obligations en matière de formation. Ainsi, conformément à l’article L6321-1 Code du travail, cela renvoie, entre autres, à l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de maintien de leur capacité à occuper un emploi et, d’autre part, de celles qu’il peut leur proposer pour participer au développement de leurs compétences - y compris numériques - et à la lutte contre l’illettrisme [19].
En ce sens, depuis le 1er janvier 2019, le plan de formation de l’entreprise est remplacé par le plan de développement des compétences, décliné dans le cadre du programme pluriannuel de formation.
De surcroît, il est loisible au salarié, sous réserve de l’employeur, d’activer le compte personnel de formation [20].
En vertu des dispositions de l’article L5151-1 Code du travail, le titulaire du compte personnel d’activité « a droit à un accompagnement global et personnalisé destiné à l’aider à exercer ses droits pour la mise en œuvre de son projet professionnel ».
Cet accompagnement est fourni notamment dans le cadre du conseil en évolution professionnelle [21].
Au surplus, perçu comme outil de la vie citoyenne, le compte d’engagement citoyen, « recense les activités bénévoles ou de volontariat de son titulaire ». Mécanisme lui ouvrant la voie en vue d’acquérir :
« 1° Des droits sur le compte personnel de formation à raison de l’exercice de ces activités ;
2° Des jours de congés destinés à l’exercice de ces activités.” [22] ».
En substance, le compte personnel ambitionne de renforcer l’autonomie et la liberté d’action de son titulaire et, in fine, sécuriser son parcours professionnel, en supprimant les obstacles à la mobilité. Il contribue du même coup au droit à la qualification professionnelle [23].
Précisons que les droits de ce dispositif sont attachés à la personne, et non à son statut ; ils la suivent de son entrée dans la vie professionnelle à son décès [24].
Droit à la formation des non-salariés.
Eu égard au principe d’égalité, les travailleurs indépendants, les membres des professions libérales et des professions non salariées, y compris ceux n’employant aucun salarié, ainsi que leur conjoint collaborateur ou leur conjoint associé bénéficient personnellement du droit à la formation professionnelle continue [25].
Ainsi, en plus du droit à la formation professionnelle continue, le demandeur d’emploi peut, conformément à l’article L6326-1 Code du travail, bénéficier, au titre de la préparation opérationnelle à l’emploi individuel, d’une formation nécessaire à l’acquisition des compétences requises pour occuper un emploi correspondant à une offre déposée auprès de Pôle emploi, sous conditions :
- L’offre d’emploi doit se situer dans la zone géographique privilégiée définie par le projet personnalisé d’accès à l’emploi du demandeur d’emploi.
- A l’issue de la formation, qui est dispensée préalablement à l’entrée dans l’entreprise, le contrat de travail qui peut être conclu par l’employeur et le demandeur d’emploi est un contrat à durée indéterminée, un contrat de professionnalisation d’une durée minimale de douze mois, un contrat d’apprentissage ou un contrat à durée déterminée d’une durée minimale de douze mois [26].
Financement partagé.
En tant qu’« obligation nationale [27] », le financement de la formation professionnelle est supporté, variablement, par l’État, les entreprises, Pôle emploi et les particuliers.
Pour leur part, les employeurs concourent au développement de la formation professionnelle et de l’apprentissage par :
« 1° Le financement direct des actions de formation de leurs salariés ;
2° Le versement de la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance mentionnée à l’article L. 6131-2 ;
3° Le versement de la contribution supplémentaire à l’apprentissage mentionnée à l’article L. 6242-1 ;
4° Le versement de la contribution dédiée au financement du compte personnel de formation pour les titulaires d’un contrat à durée déterminée mentionnée à l’article L6331-6 » [28].
A cet égard, en fonction des secteurs d’activité, les participations sont susceptibles de varier.
Bilan de compétences.
Dispositif directement lié à la transition professionnelle, le bilan de compétence [29] a pour objet de permettre à des travailleurs d’analyser leurs compétences professionnelles et personnelles ainsi que leurs aptitudes et motivations afin de définir un projet professionnel et, le cas échéant, un projet de formation.
En d’autres termes, il s’agit, à l’issue de deux phases - préliminaire et d’investigation, de permettre au salarié bénéficiaire, soit de construire son projet professionnel et d’en vérifier la pertinence, soit d’élaborer une ou plusieurs alternatives [30].
En l’occurrence, le salarié a droit, sur demande adressée à son employeur, à un congé pour réaliser le bilan de compétences. Pour en bénéficier, le salarié doit justifier d’une ancienneté en qualité de salarié d’au moins cinq ans, consécutifs ou non, quelle qu’ait été la nature des contrats de travail successifs, dont douze mois dans l’entreprise [31].
En ce sens, en application de l’article R6313-8 Code du travail, lorsque le bilan de compétences est réalisé au titre du plan de développement des compétences, ou dans le cadre d’un congé de reclassement [32], il fait l’objet d’une convention écrite, conclue entre l’employeur, le salarié et l’organisme prestataire du bilan de compétences.
Les régions et l’État contribuent à l’exercice du droit à la qualification, notamment pour les personnes n’ayant pas acquis de qualification reconnue dans le cadre de la formation initiale [33].
Concernant les formalités, en l’absence d’accord collectif d’entreprise ou de branche, l’accord du salarié sur les actions de formation se déroulant hors du temps de travail [34] doit nécessairement être écrit. Il peut être dénoncé par ce dernier, dans un délai de huit jours à compter de sa conclusion [35].
Compte tenu des principes d’impartialité et de neutralité, les employeurs ne peuvent réaliser eux-mêmes des bilans de compétences pour leurs salariés [36]. Celui-ci, confié à un prestataire spécialisé, est d’une durée maximale de vingt-quatre heures de temps de travail, consécutives ou non, par bilan [37].
Validation des acquis de l’expérience (VAE).
Toute personne qui a exercé pendant cinq ans une activité professionnelle peut demander la validation d’acquis professionnels qui peuvent être pris en compte pour justifier d’une partie des connaissances et des aptitudes exigées pour l’obtention d’un diplôme de l’enseignement supérieur [38].
A cette fin, sont prises en compte :
- « Les études, les expériences professionnelles, les acquis personnels peuvent être validés par un jury, dans des conditions définies par décret, en vue de l’accès aux différents niveaux de l’enseignement supérieur.
- Les études, les expériences professionnelles ou les acquis professionnels peuvent également être validés par un jury, pour remplacer une partie des épreuves conduisant à la délivrance de certains diplômes ou titres professionnels » [39].
Peuvent aussi en bénéficier, dans les mêmes conditions que les personnes engagées dans la vie professionnelle, « les mères de famille et les personnes chargées de famille élevant ou ayant élevé un ou plusieurs enfants. Les périodes d’activité professionnelle dont elles peuvent se prévaloir sont prises en considération pour le calcul du délai » [40].
Ici, le refus d’un salarié de consentir à une action de validation des acquis de l’expérience ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement [41].
A noter que lorsqu’un salarié fait valider les acquis de son expérience, en tout ou partie, pendant le temps de travail et à son initiative, il bénéficie d’un congé à cet effet, ne pouvant excéder quarante-huit heures par session d’évaluation [42].
Pour ce faire, le salarié demande à l’employeur une autorisation d’absence. Celui-ci peut la refuser pour des raisons de service, motivant son report [43].
Formation du salarié en situation de handicap.
Compétence exclusive, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées attribue la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé [44].
En conséquence, la reconnaissance du handicap [45] du salarié déclenche l’accès à nombre de droits.
Dès lors, tout travailleur en situation de handicap peut, notamment, bénéficier d’une formation professionnelle :
« Tout travailleur handicapé peut bénéficier d’une réadaptation, d’une rééducation ou d’une formation professionnelle.
Les travailleurs handicapés déclarés inaptes en application de l’article L4624-4 ou pour lesquels le médecin du travail a identifié, dans le cadre de l’examen de préreprise mentionné à l’article L4624-2-4, un risque d’inaptitude peuvent bénéficier de la convention de rééducation professionnelle en entreprise mentionnée à l’article L5213-3-1 » [46].
De même, le travailleur, dont le handicap est reconnu, bénéficie, au titre des disposition de l’article L5213-6 Code du travail, de mesures destinées à lui permettre d’accéder ou de conserver un emploi correspondant à sa qualification, de l’exercer ou d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée.
Par ailleurs, le salaire des bénéficiaires de l’obligation d’emploi ne peut également être inférieur à celui qui résulte de l’application des dispositions légales ou des stipulations conventionnelles [47].
Aussi le travailleur en situation de handicap a t-il droit à des aides financières accordées aux stagiaires de la formation professionnelle, en sus de primes perçues à l’issue de son stage, destinées à faciliter son reclassement. Ces primes ne se cumulent pas avec les primes de même nature dont le travailleur porteur de handicap pourrait bénéficier au titre de la législation dont il relève [48].
En conclusion, la formation, droit substantiel, participe d’une vision vertueuse du parcours professionnel et l’épanouissement par la compétence et les savoirs.