1) Faits.
Un salarié a reçu des menaces de mort écrites proférées à son encontre.
Il a par conséquent, immédiatement averti son employeur et le secrétaire du CHSCT des menaces de mort reçues.
Pourtant, quatre jours plus tard, soit le 7 octobre 2011, le salarié a été victime d’une agression sur son lieu de travail.
Si l’agression a été prise en charge par la caisse primaire d’assurance maladie, au titre de la législation professionnelle, le salarié a néanmoins saisi la juridiction prud’homale d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Par un arrêt rendu le 22 novembre 2019, la Cour d’appel de Toulouse a débouté le salarié de sa demande.
En effet, la Cour d’appel a refusé au salarié victime de l’agression le bénéfice de la faute inexcusable de droit, au motif que la transmission de la lettre anonyme contenant les menaces ne caractérisait pas une « alerte donnée à l’employeur ».
En conséquence, le salarié s’est pourvu en cassation sur le fondement de l’article L4131-4 du Code du travail qui dispose que
« le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article L.452-1 du Code de la sécurité sociale est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité social et économique avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé ».
2) Moyens.
Le salarié fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de l’avoir débouté de ses demandes afférentes à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Pour soutenir son recours devant la Cour de cassation, le salarié avance dans un premier temps que « le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur est de droit pour le salarié victime d’un accident du travail alors qu’il avait signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé ».
Ensuite, le requérant précise que
« le salarié victime d’un accident du travail peut bénéficier de la faute inexcusable de droit s’il informe son employeur d’un danger pesant sur lui sans toutefois qu’il ne soit nécessaire qu’il alerte celui-ci ».
En effet, selon le demandeur au pourvoi, le devoir d’alerte est seulement exigé lorsque le salarié entend user de son droit de retrait et non pour la reconnaissance de la faute inexcusable de droit de l’employeur.
3) Le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur de droit au salarié victime d’une agression sur son lieu de travail.
Est-il subordonné à une alerte transmise au préalable à l’employeur ? Non, répond la Cour de cassation.
La Cour de cassation répond par la négative et casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel sur le fondement de l’article L4131-4 du Code du travail cité ci-dessus.
Les juges de la chambre sociale considèrent que
« le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé ».
Par conséquent, dès lors que le salarié transmet à son employeur une lettre de menace de mort qu’il a reçu, en lui préconisant toutefois « le silence radio afin de tenter de faire sortir le loup du bois », sans que cela ne constitue une alerte, les conditions posées par l’article L4131-4 sont néanmoins réunies.
Le salarié n’avait donc pas à rapporter la preuve de la faute inexcusable de son employeur, en établissant que son agression présentait un lien avec une faute commise par lui dans le cadre de son obligation de sécurité.
Ainsi, le fait que la victime ait transmis à son employeur une lettre de menaces reçue dans un contexte de fortes tensions internes à l’entreprise, est suffisant à lui accorder le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur.
Cette solution est favorable aux salariés car il n’est pas besoin d’alerter l’employeur mais seulement de lui signaler des faits de nature à le mettre en danger, pour que son obligation de sécurité soit mise en œuvre.
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