En effet, le juge administratif se permet de renforcer tant, d’une part, les droits des agents à l’entrée dans la fonction publique (I), que, d’autre part, lorsqu’il traite des questions de rémunérations (II).
Enfin, il accepte également de renforcer la protection juridique de l’agent public accordée par l’administration lorsque celui-ci est impliqué dans une procédure disciplinaire ou contentieuse (III).
I. L’entrée dans la Haute fonction publique.
Le principe d’égalité d’accès aux emplois publics est une règle fondamentale en droit. Selon ce dernier "Tous les citoyens sont également admissibles à tous les emplois publics sans autre distinction que celles de leurs capacités, de leurs vertus et de leurs talents", Article 6 DDHC.
C’est sur ce fondement que le Conseil d’Etat (CE) a eu à trancher de la légalité de l’examen de sortie de l’Institut National du Service Public (INSP) (CE, Comité de défense des derniers et dernières élèves de l’ENA, 12/04/2024, n°468571).
Cette association demandait au Conseil d’Etat l’annulation du classement de sortie de la dernière promotion de l’INSP, classement qui détermine les postes offerts aux élèves. Selon eux, les modalités d’évaluation enfreignaient le principe d’égalité de traitement, et par voie de conséquence, celui d’égal accès aux emplois publics.
Les juges administratifs commencent par affirmer que « ce classement est assimilable à un concours et doit être fondé sur l’appréciation des mérites propres de chaque candidat ».
Or ces derniers constatent que les méthodes des épreuves de mise en situation individuelles et collectives ont été jugées non conformes aux règles de concours, les membres du jury n’ayant : « chacun assisté à la prestation que d’un seul groupe ».
De plus, la division en groupe du jury est « légalement possible que si elle est nécessaire à l’organisation du concours et qu’elle ne compromet pas l’égalité entre candidats » [1], ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Le Conseil d’Etat annule donc le classement de sortie sans pour autant remettre en cause l’affectation de sortie des élèves.
Cet arrêt trouve toute sa place en droit de la Haute Fonction publique car une annulation aussi franche du classement de sortie n’avait pas encore eu lieu. Les juges du Palais Royal appliquent donc les règles et garanties du concours à la Haute Fonction publique et, étend le champ de protection accordé aux agents publics.
II. Le déroulement de la carrière de l’agent public.
Le Conseil d’Etat semble privilégier le recrutement d’un jeune agent pour justifier le non-renouvellement d’un agent ayant dépassé le seuil de l’âge légal pour travailler (A). Par ailleurs, le complément de rémunération dont certains agents bénéficie est considéré comme légal par la Haute juridiction administrative (B).
A. L’absence de droit à la prolongation de l’activité (CE, Ministre de l’Education nationale, 11/04/2024, n°489202).
Un inspecteur de la jeunesse, des sports et de la recherche, parvenu à l’âge de 67 ans, a formulé une demande de maintien en fonction jusqu’à ses soixante-dix ans. Il se tourna vers le tribunal administratif de Paris qui décida de suspendre la décision querellée. Le Conseil d’Etat annula cet arrêt et se permit de préciser le régime juridique applicable au report de la limite d’âge.
Tout d’abord, l’absence de droit à la prolongation d’activité est une solution tout à fait classique au regard l’article L556-1 (et suivants du CGFP). En effet, si l’on s’attarde à la lecture du dernier alinéa de cet article, on remarque que trois types de dispositif permettent de retarder l’acquisition de ces droits à la retraite.
Selon la Haute juridiction administrative, ce que sollicite le requérant est une « demande de prolongation d’activité » [2].
A cet effet, la prolongation de l’activité suppose un "large pouvoir d’appréciation de l’administration" [3].
On comprend donc que le Conseil d’Etat s’aligne sur une de ses positions récentes en retenant cette solution.
La motivation de cette prise de position constitue le fait majeur de cet arrêt. Le Conseil d’Etat considère que les dispositions de l’article L556-1 CGFP « confèrent à l’autorité compétente un large pouvoir d’appréciation de l’intérêt, pour le service, d’autoriser un fonctionnaire atteignant la limite d’âge à être maintenu en activité. Elle peut ainsi, notamment, se fonder sur l’objectif tendant à privilégier le recrutement de jeunes agents par rapport au maintien en activité des agents ayant atteint la limite d’âge ».
Cette notion d’« intérêt du service », permet à l’administration d’opposer une variété large de motif de refus, sous réserve de motiver dûment la décision prise.
In fine, le Conseil d’Etat apprécie le caractère urgent du recours « La condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à la situation du requérant et aux intérêts qu’il entend défendre. Il en va ainsi, alors même que cette décision n’aurait un objet ou des répercussions que purement financiers et que, en cas d’annulation, ses effets pourraient être effacés par une réparation pécuniaire » [4].
Il considère ici que le requérant « n’apporte aucune précision sur le caractère insuffisant de la pension qui lui serait octroyée au regard de ses charges actuelles, alors même qu’il ne pouvait ignorer le moment où il atteindrait la limite d’âge et les conséquences normalement attendues de celle-ci sur ses revenus » [5].
B. Le régime du complément de rémunération des agents exerçant outre-mer (CE, 28/03/2024, n°473733 et CE, 26/04/2024 n°467246).
Le complément de rémunération, mise en place dans les années 1950 [6], sont des dispositifs visant à compenser le coût de la vie entre la métropole et les territoires ultra-marins, constitués de majoration de traitement et de diverses indemnités.
A ce titre la Cour des Comptes a effectué un contrôle de cet outil devenu complexe et générateur d’inégalité entre les agents car les fonctionnaires territoriaux ne peuvent bénéficier de ces indemnités, ces derniers étant réservés aux fonctionnaires d’Etat et hospitaliers.
Le Conseil d’Etat, dans un arrêt de mars 2024 réaffirme la nécessité de protéger cet outil. Tout d’abord, le Conseil d’Etat s’aligne sur une jurisprudence constante et réaffirme que la majoration de traitement outre-mer à la nature d’une indemnité liée à l’exercice des fonctions [7]. Le versement de la majoration de traitement est donc conditionnée par deux critères cumulatifs : l’exercice des fonctions de l’agent public et l’exigence de résidence au sein du département ultramarin.
En premier lieu un critère matériel : si l’exercice des fonctions peut être altéré par un accident de service mais, dans ce cas précis, l’agent conservera tout de même l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit en état de reprendre le service [8].
En second lieu un critère géographique : les avantages institués par la loi du 30 avril 1950 sont conditionnés à la résidence dans un département d’outre-mer [9].
Auparavant, la Haute juridiction administrative considérait que l’exercice des fonctions était la conséquence logique du critère d’exigence de résidence dans un département d’outre-mer.
A présent, le juge administratif considère que le fonctionnaire en congé pour des raisons de santé résidant hors du territoire ultramarin est sans incidence sur son complément de rémunération [10].
Au-delà de ces nouveaux droits aux bénéfices des fonctionnaires, le juge administratif est venu renforcer certaines obligations que l’administration devra se contenter de remplir.
III. Le renforcement de la protection des agents publics.
La situation des agents publics a été sécurisé tant d’un d’un point de vue de la garantie des droits des agents (A) ; que de la protection de l’administration dont ils peuvent bénéficier (B).
A. Le raffermissement de la garantie des droits des agents publics (Conseil Constitutionnel, 26/06/2024, QPC n°2024-1097 ; Conseil Constitutionnel, 04/10/2024, QPC n°2024-1105 ; Conseil d’Etat, 18/06/2024, n°463484).
Le champ des garanties accordées aux agents publics s’est élargi de manière significative. Par exemple, l’administration ne peut désormais porter atteinte à la vie privée d’un agent sans justification valable [11]. D’une toute autre manière, l’agent public a droit à un procès équitable avant toute sanction disciplinaire et doit pouvoir se défendre et être informés des motifs reprochés [12].
Plus globalement, le droit au procès équitable des agents publics a fait l’objet d’un approfondissement notable dans la jurisprudence récente, offrant ainsi un terrain d’analyse particulièrement riche en ce qui concerne le droit pour l’agent public de se taire.
Il faut rappeler au préalable que le Conseil Constitutionnel a admis que l’agent a le droit de se taire dans le cadre d’une procédure disciplinaire [13]. Ainsi, en soulignant que le droit de se taire est une composante essentielle du droit à un procès équitable, le juge considéré que ce droit doit être respecté lors de toute procédure, y compris disciplinaire, et qu’une information préalable est nécessaire pour garantir son exercice effectif.
En premier lieu, par un arrêt en date du 19 avril 2024, le Conseil d’Etat a transmis au Conseil Constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité afin que celui-ci examine la conformité à la Constitution des dispositions législatives portant régime disciplinaire des magistrats.
Il réaffirme, de manière générale, qu’il résulte de l’article 9 de la DDHC, que « nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition. Elles impliquent que le professionnel faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’il soit préalablement informé du droit qu’il a de se taire » [14].
Puis le Conseil Constitutionnel applique le cas à l’espèce et affirme que le droit de garder le silence, garanti par la Constitution, doit être rappelé au magistrat à tout moment de la procédure disciplinaire, que ce soit lors des investigations préalables ou lors de la phase contradictoire devant le Conseil de discipline.
Cette décision s’inscrit dans une évolution jurisprudentielle plus large visant à renforcer les garanties procédurales accordées aux agents publics et à assurer un meilleur équilibre entre les exigences de l’administration et les droits individuels.
A ce titre le juge constitutionnel va, à travers son pouvoir prétorien, poursuivre son œuvre de défense des droits individuels des agents publics, comme dans sa décision du 4 octobre 2024.
Ici, le requérant demandait le droit d’avoir accès à l’intégralité de son dossier individuel dès lors que le fonctionnaire est impliqué dans une procédure disciplinaire [15].
Cependant, si l’administration est tenue d’informer l’agent public de son droit à communication de son dossier individuel, tel n’est pas le cas du droit pour l’agent de garder le silence dans le cadre d’une procédure disciplinaire.
Le juge constitutionnel, après avoir rappelé son interprétation de l’article 9 de la DDHC, affirme que cet article sous-entend également que ces mesures visent à assurer le respect du droit fondamental de tout individu à ne pas être contraint de témoigner contre lui-même. Ainsi, le professionnel doit être informé de ce droit avant toute audition devant le Conseil de discipline.
En effet, « Lorsqu’il comparaît devant cette instance, le fonctionnaire peut être amené, en réponse aux questions qui lui sont posées, à reconnaître les manquements pour lesquels il est poursuivi disciplinairement.
Or, les déclarations ou les réponses du fonctionnaire devant cette instance sont susceptibles d’être portées à la connaissance de l’autorité investie du pouvoir de sanction ».
Partant, en considérant que le législateur n’a pas prévu de dispositif permettant au fonctionnaire de se prémunir d’un droit de se taire durant une procédure disciplinaire, les articles en questions doivent être considérés comme inconstitutionnels.
En reconnaissant de nouvelles garanties procédurales, ces décisions contribuent à l’affirmation du droit à un procès équitable dans le secteur public.
Enfin, de nouvelles garanties sont apportées de la même manière aux agents publics par le juge administratif. En effet, dans un arrêt du 18 juin 2024, le Conseil d’Etat admet l’existence d’une présomption de préjudice pour engager la responsabilité d’une personne publique dès lors qu’une violation relative aux règles maximales de temps de travail et aux règles minimales de repos.
Le requérant soutient avoir subi un préjudice en raison du dépassement systématique de sa durée de travail quotidienne et du non-respect par son employeur des règles relatives aux temps de repos.
Cette présomption de préjudice rompt avec les conditions classiques d’engagement de la responsabilité administrative car la faute de l’employeur, constitué par la violation de la réglementation relative au temps de travail cause un dommage s’illustrant par l’atteinte portée à la sécurité de l’agent et à sa santé permet la mise en place de la constitution d’une présomption de préjudice. Il n’y a pas lieu de prouver l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice subi et la faute.
Cette présomption de préjudice n’est pas nouvelle mais a été consacré récemment (CE, 19/10/2007, n°296529), dès lors que les circonstances étaient considérées comme étant particulières (CE, 17/07/2009, n°295653). Cet arrêt est conforme à un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) [16].
Plus précisément cette jurisprudence s’inscrit dans la droite ligne de plusieurs arrêts du Conseil d’Etat qui affirmait que le dépassement de la durée du temps de travail prévus par le droit de l’Union européenne et par le droit national ouvre droit à l’indemnisation d’un préjudice en ce qu’il porte atteinte à la sécurité des intéressés indépendamment de leur rémunération [17].
C’est donc la justification de l’existence de ce préjudice qui importe. On remarque que la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 n’encadre pas les conditions d’engagement de la responsabilité d’une personne publique sur la violation des dispositions relatives au repos dominical. Le juge administratif rejette toute présomption de préjudice et impose à la victime de prouver concrètement le dommage subi en raison de la violation des dispositions en question.
Cet arrêt aura permis l’élargissement de la présomption de préjudice et des justifications afférentes à ce dernier par le juge administratif.
Outre la protection des droits de l’agent public, le juge administratif et constitutionnel renforce également l’appui de l’administration lorsqu’un fonctionnaire est impliqué dans une procédure contentieuse.
B. La place de la protection fonctionnelle et la préservation des garanties des agents publics.
L’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a institué un dispositif de protection fonctionnelle, permettant à un tiers d’engager la responsabilité d’un agent à raison de ses fonctions, sous réserves qu’aucune faute personnelle détachable du service ne lui soit imputable. Ce dispositif est aujourd’hui codifié au sein des articles L135-1 et suivants du CGFP.
Le Conseil d’Etat, dans un premier temps vient recadrer la place de la protection fonctionnelle puis, offre de nouvelles garanties aux agents.
En premier lieu (CE, 15/02/2024, n°462435), le Conseil d’Etat réaffirme que l’inapplicabilité de la protection fonctionnelle au vol d’effets personnels n’exclut pas la possibilité d’engager la responsabilité de l’administration pour faute de service, à condition que le préjudice subi par l’agent public soit directement lié à cette faute.
En l’espèce, un agent public s’est fait volet ses affaires dans les locaux du service départemental d’incendie et de secours, il sollicite la protection fonctionnelle qui lui est refusée et, dans un second temps, désire engager la responsabilité du SDIS.
La Haute juridiction administrative fait preuve d’une grande pédagogie en rappelant et analysant d’une part, les conditions d’engagement de la responsabilité administrative et d’autre part, en faisant de même avec la protection fonctionnelle.
Le Conseil d’Etat considère ici que les articles L135-1 et suivants du CGFP " établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des sapeurs-pompiers volontaires, lorsqu’ils ont été victimes d’attaques à l’occasion ou du fait de leurs fonctions, sans qu’une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent concerné est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts subis, y compris ceux résultant d’une atteinte portée à ses biens. Cette protection n’est due, cependant, que lorsque les agissements concernés visent l’agent concerné à raison de sa qualité d’agent public. [18].
Puis il applique cette règle aux faits de l’espèce : « qu’il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le vol du véhicule personnel et du matériel photographique de M. B… résulterait d’une volonté de lui porter atteinte en sa qualité de sapeur-pompier volontaire, quand bien même ce vol a été commis sur les lieux du service et pendant les heures de service de M. B. » [19].
En bref, la protection fonctionnelle n’est accordée qu’aux agents publics qui sont victimes d’actes liés à l’exercice de leurs fonctions. Il appartient à l’agent de démontrer ce lien de causalité pour bénéficier de cette protection.. La dureté supposée de cet arrêt se justifie, en fait, par la nature de la garantie offerte aux agents.
En deuxième lieu, le Conseil d’État veille à ce que les agents publics bénéficient d’une protection efficace, tout en garantissant le bon fonctionnement des services publics. Il a ainsi affirmé le caractère confidentiel des demandes de protection fonctionnelle et des plaintes pénales, afin de préserver les droits de la défense des agents et d’éviter toute atteinte à leur réputation (CE, 11/03/2024, n°454305).
En l’espèce, un agent demanda la communication de la plainte pénale de deux de ses anciennes subordonnées ainsi que les demandes de protection fonctionnelle afférentes à cette première procédure.
Nous pouvons admettre que la plainte pénale n’a pas été communiquée, cette position étant classique et s’inscrivant dans la droite ligne de sa jurisprudence [20]. La protection fonctionnelle peut être demandé dans les relations entre un agent et son supérieur si ce dernier a commis des actes qui « par leur nature et leur gravité son inscusceptibles de se rattacher au pouvoir hiérarchique » [21].
En revanche, la demande de protection fonctionnelle constitue un document administratif communicable au sens de l’article L300-2 du Code des relations entre le Public et l’Administration (CRPA).
Dans le même temps, le Conseil d’Etat fait une interprétation large de l’article L311-6 3° du CRPA qui dispose que « Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs faisant apparaître le comportement d’une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice ».
Ainsi, ce n’est pas tant le comportement de la personne qu’il faut analyser pour caractériser le caractère communicable du document mais le préjudice qui découle de ce comportement [22].
En troisième et dernier lieu, se pose la question du déploiement de la protection fonctionnelle au bénéfice des élus locaux, ce à quoi le Conseil Constitutionnel vient apporter une précision intéressante (11/10/2024, QPC n°2024-1106).
En l’espèce la requérante, arguée du fait que l’article L2123-34 du Code général des collectivités territoriales n’accordait la protection fonctionnelle à certains élus locaux que pendant l’enquête pénale et non lorsqu’ils font l’objet d’une enquête préliminaire. De plus, cela introduirait une différence de traitement entre les agents publics et les élus locaux.
Le Conseil Constitutionnel commence par rejeter le moyen selon lequel il existerait un principe fondamental reconnu par les lois de la République : « Ces dispositions n’ont toutefois eu ni pour objet ni pour effet de consacrer un principe selon lequel la protection fonctionnelle devrait bénéficier à tout agent public mis en cause à raison de faits commis dans l’exercice de ses fonctions, dès lors qu’il ne s’agit pas de fautes détachables, ni, en tout état de cause, à un élu local. » [23].
Il poursuit en affirmant que s’il existe une différence de traitement entre élus et agents publics de l’octroi de la protection fonctionnelle [24], les agents publics « ne se trouvent pas dans la même situation que les élus chargés d’administrer la commune, au regard notamment de la nature de leurs missions et des conditions d’exercice de leurs fonctions. Compte tenu de cette différence de situation, le législateur n’était donc pas tenu de les soumettre aux mêmes règles de protection fonctionnelle » [25].
Le Conseil constitutionnel justifie donc cette différence de situation mais dans le même temps affirme qu’il serait heureux d’élargir cette mesure de protection aux élus locaux à d’autres actes de la procédure pénale [26].
Il appartient donc au législateur de prendre les mesures qui s’imposent.
IV. Un peu de légèreté....
Nous terminons notre analyse avec un peu de douceur, afin de montrer qu’au-delà de la froideur que peuvent inspirer un arrêt du Conseil d’Etat certains faits peuvent prêter à sourire (CE, 10/07/2024, n°466526).
En l’espèce un agent public, exerçant une fonction de maintenance au sein d’un collège a fait l’objet d’une procédure disciplinaire car il animait des soirées musicales durant les nuits en même temps qu’il exerçait sa fonction au sein du collège.
Commençons par rappeler que le cumul d’un emploi public et d’une activité privée lucrative est en principe interdit. Toute dérogation à ce principe doit être expressément autorisée par l’administration [27]. La sanction doit être proportionnée.
Si l’activité d’animation musicale ne porte pas en tant que tel, atteinte à la dignité du service, il y a une violation manifeste des obligations statutaires de l’agent et des règles relatives au cumul d’activités [28]. En effet, l’agent, avant d’être sanctionné avait reçu plusieurs avertissements de la part de son administration. Cette révocation est donc est justifiée
En bref et pour terminer, l’autorité hiérarchique doit prendre en compte la proportionnalité des sanctions disciplinaires et disposent d’un pouvoir large pour autoriser ou refuser l’exercice d’activités accessoires.
Ces différentes évolutions témoignent d’une volonté de renforcer l’attractivité de la fonction publique et de la rendre plus agile face aux défis du XXIe siècle.
Il convient de formuler le vœu que les garanties accordées aux agents publics soient encore renforcées en 2025, dès lors que les conditions économiques et politiques le permettent !