Les faits
Le contrat de travail du nouveau DRH fait simplement renvoi, pour la durée du travail de celui-ci, à l’accord d’entreprise en vigueur relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail. Il semble qu’aucune disposition plus précise ne figure dans le contrat dont on peut même penser qu’il ne mentionne pas le mot « forfait ».
A la rupture du contrat, intervenue pendant la période d’essai, l’ex - DRH demande à bénéficier du paiement des heures supplémentaires qu’il a effectuées depuis son entrée dans l’entreprise ainsi que de l’indemnité pour travail dissimulé de l’article L 8221-13.
Sa demande est repoussée : les juges de la Cour d’appel de Lyon constatent le renvoi fait dans le contrat, au sujet de la durée du travail, aux dispositions contenues dans l’accord d’entreprise. Ils font donc application de cet accord et de son avenant « cadres » au litige, cet avenant prévoyant 217 jours de travail à raison de 39 heures par semaine avec, en compensation, 10 jours de réduction du temps de travail pris dans l’année. Ils jugent que le salarié a contractuellement accepté cette rémunération forfaitaire.
La décision
La Cour de cassation désavoue les juges de la Cour d’appel de Lyon au visa de l’article L3121-38 du Code du travail qui stipulait à l’époque des faits que la durée du travail du cadre « peut être fixée par des conventions individuelles de forfait établies sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle » en déduisant par conséquent que « ces conventions doivent nécessairement être passées par écrit ».
Précisons qu’aujourd’hui, l’article L3121-40 (résultant de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008) prévoit : « la conclusion d’une convention individuelle de forfait requiert l’accord du salarié. La convention est établie par écrit. »
La Cour reprend la constatation faite par les juges du fond, à savoir que le contrat de travail contient uniquement, concernant la durée du travail, la référence à l’accord d’entreprise en vigueur.
Elle juge que, dans ce cas, aucune convention individuelle de forfait n’a été effectivement passée par écrit entre la société et le salarié, « le seul renvoi général fait dans le contrat de travail à l’accord d’entreprise ne pouvant constituer l’écrit requis ».
Au final, cette décision désavoue la Cour d’appel qui aurait dû
accorder au salarié le paiement des heures supplémentaires qu’il réclamait et
condamner l’entreprise à lui verser l’indemnité pour travail dissimulé.
Conclusion et conseil RH
Les récentes décisions intervenues en matière de forfaits en jours dessinent les exigences requises pour la mise en œuvre de forfaits en jours. L’entreprise doit nécessairement disposer d’un certain nombre d’outils juridiques :
(1) un accord d’entreprise (ou, à défaut, une convention collective ou un accord de branche) prévoyant avec précision les modalités des forfaits en jours (article L3121-39) et garantissant la protection de la sécurité et de la santé des salariés soumis au forfait en jours.
Doivent notamment être détaillés : durée maximale de travail, durée des repos hebdomadaire et journalier, nombre de jours travaillés, modalités de décompte des journées ou demi-journées travaillées ainsi que des repos, modalités de suivi régulier de l’amplitude des jours de travail et de la charge de travail ;
(2) une convention individuelle de forfait en jours écrite acceptée par le salarié (article L3121-40) ;
(3) la mise en place effective du suivi par l’employeur de la durée de travail du salarié en forfait en jours dans le respect des dispositions prévues par l’accord collectif instituant le forfait en jours ;
(4) la mise en place effective du contrôle par l’employeur de la charge de travail du salarié avec, au moins une fois par an, un entretien annuel légalement prévu.
Concernant le contenu du contrat de travail, cette décision du 31 janvier 2012 nous indique que le détail quantitatif du « forfait » accepté par le salarié est une information nécessaire et que la référence à l’accord en vigueur dans l’entreprise ne peut à elle seule constituer cette information.
N’attendez pas pour vérifier vos contrats de travail et, si nécessaire, prévoir de conclure des avenants ! Reste à savoir comment ces avenants seront accueillis par les salariés…