Le plan d’épargne entreprise (PEE) : un dispositif rénové !

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Le Plan d'Épargne Entreprise (PEE) est accessible à tous les salariés d'une entreprise, sous conditions d'ancienneté. Sa mise en place est facultative mais obligatoire avec un accord de participation. Les versements des salariés et abondements de l’entreprise sont encadrés. Les fonds sont bloqués pendant cinq ans.
Description rédigée par l'IA du Village

Le plan d’épargne entreprise (PEE) est un système collectif d’épargne qui permet aux salariés et aux dirigeants des PME d’acquérir des valeurs mobilières avec l’aide de l’entreprise (C. trav. art. L3332-1). La loi n°2023-1107 du 29 novembre 2023 relative au partage de la valeur et ses décrets d’application n° 2024-644 du 29 juin 2024 et n° 2024-690 du 5 juillet 2024 ont rénové ce dispositif.

-

1/ Les entreprises concernées.

Le PEE peut être mis en place dans toute entreprise sans condition relative à son activité, à sa forme juridique ou à son effectif.

Il peut notamment être créé pour recevoir les versements faits aux salariés en application d’un accord de participation ou d’intéressement.

La mise en place du PEE est facultative pour les entreprises, mais lorsqu’il existe un accord de participation au sein d’une entreprise, la mise en place du PEE devient obligatoire.

2/ Les bénéficiaires du PEE.

Le PEE a un caractère collectif [1].

Dès lors que l’entreprise a mis en place un PEE, il doit donc être ouvert à tous les salariés.

Toutefois, une condition d’ancienneté peut être exigée. Elle ne peut excéder trois mois [2].

En cas de rupture du contrat de travail (démission, licenciement, retraite, préretraite...), le salarié peut conserver son PEE dans certaines conditions.

En effet, les anciens salariés partis à la retraite ou en préretraite peuvent continuer à effectuer des versements au PEE [3], mais sans abondement de l’entreprise.

Les autres peuvent conserver leurs avoirs sur le plan mais ne peuvent plus y effectuer de versement après la rupture de leur contrat de travail, sauf pour y affecter l’intéressement et la participation perçus postérieurement.

Peuvent également participer au PEE :

  • Les salariés d’un groupement d’employeurs ;
  • Les agents commerciaux et les agents généraux d’assurance sous certaines conditions [4].

Par ailleurs, les dirigeants de société ne peuvent pas, en principe, participer à un PEE, sauf s’ils cumulent un contrat de travail avec leur mandat [5].

Par exception, dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 1 et moins de 250 salariés, les dirigeants et le conjoint du chef d’entreprise peuvent y participer.

Il n’est pas nécessaire que le règlement le prévoie [6].

L’époux ou le partenaire de Pacs du dirigeant peut aussi bénéficier du PEE s’il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé [7].

3/ La mise en place du PEE.

Le PEE peut être établi à tout moment et pour une durée déterminée ou indéterminée à l’initiative de l’entreprise, par une décision unilatérale établissant le règlement du plan, ou en vertu d’un accord avec le personnel, conclu dans les conditions prévues à l’article L3322-6 [8].

La négociation du plan avec le personnel est obligatoire lorsque l’entreprise comporte au moins un délégué syndical ou un comité social et économique (CSE).

Si la négociation échoue, un PV de désaccord consignant les propositions respectives des parties et les mesures que l’employeur entend appliquer unilatéralement doit être établi et déposé avec le règlement.

Si le plan est mis en place par décision unilatérale de l’employeur, le CSE est consulté sur le projet de règlement du plan au moins 15 jours avant son dépôt [9].

Selon l’administration, cette consultation s’impose aussi lorsque la décision a été précédée d’une négociation avec un délégué syndical ou avec le CSE [10].

Le plan doit également faire l’objet d’une information du personnel lors de sa mise en place.

Dans les entreprises concernées par l’obligation de négocier, la modification du plan obéit à la même procédure.

4/ Le dépôt du règlement.

En application de l’article L3332-9 du Code du travail, le règlement du PEE doit être déposé sur la plateforme TéléAccords [11].

Le règlement doit être accompagné des annexes relatives aux critères de choix et à la liste des instruments de placement, ainsi que du procès-verbal de consultation du CSE si le plan est mis en place unilatéralement, ou des documents énumérés par les articles D3345-1 à D3345-3 du Code du travail s’il est mis en place par accord avec le personnel autre qu’un accord collectif.

Le dépôt est une condition des exonérations fiscales et sociales. Un abondement versé avant le dépôt n’en bénéficie donc pas.

Un dépôt commun des règlements de plan d’épargne salariale, accord de participation et accord d’intéressement conclus au même moment est possible.

5/ Les versements sur le PEE.

5.1. Les versements des salariés.

Les versements des salariés sont facultatifs.

Les salariés peuvent alimenter le PEE avec les sommes suivantes :

  • Sommes provenant de l’intéressement ;
  • Sommes provenant de la participation ;
  • Sommes provenant du transfert d’autres plans d’épargne salariale (sauf le Perco) ;
  • Droits inscrits sur un compte épargne temps (CET) ;
  • Versements volontaires.

Les versements volontaires sont plafonnés : le salarié peut verser chaque année civile (soit, du 1ᵉʳ janvier au 31 décembre), au maximum 25% de sa rémunération annuelle brute [12].

Le plan peut prévoir, pour chaque versement volontaire des participants, un montant minimum par support de placement, au plus égal à 160 euros [13].

Si les versements du salarié sont destinés à alimenter un FCPE (qui est un organisme de placement collectif en valeurs mobilières réservé aux salariés d’une entreprise) spécialement dédié à la reprise de l’entreprise, ils peuvent atteindre alors la totalité de sa rémunération annuelle [14].

5.2. Les abondements de l’entreprise.

Le PEE peut être alimenté par des versements de l’entreprise, appelés « abondements », qui visent à compléter les versements des salariés.

L’abondement de l’employeur ne peut pas dépasser, chaque année, pour chaque bénéficiaire, 8% du montant annuel du PASS (soit 3 709,44 euros en 2024), dans la limite du triple des versements volontaires de l’intéressé [15].

Ce plafond est porté à 16% du montant annuel du PASS (soit 7 418,88 euros en 2024) en cas de versement unilatéral de l’employeur en vue de l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissements émis par l’entreprise ou une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes au sens du deuxième alinéa de l’article L3344-1 du Code du travail [16].

5.3. Les versements unilatéraux de l’entreprise.

L’entreprise peut également effectuer des versements unilatéraux sur le PEE [17], même en l’absence de versements des salariés, dans les conditions suivantes :

  • Le règlement du PEE doit prévoir cette faculté ;
  • Le versement doit être destiné à l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par l’entreprise ou par une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes au sens du deuxième alinéa de l’article L3344-1 du Code du travail ;
  • L’attribution doit être uniforme pour l’ensemble des salariés.

Les actions ou certificats d’investissement ainsi acquis par le salarié sont bloqués pendant 5 ans.

Le plafond annuel des versements unilatéraux est aligné sur le plafond d’exonération de la prime de partage de la valeur (PPV), soit 3 000 euros par bénéficiaire et par année civile [18].

Ce montant est porté à 6 000 euros par bénéficiaire et par an pour :

  • Les associations et les fondations d’utilité publique ou d’intérêt général et les Esat bénéficiant du relèvement du plafond pour la PPV ;
  • Les employeurs mettant en œuvre, à la date du versement unilatéral, ou ayant conclu, au titre du même exercice que celui du versement, un dispositif d’intéressement lorsqu’ils sont soumis à l’obligation de mise en place de la participation, ou un dispositif d’intéressement ou de participation, lorsqu’ils ne sont pas soumis à cette obligation.

Par ailleurs, lorsque l’employeur procède à un versement unilatéral, le plafond total annuel d’abondement au PEE est relevé à 16% du PASS, soit 7 418,88 euros en 2024 (contre 8% du PASS dans le cas inverse).

5.4. L’affectation des fonds.

Les sommes versées ou affectées à un plan doivent être employées dans un délai de 15 jours à compter de leur versement par l’adhérent ou de la date à laquelle elles sont dues [19].

L’affectation au plan de l’abondement de l’entreprise intervient concomitamment aux versements de l’adhérent ou, au plus tard, à la fin de chaque exercice et, en tout état de cause, avant le départ de l’adhérent de l’entreprise.

Les sommes versées sur le PEE peuvent être investies dans les actions de l’entreprise, dans des parts de société d’investissement à capital variable (SICAV) ou dans des Organismes de placement collectif en valeurs mobilières réservé aux salariés d’une entreprise (FCPE), en application des articles L3332-15 et L3332-17 du Code du travail. Les FCPE peuvent comporter des parts de l’entreprise créatrice du PEE, même si elle est une coopérative.

Une partie des sommes versées sur le PEE doit être investie dans les parts d’entreprises solidaires d’utilité sociale.

Un FCPE peut être spécialement dédié à la reprise de l’entreprise par les salariés.

Depuis le 1ᵉʳ juillet 2024, le règlement du PEE doit également offrir la faculté d’affecter une partie des sommes épargnées à l’acquisition de parts « d’au moins un fonds labellisé ou d’un fonds nourricier d’un fonds labellisé au titre du financement de la transition énergétique et écologique ou de l’investissement socialement responsable ».

L’article 3 du décret n° 2024-644 du 29 juin 2024 dresse la liste des labels concernés :

  • Le label « investissement socialement responsable » : critères et modalités de délivrance fixés par le décret 2016-10 du 8 janvier 2016 ;
  • Le label « France finance verte » : critères et modalités de délivrance fixés aux articles D128-1 s. du Code de l’environnement ;
  • Le label « Relance » : critères et modalités de délivrance fixés par la charte issue de l’accord de place du 19 octobre 2020 ;
  • Le label « Finansol » : critères et modalités de délivrance fixés par le règlement élaboré par l’association FAIR ;
  • Le label « Comité intersyndical de l’épargne salariale » issu de l’accord du 29 janvier 2002 : critères et modalités de délivrance fixés par un cahier des charges.

6/ Le blocage ou la disponibilité des sommes.

Les sommes investies dans le PEE sont bloquées pendant au moins 5 ans [20].

Toutefois, le bénéficiaire du PEE peut demander le déblocage anticipé des sommes dans certains cas [21] :

  • Mariage, conclusion d’un Pacs ;
  • Naissance ou adoption d’un 3ᵉ enfant ;
  • Divorce, séparation, dissolution d’un Pacs, avec la garde d’au moins un enfant ;
  • Victime de violence conjugale ;
  • Acquisition de la résidence principale ;
  • Construction de la résidence principale ;
  • Agrandissement de la résidence principale ;
  • Remise en état de la résidence principale ;
  • Invalidité (salarié, son époux(se) ou partenaire de Pacs, ses enfants) ;
  • Décès (salarié, son époux(se) ou partenaire de Pacs) ;
  • Cessation du contrat de travail (licenciement, démission, départ à la retraite avant l’expiration du délai de 5 ans) ;
  • Création ou reprise d’entreprise ;
  • Surendettement ;
  • Travaux de rénovation énergétique de la résidence principale ;
  • Activité de proche aidant ;
  • Achat d’un véhicule « propre ».

La demande de déblocage anticipé doit intervenir dans les 6 mois suivant l’événement.

Toutefois, elle peut intervenir à tout moment en cas de rupture du contrat de travail, décès, invalidité, violence conjugale, surendettement, travaux de rénovation énergétique de la résidence principale, activité de proche aidant et achat d’un véhicule.

7/ L’information des salariés.

Le règlement du PEE doit déterminer les conditions dans lesquelles le personnel est informé de son existence et de son contenu et prévoir les modalités d’une aide à la décision pour les bénéficiaires du plan [22].

L’information sur le contenu du plan doit être délivrée dès son instauration [23].

Au moment de l’embauche, l’employeur doit remettre au salarié un livret d’épargne salariale indiquant les dispositifs mis en place dans l’entreprise.

Si l’entreprise a mis en place un PEE, elle doit lui remettre un règlement qui l’informe de l’existence du plan et de son contenu.

Au moins une fois par an, la personne chargée de la tenue du registre des comptes administratifs doit remettre au salarié un relevé de situation, devant indiquer l’estimation de la valeur de son portefeuille au 31 décembre de l’année précédente (C. trav. art. R3332-16.]].

Le relevé doit également faire apparaître les versements et les retraits effectués durant la période précédente.

Lorsque le salarié quitte l’entreprise, il doit recevoir un état récapitulatif de l’ensemble des sommes et des valeurs mobilières épargnées ou transférées.

Si le salarié souhaite continuer à bénéficier du plan, il doit payer des frais de tenue de compte-conservation.

L’entreprise peut aussi décider de prendre en charge ces frais.

L’état récapitulatif qui est remis au salarié lors de son départ doit préciser si les frais sont pris en charge par l’entreprise ou par prélèvement sur ses avoirs.

8/ Le régime social et fiscal.

8.1. Le régime social.

L’abondement de l’entreprise n’est pas pris en compte pour l’application de la législation du travail et échappe aux cotisations de Sécurité sociale [24].

La règle est la même que pour la participation et revêt la même portée.

En principe, l’abondement est soumis au forfait social au taux de 20% [25].

Par exception :

  • Il en est exonéré dans les entreprises non assujetties à la participation ;
  • Un taux réduit de 10% s’applique à l’abondement complétant une contribution des bénéficiaires destinée à l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par l’entreprise ou par une entreprise d’un groupe, inclus dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes [26].

Le même taux réduit s’applique au versement unilatéral pour acquérir des actions de la société.

Concernant la CSG et la CRDS, par application de l’article L136-1-1, I du CSS, les sommes réparties individuellement entre les salariés au titre de la participation, de l’intéressement, de même que l’abondement et le versement unilatéral de l’employeur aux plans d’épargne (PEE, PEI, Perco, Pereco) sont assujettis à CSG et CRDS.

Ces contributions sont précomptées dès la répartition, sans attendre la disponibilité des sommes.

Le taux est celui applicable aux salaires et la déduction forfaitaire pour frais professionnels ne s’applique pas.

8.2. Le régime fiscal.

En matière fiscale, l’abondement est déductible des bénéfices imposables de l’entreprise [27].

Il est soumis, le cas échéant, à la taxe sur les salaires [28].

Il est, en revanche, exonéré des autres taxes et participations assises sur les salaires.

Pour les bénéficiaires, il est exonéré de l’impôt sur le revenu [29], à condition d’être maintenu dans le plan pendant au moins 5 ans sauf cas de déblocage anticipé, cette exonération s’appliquant aussi aux revenus du portefeuille collectif (à condition d’être réemployés dans le plan et frappés de la même indisponibilité que les titres auxquels ils se rattachent) et aux plus-values de cession de titres [30].

Les exonérations fiscales et de cotisations de Sécurité sociale sont conditionnées au respect des dispositions régissant les PEE, notamment : dépôt de l’accord, caractère collectif du plan, plafonnement de l’abondement et non-substitution au salaire, indisponibilité des sommes.

Le dépassement des plafonds est sanctionné par la réintégration de la fraction excédentaire.

Les versements personnels des salariés ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur le revenu.

Le régime social et fiscal de l’abondement s’applique également aux versements unilatéraux de l’employeur.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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[1C. trav. art. L3332-1.

[2C. trav. art. L3342-1.

[3C. trav. art. L3332-2.

[4C. trav. art. R3331-1 et D3331-3.

[5Rép. Teissier : AN 11-5-1998.

[6C. trav. art. L3332-2.

[7C. trav. art. L3332-2.

[8C. trav. art. L3332-3.

[9C. trav. art. L3332-5.

[10Guide épargne salariale juillet 2014.

[12C. trav. art. L3332-10.

[13Arrêté du 10-10-2001.

[14C. trav. art. L3332-10.

[15C. trav. art. L3332-11 ; R3332-8.

[16C. trav. art. R3332-8°.

[17C. trav. art. D3332-8-1.

[18C. trav. art. D3332-8-1.

[19C. trav. art. R3332-10.

[20C. trav. art. L3332-25.

[21C. trav. art. R3324-22.

[22C. trav. art. L3332-7.

[23Cass. soc. 5-3-2008, n° 06-45.205.

[24C. trav. art. L3332-27.

[25CSS. art. L137-16.

[26CSS art. L137-16.

[27CGI art. 237 ter.

[28CGI art. 231, 1.

[29C. trav. art. L3332-27.

[30CGI art. 163 bis B et 150-0 A, III.

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