[Tribune] Rappel sur le rapport entre le nouveau divorce par consentement mutuel et l’intervention du notaire.

Par Corentin Delobel, Avocat.

2643 lectures 1re Parution: 4 commentaires 4.69  /5

Explorer : # divorce par consentement mutuel # rôle du notaire # procédure civile # collaboration entre avocats et notaires

Je m’exprime certainement au nom de plusieurs de mes confrères qui se heurtent parfois à un mur lorsqu’il s’agit du rapport que les avocats entretiennent avec les notaires dans le cadre du "nouveau" divorce par consentement mutuel. Ce bref article ne fait que rappeler des éléments clairs qui continuent pourtant à poser des difficultés pratiques.

-

Le nouveau divorce par consentement mutuel étant presque ancré par habitude dans nos Cabinets, rentrant directement dans le coeur du sujet, la question pratique qui se pose, notamment pour les époux, lorsque la convention de divorce a été signée en bonne et due forme par ceux-ci et chacun des avocats, par delà l’envoi à un notaire pour le dépôt au rang des minutes, est de savoir s’il faut le présenter devant le notaire pour l’enregistrement de l’acte ?

Beaucoup de notaires encore, certainement par habitude professionnelle, refusent de faire les formalités sans avoir eu les époux signataire de la convention en leur Etude.

Or, l’article 229-1 du Code civil prévoit que le simple dépôt donne ses effets à la convention en lui conférant date certaine et force exécutoire. En outre, le décret qui modifie l’article 1145 du code de procédure civile est clair et dispose :
« La convention de divorce est signée par les époux et leurs avocats ensemble, en trois exemplaires.
(…) Chaque époux conserve un original de la convention accompagné, le cas échéant, de ses annexes et revêtu des quatre signatures.
Le troisième original est destiné à son dépôt au rang des minutes d’un notaire.
Le cas échéant, un quatrième original est établi dans les mêmes conditions, pour permettre la formalité de l’enregistrement} ».

L’article 1146 du code de procédure civile ajoute enfin : « La convention et ses annexes sont transmises au notaire, à la requête des parties, par l’avocat le plus diligent, aux fins de dépôt au rang des minutes du notaire dans un délai de 7 jours suivant la signature de la convention ».

Comme l’a d’ailleurs précisé le Ministre de la Justice, le rôle du notaire est très limité puisque ce sont les avocats qui se trouvent au cœur de ce nouveau divorce, ils sont les garants de l’équilibre de l’acte sous signature privée qu’ils ont contresignés.

Un communiqué de presse du Ministre de la Justice avait en son temps précisé : Le notaire ne remplace pas le juge, il ne contrôle pas le consentement des parties ni l’équilibre de la convention, ces missions étant assurées par les avocats.

De la sorte, ni les parties, ni les avocats ne se présentent devant le notaire qui ne peut donc refuser le dépôt de l’acte qui lui est adressé ou conditionner ce dépôt à la présentation des époux.

Le notaire vérifiera en revanche le respect des mentions obligatoires, les signatures et le respect du délai de rétractation de 15 jours.

On peut comprendre la frustration des notaires, nos paires auxiliaires de justice, dont le rôle est effectivement limités dans cette procédure. Mais, dans un souci de bonne justice et d’entente entre nos professions complémentaires, appliquons simplement le droit positif tel qu’il est, sans complication.

Cette coopération a tout intérêt d’ailleurs à se faire au niveau du ressort du barreau, puisqu’en l’absence de précision des textes en la matière, il n’y a pas de notaire territorialement compétent pour recevoir le dépôt de l’acte sous signature privée contresigné par les avocats.

Les époux et les avocats risquent donc de privilégier une Etude géographiquement différente qui accepterait le dépôt de l’acte avec moins de difficultés qu’un Notaire local qui se montre réticent pour accomplir les formalités.

En fin de compte, le notaire reçoit juste, dans un délai de 7 jours suivant la date de signature de la convention, la convention de divorce accompagnée le cas échéant du formulaire d’information complété par le (ou les) mineurs, est transmise au notaire, à la requête des parties par l’avocat le plus diligent.

A ce titre, certains notaires également refusent de prendre le risque d’accomplir les formalités en présence d’un enfant mineur, renvoyant les avocats à une procédure devant le Juge aux affaire familiales.

Pourtant, la situation est claire en la matière puisque, si un enfant est issu du mariage, il devra simplement être informé par ses parents du droit à être entendu par le juge dans les conditions prévues à l’article 388-1 du Code civil et qu’il ne souhaite pas faire usage de cette faculté. Pour les enfants qui sont dotés d’un discernement, un formulaire devra être rempli et signé, formulaire (arrêté du 28 décembre 2016). Dès lors qu’il n’y a pas de problème de cet ordre, la convention peut être déposée .

Le notaire, en fin de compte, se contente en effet de déposer, dans un délai de 15 jours, la convention au rang des minutes et remettra une attestation de dépôt qui permettra aux avocats des parties de transcrire le divorce en marge des actes de mariage ainsi que de l’acte de naissance de chacun des époux (article 1147 du code de procédure civile).

Pour ces formalités, le notaire facture un droit d’enregistrement de 50 euros, même s’il n’est pas précisé si ce droit d’enregistrement est soumis à la TVA ou non auquel cas ce ne serait pas 50 euros mais 60 euros (avec une TVA de 20%),

Certains notaires précisent qu’un droit d’enregistrement complémentaire de 125 euros devra être ajouté mais la loi comme le décret ne le mentionnent pas.

Alors, certes, la mission du notaire n’est pas des plus enrichissantes et des plus rémunératrices, mais à nouveau dans ce souci de bonne justice vis à vis du justiciable, une entente et une simple application du droit positif est la meilleure option.

Cela éviterait également de mettre nos professions en opposition.

Corentin Delobel
Avocat au Barreau de Nice
Docteur en Droit
Ancien Attaché Temporaire d\’Enseignement et de Recherche
Ancien chargé de cours
Membre du Centre de Recherche en Droit Economique
delobel.avocat chez gmail.com

http://avocat-nice-corentin-delobel.fr/

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

29 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • par Mayer anne , Le 20 août 2017 à 21:13

    Pas de problèmes pour le dépôt mais ne serait il pas possible Que les avocats fassent attention au respect des mentions obligatoires ? En effet trois renvois pour le même dossier pour des erreurs de copie colle Ca Fait trois recommandés Perso en tant que Clerc je trouve que ça dévalorise franchement le travail de l avocat et surtout Quand le client me dit ..,ah ben non j ai rien résigné ..serait çe â dire que l on change une Pagè sans prévenir le client ???tres surprise pour ma part ....

  • Maître
    je suis d’accord avec vous ; nous sommes devenus de simples dépositaires. Soit ! La loi est la loi. Encore faut il que les actes SSP soient parafés et signés par toutes les parties et sur toutes les pages et que vous ayez la gentillesse de nous adresser de manière concomitante les 50€TTC pour nous éviter un compte débiteur d’ailleurs interdit. De plus la responsabilité étant désormais supportée par vos compagnies d’assurance, on remarque que certains de vos confrères sont bien frileux et n’agissent qu’avec un accord écrit de leur client et cela retarde les négociations. En effet, vos clients sont souvent aussi nos clients et ceux-ci ont bien du mal à comprendre les compétences de chaque professionnel surtout si il y a des biens immobiliers. Mais bien entendu le souhait de chaque professionnel est que les DCM se déroulent au mieux. Cette convention SSP est elle réellement la plus judicieuse dans certains cas au regard des contentieux qui se profilent... Bien à vous

    • par Corentin DELOBEL , Le 18 août 2017 à 10:14

      Mon Cher Maître,

      je vous remercie pour votre contribution et, vous l’aurez compris, je cherche avant tout à ce que nous parvenions en quelque sorte à une "jurisprudence" cohérente entre nos professions dans le cadre de ce DCM. Je pense qu’il faut désormais faire un travail d’explication aux justiciables et à nos clients, en coopérant entre nos professions, notamment lorsqu’il y a un bien immobilier commun ainsi que vous l’évoquez. Et pour les 50 euros nous sommes malheureusement également tributaire du client tout comme nos honoraires. En tout cas, je comprends que ce rôle de simple dépositaire n’est pas des plus plaisants pour vous et qu’il soit perturbé par des paraphes incomplets ou des négociations qui tardent à se finaliser en nos Cabinets.
      Nous savons très bien qu’il y aura des contentieux en la matière, à nous au moins de nous montrer des auxiliaires de justice unis.
      Votre bien dévoué.

    • par Colin-Chauley , Le 18 août 2017 à 19:18

      Confrère,

      Je suis tout à fait d accord avec votre article ét il faut préciser que chacun prend ses responsabilités et que le notaire n est pas la pour contrôler notre travail non plus.
      Il s agit bien d une cooperation voulue ou pas mais elle s imposé !
      je voulais rajouter, lorsque que l on reprend - en tant qu avocat - une convention d un autre confrère ; il est nécessaire de faire recourir un délai de 15j suite aux modifications du nom d un des avocats. Ét la circulaire ministérielle est claire, pas de formalisme de RAR mais certains notaires les imposent ?!! Il est nécessaire de réunir les parties de retransmettre le projet de convention ét de refixer un rendez vous pour la signature 15j apres !
      Les avocats sont responsables de leur acte ét en répondent en dehors du Cridon ou de leurs partenaires notaires !!!!

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27886 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• [Dossier] Le mécanisme de la concurrence saine au sein des équipes.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs