Que vous soyez propriétaire ou locataire, un sinistre (dégâts des eaux, fissures, affaissement de plancher, etc.) peut surgir à tout moment, et mettre en péril le bien immobilier.
Si le premier réflexe est généralement la déclaration du sinistre à l’assurance du bien, cette dernière ne va pas nécessairement diligenter une expertise amiable afin d’en déterminer l’origine.
Pourtant, avant d’engager une procédure en responsabilité du ou des auteurs des désordres, il est nécessaire de recueillir des éléments de preuve suffisamment solides.
C’est à ce stade qu’intervient le référé-expertise, une procédure relativement rapide et efficace prévue à l’article 145 du Code de procédure civile qui dispose :
« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».
Ainsi, lorsque la solution du litige dépend d’une analyse technique, il est opportun de recourir à la procédure dite de référé-expertise, qui consiste à saisir le juge des référés afin de solliciter la désignation d’un expert judiciaire, un technicien spécialisé dans un domaine particulier (comptable, immobilier, médical, etc.) ayant pour mission de déterminer les causes des désordres, les solutions susceptibles d’y mettre fin, apprécier le chiffrage des préjudices et imputer les responsabilités.
L’expert est désigné parmi la liste des experts judiciaires inscrits auprès de la cour d’appel du ressort de la juridiction saisie.
La demande en référé est une procédure plus rapide que la procédure classique au fond (mesure d’urgence avant le procès). Généralement initiée par voie d’assignation par l’intermédiaire d’un avocat, cette procédure est orale avec représentation obligatoire des parties par un avocat.
En pratique, le demandeur devra avancer les frais de l’expertise notamment régler la provision fixée par le juge dans l’ordonnance de référé afin de confirmer la saisine de l’expert.
A réception, ce dernier convoquera les parties à une première réunion afin de procéder aux constats liminaires des désordres signalés dans l’assignation, et déterminer l’orientation des opérations d’expertise.
A cette occasion, il sera également évoqué la possibilité de mettre en cause de nouvelles parties qui pourraient avoir intérêt à participer à l’expertise, classiquement les assurances de parties d’ores et déjà dans la cause mais également le propriétaire de parties privatives impliquées dans les désordres, sous réserve d’un avis favorable de l’expert (visa).
L’expert peut également avoir recours à un expert dans un autre domaine que le sien, que l’on nomme sapiteur afin approfondir les investigations en lien avec les désordres allégués.
A l’issue des réunions, l’expert communique aux parties des notes afin de récapituler ses constats, donner des avis, demander des pièces complémentaires et les informer des prochaines étapes de l’expertise.
De leur côté, les parties communiquent avec l’expert par l’intermédiaire de leurs avocats via des dires afin de formuler leurs observations écrites et communiquer leurs pièces, qui seront annexées au rapport d’expertise.
L’expertise judiciaire prend fin avec le dépôt du rapport de l’expert au sein duquel il donne au juge son avis technique sur les points pour l’examen desquels il a été commis, sans pouvoir répondre à d’autres questions (sans accord des parties).
L’expert indiquera dans son rapport la ou les causes des désordres, appréciera les devis des travaux réparatoires produits par les parties, les chiffrages des préjudices allégués et imputera les responsabilités qui pourraient être engagées.
L’expert déposera également le mémoire de ses honoraires et frais d’expertise, les parties disposant d’un délai de 15 jours pour faire valoir leurs observations auprès du juge du contrôle des expertises en cas de contestation.
À l’issue de ce délai, le juge doit rendre l’ordonnance de taxe qui fixe la rémunération de l’expert.
Suivant les conclusions du rapport, une autre procédure au fond peut ensuite être envisagée afin de solliciter l’indemnisation des préjudices, et entre autres, le remboursement des frais d’expertise avancés.
Cette procédure sera abordée dans un autre article.
En résumé, le référé-expertise en quelques étapes :
- Assignation pour saisir le juge des référés ;
- Ordonnance de désignation de l’expert parmi la liste officielle des experts judiciaires ;
- Versement par le demandeur de la provision fixée par le juge ;
- Convocation des parties par l’expert à la première réunion ;
- Première réunion d’expertise (constats et orientation de l’expertise) ;
- Investigations et échanges entre les parties au fil des réunions d’expertise ;
- Dépôt du rapport par l’expert ;
- Ordonnance de fixation du coût définitif de l’expertise judiciaire.