La ZFE (Zone à Faible Emission) est un dispositif qui a été institué dans le cadre de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Cette loi permet notamment aux maires et aux présidents d’établissement public de coopération intercommunale, dans les agglomérations et les zones pour lesquelles un plan de protection est adopté, de mettre en place des zones à faibles émissions dans lesquelles le certificat est obligatoire pour circuler ou stationner. Doit t-on considérer la restriction de circulation comme une mesure de mise en œuvre de la directive ?
La question de la protection environnementale est un sujet qui demeure très préoccupante au 21eme siècle. Selon l’OCDE, le secteur des transports représente 23 % des émissions de gaz à effet de serre soit 7 milliards de tonnes de dioxyde de carbone environ. Les automobiles sont responsables de 40% de ces émissions et leur nombre continue d’augmenter. Au vu de ces statistiques, il est clair que les États prennent des décisions afin de limiter les conséquences qui sont très néfastes pour la santé publique.
C’est dans cette perspective de prise de décisions qu’une directive 2007/46 a d’abord été adoptée par le Parlement européen et le Conseil le 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités technique destinés à ces véhicules.
Cette directive a pour objectif d’instituer une procédure uniforme de réception des véhicules neufs et, par extension, en l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur, tout en visant à garantir un niveau élevé de sécurité routière assuré par l’harmonisation totale des exigences techniques concernant, notamment, la construction des véhicules.
Puis la mise en place des restrictions de circulation de véhicules polluants (la ZFE : zone à faible émission) en France.
Comme nous l’avons vu plus haut, La ZFE est un dispositif qui a été institué dans le cadre de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Cette loi permet notamment aux maires et aux présidents d’établissement public de coopération intercommunale, dans les agglomérations et les zones pour lesquelles un plan de protection est adopté, de mettre en place des zones à faibles émissions dans lesquelles un certificat prouvant la conformité aux exigences d’émissions favorable à la diminution de la pollution est obligatoire pour circuler ou stationner.
Ainsi une loi d’août 2021 est venu rendre la mise en place des ZFE obligatoire dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants avant le 31 décembre 2024.
Il est tout à fait évident d’affirmer que la mise en place de la restriction de circulation de véhicules polluants est dans une perspective de protection de l’environnent au même titre que la directive 2007/46.
Au vu de cela, l’interrogation qui se pose est de savoir, dans l’optique où la restriction de circulation de véhicules polluant (ZFE) s’inscrit dans la même politique environnementale que la directive 2007/46, doit t-on arriver à conclure que la ZFE est une mesure de mise en œuvre de la directive ?
La réponse à cette question soulève d’abord le fait de constater que cette restriction de circulation des véhicules polluants s’inscrit dans la logique de la directive en ayant toutes les deux un objectif commun celui d’une même politique environnementale (I). Mais il convient de dire qu’après analyse la ZFE ne doit pas être considérée comme une mesure de mise en œuvre de la directive en question (II).
I) La ZFE , une restriction ayant une même politique environnementale que la directive 2007/46.
La politique environnementale se définit comme un ensemble de principes généraux adoptés par une organisation privée ou publique destinés à prévenir, diminuer ou éliminer les gènes et les nuisances faites à l’environnement lors de la réalisation de projet de toute nature. Ainsi en de termes plus simples, il s’agit de l’établissement d’un certain nombre d’objectifs en faveur de l’environnement . Ces objectifs doivent permettent la diminution de la pollution de l’environnement.
Premièrement la restriction de circulation des véhicules polluants a un même objectif que la directive 2007/46. La restriction de circulation est issue de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Comme l’indique la loi elle même, il s’agit de permettre la croissance verte. L’objectif de cette directive est la diminution de la pollution.
C’est d’ailleurs ce que justifie le quatorzième paragraphe du considérant de la directive en ces termes :
« Le principal objectif de la législation concernant la réception des véhicules est de garantir que les nouveaux véhicules, composants et entités techniques mis sur le marché présentent un degré élevé de sécurité et de protection environnementale ».
De ce fait les deux dispositions se sont basées sur un certificat : un certificat qui assure la conformité aux exigences en matière d’émissions de matières polluant des véhicules. La directive conformément à son article 18 met en place un certificat de conformité qui en vertu de l’article 26 de cette même directive doit être vérifié avant que le véhicule ne soit mis sur le marché. La ZFE repose également sur le principe de Crit’Air qui si l’on peut le voir bien est considéré comme un certificat de conformité à l’image de celle de l’article 18 de la directive.
Outre cette notion de protection environnementale, la législation européenne se dresse une fois encore plus sur la même ligne que la restriction de circulation des véhicules polluant sur la question de santé publique.
Tout d’abord comme l’énonce la directive qu’elle ne se résume pas à la protection de l’environnement mais également à la santé publique : « La présente directive constitue un ensemble de prescriptions de sécurité spécifiques au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2001/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits, qui établit des prescriptions spécifiques pour la protection de la santé et de la sécurité des consommateurs ».
Ensuite, la ZFE, selon la loi d’août 2021, est obligatoire dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants , ce qui constitue une mesure justifié au regard de la santé publique car plus le nombre d’habitants est élevés dans une zone géographique , plus ils sont exposés à un risque de santé du à la pollution de l’environnement.
Si tout porte à croire que la restriction de circulation pourrait paraître comme une mesure de mise en œuvre de la directive 2007/46 , loin s’en faut car plusieurs aspects des deux réglementations divergent sur certains points cruciaux.
II ) La ZFE, une restriction autre qu’une mesure de mise en œuvre de la directive 2007/46.
Pour mieux expliquer que la restriction de circulation ( la ZFE ) ne constitue pas une mesure de mise en œuvre de la directive, il convient de rappeler le contexte du fameux arrêt de la Cour de justice de l’union européenne
La cour de justice de l’Union européenne a tranché sur un différent opposant les villes de paris , de Madrid à la commission le 13 janvier 2022 (affaires jointes C‑177/19 P à C‑179/19 P).
La Cour annule l’arrêt du Tribunal sur l’annulation partielle du règlement de la Commission fixant des valeurs d’émissions pour les essais en conditions de conduite réelles des véhicules légers neufs.
En effet dans le contexte du scandale du « Dieselgate », la Commission européenne a mis en place un règlement (règlement 2016/427 de la commission du 10 mars 2016) instituant une procédure d’essai des émissions en conditions de conduite réelles (RDE) des véhicules particuliers et utilitaires légers, réceptionnés conformément à la réglementation applicable (règlement n°715/2007 du parlement européen et du conseil du 20 juin 2007), afin de mieux refléter les émissions mesurées sur route. Les prescriptions pour les essais RDE ont, ensuite, été complétées par le règlement 2016/646 de la Commission, qui fixe des valeurs d’émissions d’oxydes d’azote à ne pas dépasser lors de ces essais (ci-après le « règlement litigieux »).
La ville de Paris, la ville de Bruxelles et l’ayuntamiento de Madrid (ci-après les « villes requérantes ») ont introduit chacun un recours tendant à l’annulation du règlement litigieux, dans la mesure où celui-ci les empêcherait d’imposer aux véhicules particuliers des restrictions de circulation au regard de leurs émissions polluantes. La Commission a soulevé des exceptions d’irrecevabilité à l’encontre des recours précités, tirées de ce que les villes requérantes n’étaient pas directement concernées par le règlement litigieux au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.
Ces recours ont néanmoins été partiellement accueillis par le Tribunal, qui a considéré que les villes requérantes étaient directement concernées par le règlement litigieux . En interprétant la directive 2007/46 , dans le contexte de laquelle s’inscrit le règlement litigieux, le Tribunal a, plus particulièrement, estimé que ce dernier doit être qualifié d’acte réglementaire ne comportant pas de mesures d’exécution qui touche directement l’exercice des compétences normatives de ces villes en matière de réglementation de la circulation automobile.
Saisie de pourvois formés par la République fédérale d’Allemagne (affaire C-177/19 P), la Hongrie (affaire C-178/19 P) et la Commission (affaire C-179/19 P), la Cour annule l’arrêt du Tribunal en précisant, dans ce cadre, la notion de « personne directement concernée » en tant que condition de recevabilité d’un recours en annulation introduit par une entité régionale d’un État membre contre un acte de l’Union européenne.
La Cour examine si l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, de la directive 2007/46, selon lequel « les États membres ne peuvent interdire, restreindre ou entraver l’immatriculation, la vente, la mise en service ou la circulation sur route des véhicules […] s’ils répondent aux exigences de la directive », empêche effectivement les villes requérantes d’exercer leurs compétences de réglementer la circulation des véhicules particuliers afin de réduire la pollution et, partant, si, eu égard à l’articulation entre cette disposition et le règlement litigieux, ces villes doivent être considérées comme étant directement concernées par ce dernier.
À ces fins, la Cour interprète la disposition en cause au regard des termes de celle-ci, du contexte dans lequel elle s’inscrit, des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie, ainsi que des éléments pertinents tirés de sa genèse. S’agissant du libellé de l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, de la directive 2007/46 et, en particulier, de l’interdiction de restreindre la « circulation sur route » de certains véhicules est prévue, la Cour précise que cette disposition ne vise pas seulement la circulation des véhicules sur le territoire d’un État membre, mais aussi d’autres activités, comme l’immatriculation, la vente et la mise en service des véhicules.
De telles restrictions impliquent une entrave générale à l’accès au marché des véhicules.
Pour ce qui est du contexte dans lequel cette disposition s’inscrit, la Cour relève que les obligations imposées aux États membres au titre de la directive 2007/46 concernent la mise sur le marché des véhicules à moteur et non leur circulation ultérieure. Elle constate, par ailleurs, que si l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, de cette directive énonce une obligation négative empêchant les États membres d’interdire, de restreindre ou d’entraver la circulation sur route des véhicules répondant aux exigences de la directive, son premier alinéa prévoit une obligation positive permettant aux États membres d’immatriculer et d’autoriser la vente et la mise en service de ces véhicules, sans mention de la circulation sur route. Ainsi, contrairement à l’interprétation retenue par le Tribunal, la portée de l’obligation négative ne peut pas être plus large que la portée de l’obligation positive, le libellé de ces deux alinéas étant complémentaire. Enfin, la Cour remarque que les villes requérantes ne disposent pas de pouvoirs en matière de réception des véhicules. Quant à l’objectif poursuivi par la directive 2007/46, celle-ci consiste en l’institution d’une procédure uniforme de réception des véhicules neufs et, par extension, en l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur, tout en visant à garantir un niveau élevé de sécurité routière assuré par l’harmonisation totale des exigences techniques concernant, notamment, la construction des véhicules.
Par ailleurs, la genèse de l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, de la directive 2007/46 révèle que l’interdiction de s’opposer à la « circulation sur route » de certains véhicules a eu pour but non pas d’élargir le champ d’application de la législation sur la réception des véhicules, mais seulement d’éviter le contournement, par les États membres, de l’interdiction de s’opposer à l’accès au marché des véhicules qui sont conformes à la réglementation applicable.
Dès lors, selon la Cour, l’interprétation du Tribunal revient à attribuer à l’article 4, paragraphe 3, second alinéa, de la directive 2007/46 une portée large afin d’appuyer la conclusion selon laquelle cette disposition fait obstacle à certaines restrictions locales en matière de circulation qui visent, notamment, à protéger l’environnement. Une telle interprétation n’est conforme ni au contexte dans lequel cette disposition s’inscrit ni aux objectifs de la réglementation dont elle fait partie ni encore à la genèse de la disposition susvisée. Par conséquent, la Cour conclut que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que le règlement litigieux concerne directement les villes requérantes, au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. En réponse à la préoccupation des villes requérantes concernant l’éventualité d’un recours en manquement à l’encontre de l’un des États membres dont elles relèvent pour violation du règlement litigieux, la Cour souligne que l’adoption d’une réglementation limitant la circulation locale de certains véhicules aux fins de protéger l’environnement n’est pas susceptible d’enfreindre l’interdiction imposée par le règlement litigieux, de sorte qu’il ne saurait avoir une incidence directe sur un éventuel recours en manquement.
Au vu du contexte et de l’explication de l’arrêt de la cour de justice de l’union européenne exposée ci dessus, il est important de souligner que les deux dispositions ne détiennent pas une application temporelle identique.
D’abord pendant que la directive cible la réception des véhicules neufs, la vente , la mise en service des pièces et équipements destinés aux véhicules réceptionnés conformément à l’article premier de la directive , la restriction de circulation de véhicules polluants communément appelé la ZFE cible des véhicules déjà en circulation.
Ce constat permettant en même temps de situer le temps d’application de ces différentes dispositions mobilise un argument pour soutenir que la restriction ne constitue pas une mesure de mise en œuvre de la directive puisque la directive permet l’harmonisation du marché européen de la réception des véhicules neufs ainsi que leurs pièces tandis que la restriction de circulation cible les véhicules déjà en circulation.
Ceci implique quant à l’application, une remarque essentielle est à relever, c’est celle du moment d’intervention des deux normes : la directive se met en œuvre avant l’achat du véhicule par l’utilisateur en se focalisant sur les importateurs et exportateurs de ces véhicules c’est pourquoi la cour de justice de l’union européenne a affirmé dans son arrêt que la directive ne fait pas obstacle à certaines restrictions locale en matière de circulation qui vise notamment à protéger environnement. On peut lire dans cette affirmation une portée de la directive s’arrêtant juste avant la mise en circulation des véhicules et que le champs est libre à tout État membre de mettre en place des restrictions en matière de circulation destinée à protéger l’environnement tant que la directive est bien respectée avant la mise en circulation du véhicule.
Quand à la ZFE elle se met en œuvre après l’achat c’est à dire lorsque les véhicules sont en circulation ce qui rentre dans la logique de l’interprétation de la portée de la directive.
En conclusion quand bien même que la restriction de circulation ne constitue pas une mesure de mise en œuvre de la directive 2007/46, il est tout à fait logique de déduire que la restriction au vu de ce qui vient d’être développé, vient en complémentarité à la directive en appuyant la politique environnementale de l’union européenne ( à travers sa directive ) par la restriction des véhicules en circulation conformément à un certains nombre d’exigences techniques d’émissions pendant que la directive se mets en œuvre avant la mise sur le marché.