1. Définitions.
1.1. Travail de nuit.
Le travail de nuit est défini comme tout travail effectué au cours d’une période d’au moins 9 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures.
La période de travail de nuit commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures [1].
Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche peut mettre en place le travail de nuit ou l’étendre à de nouvelles catégories de salariés [2].
A défaut d’accord, est considéré comme travail de nuit tout travail accompli entre 21 heures et 6 heures [3].
1.2. Travailleur de nuit.
Le salarié est considéré comme travailleur de nuit dès lors qu’il réalise [4] :
- Soit au moins 2 fois par semaine, selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de travail de nuit quotidiennes ;
- Soit au cours d’une période de référence fixée par accord, un nombre minimal d’heures de travail de nuit.
La durée quotidienne de travail accomplie par un travailleur de nuit ne peut excéder 8 heures, sauf convention ou accord collectif de travail prévoyant son dépassement pour les salariés exerçant [5] :
- Des activités caractérisées par l’éloignement entre le domicile et le lieu de travail ou entre différents lieux de travail du salarié ;
- Des activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes ;
- Des activités caractérisées par la nécessité d’assurer la continuité du service ou de la production.
Une convention ou un accord collectif de travail étendu peut fixer le nombre minimal d’heures entraînant la qualification de travailleur de nuit sur une période de référence [6].
A défaut, le nombre minimal d’heures entraînant la qualification de travailleur de nuit est fixé à 270 heures sur une période quelconque de 12 mois consécutifs [7].
Sont réputées accomplies les heures répondant à la définition des heures de nuit comprises dans l’horaire habituel du salarié, ce qui inclut les heures non effectivement travaillées en raison des congés, jours de formation, jours fériés, participation aux réunions du CSE et crédits d’heures des représentants du personnel [8].
1.3. Situations spécifiques.
Pour les activités de production rédactionnelle et industrielle de presse, de radio, de télévision, de production et d’exploitation cinématographique, de spectacles vivants et de discothèque, la période de travail de nuit est d’au moins 7 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures [9].
Pour ces activités, à défaut d’accord collectif, tout travail accompli entre minuit et 7 heures est considéré comme du travail de nuit [10].
Enfin, dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services et qui sont situés dans les zones touristiques internationales, la période de travail de nuit, si elle débute après 22 heures, est d’au moins 7 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 7 heures [11].
2. Instauration du travail de nuit.
2.1. Accord collectif ou autorisation de l’inspecteur du travail.
La mise en place du travail de nuit dans l’entreprise ou l’établissement, comme son extension à de nouvelles catégories de salariés, sont subordonnées à la conclusion préalable d’une convention ou d’un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, de branche [12].
A défaut d’accord collectif, les travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit sur autorisation de l’inspecteur du travail, après vérification des contreparties qui leur sont accordées et de l’existence de temps de pause.
L’autorisation de l’inspecteur du travail implique que l’employeur ait, préalablement à sa demande, engagé sérieusement et loyalement des négociations en vue de la conclusion d’un accord [13].
L’engagement de négociations loyales et sérieuses se caractérise par [14] :
- La convocation à la négociation des organisations syndicales représentatives dans l’entreprise ;
- La fixation du lieu et du calendrier des réunions ;
- La communication des informations nécessaires permettant de négocier en toute connaissance de cause ;
- La réponse aux éventuelles propositions des organisations syndicales.
Enfin, le médecin du travail est consulté avant toute décision importante relative à la mise en place ou à une modification de l’organisation du travail de nuit [15].
2.2. Contenu de l’accord et de la demande d’autorisation.
En cas d’accord collectif, celui-ci doit comporter [16] :
1° Les justifications du recours au travail de nuit ;
2° La définition de la période de travail de nuit ;
3° Une contrepartie sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale ;
4° Des mesures destinées à améliorer les conditions de travail des salariés ;
5° Des mesures destinées à faciliter, pour ces mêmes salariés, l’articulation de leur activité professionnelle nocturne avec leur vie personnelle et avec l’exercice de responsabilités familiales et sociales, concernant notamment les moyens de transport ;
6° Des mesures destinées à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment par l’accès à la formation ;
7° L’organisation des temps de pause.
Une convention ou un accord collectif de travail étendu peut fixer le nombre minimal d’heures entraînant la qualification de travailleur de nuit sur une période de référence [17].
En cas de demande d’autorisation, celle-ci doit justifier [18] :
- Des contraintes propres à la nature de l’activité ou au fonctionnement de l’entreprise rendant nécessaire le travail de nuit ;
- Du caractère loyal et sérieux de l’engagement préalable des négociations ;
- De l’existence de contreparties et de temps de pause, de la prise en compte des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs.
L’avis des délégués syndicaux et du CSE doit être joint à la demande.
En l’absence de délégué syndical et de CSE la demande doit être accompagnée d’un document attestant une information préalable des salariés.
La demande d’autorisation est adressée à l’inspecteur du travail dont relève l’établissement qui emploie les salariés concernés [19].
Le défaut de réponse de l’inspecteur dans les 30 jours du dépôt de la demande vaut autorisation [20].
A défaut de stipulation conventionnelle définissant la période de travail de nuit, l’inspecteur du travail peut, lorsque les caractéristiques particulières de l’activité de l’entreprise le justifient, autoriser la définition d’une période différente de celle prévue par la loi, dans le respect des dispositions suivantes [21] :
- Tout travail effectué au cours d’une période d’au moins 9 heures consécutives comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures est considéré comme du travail de nuit ;
- La période de travail de nuit commence au plus tôt à 21 heures et s’achève au plus tard à 7 heures.
Cette demande est soumise à consultation préalable des délégués syndicaux et avis du CSE.
3. Situation du travailleur de nuit.
La durée quotidienne de travail accomplie par un travailleur de nuit ne peut excéder 8 heures [22].
Par ailleurs, sa durée hebdomadaire de travail, calculée sur une période de 12 semaines consécutives, ne peut dépasser 40 heures [23].
Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut, lorsque les caractéristiques propres à l’activité d’un secteur le justifient, prévoir le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail, à condition que ce dépassement n’ait pas pour effet de porter cette durée à plus de 44 heures sur 12 semaines consécutives [24].
Le travailleur de nuit bénéficie de contreparties au titre des périodes de travail de nuit pendant lesquelles il est employé, sous forme de repos compensateur et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale [25].
Enfin, le travailleur de nuit bénéficie d’un suivi individuel régulier de son état de santé [26].
4. Changement de poste.
Le travailleur de nuit qui souhaite occuper ou reprendre un poste de jour et le salarié occupant un poste de jour qui souhaite occuper ou reprendre un poste de nuit dans le même établissement ou, à défaut, dans la même entreprise ont priorité pour l’attribution d’un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d’un emploi équivalent.
L’employeur porte à la connaissance de ces salariés la liste des emplois disponibles correspondants [27].
Lorsque le travail de nuit est incompatible avec des obligations familiales impérieuses, notamment la garde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante, le salarié peut demander son affectation sur un poste de jour ou refuser un travail de nuit sans que ce refus constitue une faute ou un motif de licenciement [28].
Il importe peu que le contrat de travail, reprenant les dispositions de la convention collective, stipule que le salarié accepte indistinctement de travailler de jours comme de nuit.
A titre d’exemple, le refus du salarié, père de deux enfants de 4 et 11 ans et dont l’épouse travaille loin du domicile familial, de passer d’un horaire de jour à un horaire de nuit en raison d’impératifs familiaux ne constitue pas un motif de licenciement [29].
Lorsque son état de santé constaté par le médecin du travail l’exige, le travailleur de nuit est affecté à titre temporaire ou définitif sur un poste de jour correspondant à sa qualification et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé.
L’employeur ne peut pas rompre le contrat pour inaptitude au poste, sauf à justifier par écrit de l’impossibilité dans laquelle il se trouve de proposer au salarié un tel poste ou de son refus d’accepter le poste proposé dans les mêmes conditions [30].
5. Sanctions.
La méconnaissance des dispositions relatives au travail de nuit est punie de l’amende prévue pour les contraventions de 5ᵉ classe, prononcée autant de fois qu’il y a de salariés concernés par l’infraction [31].
En cas de poursuite unique pour plusieurs infractions et en l’absence de récidive, l’amende est appliquée autant de fois qu’il y a de personnes employées dans des conditions contraires aux prescriptions légales.
En cas de récidive, l’amende est appliquée autant de fois qu’il a été relevé de nouvelles infractions [32].