L’utilisation illégale de la reconnaissance faciale par les forces de l’ordre en France : enjeux et perspectives.

Par Myriam Driouch, Avocat.

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Explorer : # reconnaissance faciale # données personnelles # surveillance # droits fondamentaux

Ce que vous allez lire ici :

La reconnaissance faciale en France est strictement régulée pour préserver les droits fondamentaux. Malgré cela, l’affaire BriefCam révèle une utilisation illégale par les forces de l’ordre, entraînant des violations des droits à la vie privée et à la protection des données. Un contrôle renforcé est essentiel pour éviter des abus.
Description rédigée par l'IA du Village

L’utilisation des technologies de reconnaissance faciale par les forces de l’ordre est un sujet qui suscite de nombreuses inquiétudes en matière de libertés fondamentales. Récemment, un rapport d’octobre 2024 [1] passé inaperçu a révélé que la police et la gendarmerie françaises avaient eu recours au logiciel BriefCam, un outil doté d’une fonctionnalité de reconnaissance faciale pourtant interdite en France. Cette révélation pose plusieurs questions : comment une telle pratique a-t-elle pu avoir lieu malgré l’encadrement strict des technologies de surveillance en France ? Quels sont les risques pour les citoyens et les justiciables ? Et surtout, comment encadrer ces outils pour qu’ils servent réellement la justice sans menacer nos libertés individuelles ?

A travers cet article, nous allons analyser le cadre juridique français relatif à la reconnaissance faciale, revenir sur les faits révélés par ce rapport, étudier les risques associés à l’usage incontrôlé de ces technologies et proposer des pistes de réflexion sur un éventuel encadrement plus strict.

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1. Le cadre juridique de la reconnaissance faciale en France.

1.1. Une technologie sous haute surveillance.

En France, l’utilisation de la reconnaissance faciale par les autorités est strictement encadrée par plusieurs textes nationaux et européens. La principale référence en la matière est le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), qui impose des règles strictes sur le traitement des données biométriques. À cela s’ajoute la Loi Informatique et Libertés, qui interdit en principe l’usage de la reconnaissance faciale sauf exceptions prévues par la loi.

En matière de sécurité publique, le cadre juridique français prévoit que les dispositifs de vidéosurveillance peuvent être utilisés par les forces de l’ordre, mais uniquement à des fins de visionnage et d’analyse des flux vidéo. L’identification biométrique en temps réel, comme la reconnaissance faciale, est en revanche interdite.

1.2. Des exceptions limitées et contrôlées.

Certains dispositifs utilisant la reconnaissance faciale ont toutefois été autorisés de manière encadrée. On peut citer par exemple :

  • Le fichier TAJ (Traitement des antécédents judiciaires), qui permet une recherche faciale à partir d’une image, mais uniquement dans un cadre judiciaire et sous conditions strictes ;
  • L’usage dans les aéroports et lors de contrôles aux frontières, où des systèmes comme Parafe permettent une identification rapide des passagers.
    Toute utilisation non prévue par ces exceptions est donc en violation de la loi.

2. L’affaire BriefCam : une utilisation illégale par les forces de l’ordre.

2.1. Les faits révélés par le rapport.

Un rapport publié en octobre 2024 a mis en lumière une utilisation illégale de la reconnaissance faciale par la police et la gendarmerie françaises. Selon ce document, les forces de l’ordre ont eu recours au logiciel BriefCam, un outil permettant l’analyse rapide de flux vidéo, notamment par reconnaissance faciale.
Le problème majeur réside dans le fait que cette technologie a été utilisée sans aucun cadre légal. Les autorités françaises avaient officiellement interdit cette fonctionnalité, mais les enquêteurs ont découvert que BriefCam avait tout de même été utilisé, notamment lors des émeutes de l’été 2023.
Le rapport précise que cet usage n’a conduit à aucune interpellation, ce qui souligne l’inefficacité de la technologie dans ce contexte. En outre, il met en lumière des dysfonctionnements administratifs dans l’acquisition du logiciel et un manque de contrôle sur son usage.

2.2. Une violation manifeste des droits fondamentaux.

L’usage de la reconnaissance faciale en dehors du cadre légal constitue une violation des droits fondamentaux, notamment :

  • Le droit au respect de la vie privée (article 8 de la CEDH) ;
  • La protection des données personnelles (RGPD et CNIL) ;
  • Le droit à un procès équitable, puisque l’identification erronée d’un individu peut conduire à des poursuites injustifiées.

Ces atteintes sont d’autant plus graves que la reconnaissance faciale est une technologie qui n’est pas infaillible. Plusieurs études ont montré qu’elle produit un taux d’erreur élevé, en particulier sur les personnes issues de minorités ethniques, ce qui peut conduire à des arrestations abusives.

3. Les risques liés à la reconnaissance faciale dans le cadre policier.

3.1. Une technologie aux nombreuses dérives potentielles.

Si la reconnaissance faciale était autorisée pour les forces de l’ordre, cela pourrait ouvrir la porte à de nombreux abus :

  • Surveillance de masse : une utilisation non encadrée pourrait transformer les villes en espaces de surveillance permanente, à l’image de la Chine ;
  • Arrestations arbitraires : les erreurs de reconnaissance pourraient entraîner des interpellations injustifiées ;
  • Atteintes aux libertés individuelles : les citoyens seraient constamment filmés et analysés, ce qui créerait un climat de méfiance permanent.

3.2. Un débat éthique et juridique encore en construction.

Le Conseil d’État et la CNIL ont déjà émis plusieurs mises en garde sur ces dérives. En 2021, la CNIL avait rappelé que la reconnaissance faciale ne pouvait être utilisée par la police que dans un cadre strictement défini, ce qui n’a manifestement pas été respecté dans l’affaire BriefCam.

Le débat n’est pas uniquement français. À l’échelle européenne, des discussions sont en cours pour interdire définitivement la reconnaissance faciale en temps réel dans l’espace public, tant les risques de dérives sont grands.

4. Comment encadrer ces technologies pour éviter les abus ?

4.1. Un contrôle renforcé des outils de surveillance.

L’affaire BriefCam met en évidence une faille dans le contrôle des outils de surveillance utilisés par la police. Il est impératif de mettre en place des mécanismes de supervision plus stricts, par exemple :

  • Une obligation de transparence sur les logiciels utilisés par les forces de l’ordre ;
  • Un contrôle renforcé par des autorités indépendantes comme la CNIL ;
  • Un suivi parlementaire régulier pour évaluer les risques.

4.2. Une réflexion sur le rôle de la reconnaissance faciale dans la justice.

Si certaines formes de reconnaissance faciale peuvent être utiles dans le cadre judiciaire (ex : identification d’un suspect après un crime), il faut s’assurer que ces outils ne deviennent pas un moyen de surveillance généralisée.

Une piste de réflexion serait d’instaurer un cadre légal strict, inspiré du modèle européen, qui interdirait :

  • Toute reconnaissance faciale en temps réel dans l’espace public ;
  • L’utilisation de ces technologies sans contrôle judiciaire préalable ;
  • L’accès non encadré des forces de l’ordre aux bases de données biométriques

Conclusion.

L’affaire BriefCam est révélatrice d’un problème plus large : l’absence de contrôle sur les nouvelles technologies de surveillance. Alors que la reconnaissance faciale se généralise dans le monde entier, il est crucial que la France ne cède pas à la tentation d’un État policier numérique où chaque citoyen serait potentiellement surveillé en permanence.

L’encadrement de ces outils est donc une nécessité absolue. Il appartient au législateur, aux magistrats et aux avocats de s’emparer de ce sujet pour garantir un équilibre entre sécurité et libertés fondamentales. La reconnaissance faciale ne doit pas devenir une menace pour l’État de droit, mais un outil utilisé avec parcimonie et uniquement dans le respect du cadre légal.

Si la police souhaite moderniser ses outils, elle doit le faire dans la transparence et la légalité, sans jamais mettre en péril les principes démocratiques qui fondent notre société.

Myriam Driouch
Avocat au Barreau de la Seine-Saint-Denis
avocat.myriam.driouch chez gmail.com
www.myriam-driouch-avocat.fr

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