Conclure un accord collectif dans les entreprises de moins de 50 salariés : quelles sont les possibilités ?

Par Guillaume Dedieu, Avocat.

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Explorer : # accord collectif # entreprises de moins de 50 salariés # délégués du personnel # négociation d'entreprise

Les organisations syndicales représentatives, par l’intermédiaire de leurs délégués syndicaux, bénéficient de la primauté en matière de négociation collective et de signature des accords collectifs.

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Or, les entreprises de moins de 50 salariés ne disposent généralement pas, au sein de leur effectif, de délégués syndicaux et donc d’organisations syndicales représentatives (le seuil de 50 salariés étant l’une condition à la désignation d’un délégué syndical).

Ces mêmes entreprises ont pourtant besoin, dans leur gestion, de mettre en place des dispositifs d’organisation du travail ne pouvant résulter que d’un accord collectif (accord d’intéressement, accord contrat de génération, accord de variation des horaires de travail…).

Comment procéder dans cette situation ?

Première hypothèse : l’entreprise est dotée de délégués du personnel

Il convient tout d’abord de rappeler que dans les établissements qui emploient moins de cinquante salariés, les syndicats représentatifs dans l’établissement peuvent désigner, pour la durée de son mandat, un délégué du personnel comme délégué syndical. Le délégué du personnel désigné bénéficiera alors des attributions d’un délégué syndical. En conséquence, il est habilité à représenter une organisation syndicale au cours des négociations et à conclure un accord en leur nom. Il s’agit ici d’une première solution pour conclure valablement un accord collectif.

Ensuite, l’article L.2232-21 du Code du travail vient prévoir qu’en l’absence de délégué du personnel désigné comme délégué syndical dans les entreprises de moins de 50 salariés, ces mêmes délégués du personnel (ou représentant élus au comité d’entreprise dans le cas d’une mise en place volontaire) « peuvent négocier et conclure des accords collectifs de travail ».

Plusieurs conditions doivent toutefois être remplies pour que les délégués du personnel (non-désignés délégués syndicaux) puissent valablement conclure un accord collectif :

  • L’accord doit porter sur des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif. Peuvent ainsi être conclus des accords portant sur l’intéressement, l’aménagement de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine, les conventions de forfait en jours, la protection sociale complémentaire… Sont expressément exclus les accords de méthode en vue d’une procédure de grand licenciement collectif pour motif économique.
  • La négociation doit impérativement être précédée d’une information par l’employeur des organisations syndicales représentatives dans la branche dont relève l’entreprise. Ces organisations sont celles figurant sur la liste fixée par arrêté du Ministre du travail, dans la branche professionnelle concernée
  • Une fois l’accord conclu avec un ou plusieurs délégués du personnel, celui-ci doit être transmis à la commission paritaire de la branche professionnelle dont relève l’entreprise. Cette commission paritaire peut s’opposer à la validité de l’accord dans un délai de 4 mois. A défaut d’opposition ou de réponse dans le délai de 4 mois, l’accord est réputé avoir été validé.

Deuxième hypothèse : l’entreprise n’est pas dotée de délégués du personnel.

Sont ici visées les entreprises dépourvues de délégué syndical et tenues d’organiser des élections professionnelles, ces dernières ayant donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal de carence.

Dans cette hypothèse, un accord d’entreprise peut être négocié et conclu par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche [1].

Pour conclure valablement un accord, plusieurs conditions doivent également être respectées :

  • L’employeur doit informer les organisations syndicales représentatives dans la branche de son souhait d’engager des négociations avec des salariés mandatés.
  • L’accord envisagé doit porter sur des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif [2].
  • Au moins une organisation syndicale représentative dans la branche doit avoir mandaté un salarié de l’entreprise, une même organisation syndicale ne pouvant mandater qu’un seul salarié. Le salarié choisi doit être indépendant de l’employeur.
  • L’accord signé par un salarié mandaté doit enfin être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans des conditions déterminées par décret (non-paru à ce jour) et dans le respect des principes généraux du droit électoral. Il s’agira donc pour l’employeur d’organiser un vote portant sur l’approbation ou non de l’accord conclu avec le salarié mandaté. La sincérité et la régularité du vote devront être garanties, et le résultat constaté par un procès-verbal affiché dans l’entreprise.

Troisième hypothèse : la spécificité des accords d’intéressement

Outre la conclusion d’un accord avec un délégué du personnel (cf. 1ère hypothèse) ou, en cas de carence aux élections professionnelles, par un salarié mandaté (cf. 2ème hypothèse), un dispositif d’intéressement peut également être valablement mis en place à la suite d’une ratification à la majorité des deux tiers du personnel d’un projet d’accord présenté par l’employeur [3].

A la différence de la deuxième hypothèse, aucun procès-verbal de carence ne doit être établi. Il n’y a donc pas en soi de condition d’effectif pour mettre en place un accord d’intéressement par ratification.

Concrètement, il s’agira pour l’employeur de proposer un projet d’accord d’intéressement à ses salariés. Ce projet doit être soumis à la ratification de l’ensemble des salariés. Il sera adopté à la majorité des 2/3 des salariés. Cette consultation des salariés devra être formalisée :

  • Soit par émargement des salariés signataires sur une liste nominative figurant sur le texte ou sur un document annexe.
  • Soit par procès-verbal rendant compte de la consultation des salariés sur le projet d’accord

Ce constat devra être transmis à la DIRECCTE, simultanément au dépôt de l’accord d’intéressement.

Guillaume DEDIEU - Ellipse Avocats

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Notes de l'article:

[1article L.2232-24 du code du travail

[2cf. supra pour l’analyse des mesures concernées

[3article L.3312-5 du Code du travail

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