Nouvelles précisions en matière d’articulation entre affichage du permis de construire et recevabilité du recours formé à son encontre.

Par Antoine Louche, Avocat.

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Explorer : # permis de construire # recours gracieux # notification de recours # sécurité juridique

Il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 424-15 et R. 600-1 du Code de l’urbanisme que l’irrecevabilité tirée de l’absence d’accomplissement des formalités de notification prescrites par l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme ne peut être opposée, en première instance, en appel ou en cassation, qu’à la condition, prévue à l’article R. 424-15 du même Code, que l’obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l’affichage du permis de construire.

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En l’espèce, le maire de Rians avait tacitement accordé un permis de construire modificatif en vue de la réalisation d’un abri de piscine et une clôture de mise en sécurité du bassin.

Des tiers intéressés au projet ont formé un recours gracieux à l’encontre de cette décision.
Le Maire de Rians a rejeté ce recours par décision en date du 29 décembre 2008.

Ces derniers ont alors formé un recours en annulation à l’encontre de cet arrêté et de la décision de rejet prise sur recours gracieux.

Par ordonnance en date du 7 avril 2011, le Président du Tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Les intéressés ont alors interjeté appel de ce jugement, qui a été confirmé par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille en date du 18 avril 2013.

La Cour marseillaise a rejeté cet appel comme étant irrecevable en application des dispositions de l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme.

Un pourvoi en cassation a alors été formé par ces derniers.

Au visa des articles R. 424-15 et R. 600-1 du Code de l’urbanisme, le Conseil d’Etat a apporté de nouvelles précisions en matière de notification de recours à l’encontre d’une autorisation de construire.

Les juges du Palais Royal ont ainsi indiqué qu’il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 424-15 et R. 600-1 du Code de l’urbanisme que l’irrecevabilité tirée de l’absence d’accomplissement des formalités de notification prescrites par l’article R. 600-1 du Code de l’urbanisme ne peut être opposée, en première instance, en appel ou en cassation, qu’à la condition, prévue à l’article R. 424-15 du même Code, que l’obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l’affichage du permis de construire.

Rappelons que la charge de la preuve de la date d’affichage d’une autorisation de construire pèse sur son bénéficiaire [1].
De même, le pétitionnaire doit également démontrer que l’ensemble des mentions obligatoire a été affiché [2]

La jurisprudence a également considéré qu’une requête n’était pas tardive lorsqu’aucun élément ne permettait d’établir la date de l’affichage de l’autorisation de construire contestée [3].

Il en est de même lorsqu’il existe un doute sur la continuité de l’affichage durant toute la durée des travaux [4].

Ainsi, c’est dans la continuité directe de ces jurisprudences que la Haute Assemblée a considéré que l’on ne saurait opposé les dispositions de l’article R. 600-1 à un tiers qui conteste une autorisation de construire si ce dernier n’a pas été informé du contenu et des incidences, notamment en termes de recevabilité des recours qu’il pourrait engager, de ces dernières dispositions.

Soulignons également que le Conseil d’Etat avait récemment pu indiquer en cette matière que les dispositions de l’article R. 600-1 ont notamment pour finalité d’assurer une meilleure sécurité juridique des bénéficiaires d’autorisation d’urbanisme, ainsi, lorsqu‘un permis valant division parcellaire est délivré à plusieurs bénéficiaires, la notification imposait par ces dispositions doit être effectuée à l’égard de chacun de ces bénéficiaires.

De même, ces dernières dispositions font également obligation à l’auteur d’un recours contentieux de notifier une copie du texte intégral de son recours à l’auteur ainsi qu’au bénéficiaire du permis attaqué. Si le destinataire de cette notification soutient que cette notification était incomplète, ou la requête portant sur un recours dirigé contre un autre acte, il lui appartient d’établir cette allégation en faisant état des diligences qu’il aurait vainement accomplies auprès de l’expéditeur pour obtenir copie de cette requête ou par tout autre moyen [5].

Cette jurisprudence s’inscrit également tout logiquement dans celle relative à la mention des voies et délais de recours dans une décision administrative.

Il ne saurait être opposé une tardiveté à un requérant si ce dernier n’a pas été préalable informé des délais qu’il avait pour contester cette décision et cela conformément aux dispositions de l’article R. 421-5 du Code de justice administrative [6].

Faisant application du principe qu’il venait de dégager, la Haute Assemblée a censuré pour erreur de droit l’arrêt attaqué de la Cour administrative d’appel de Marseille.

En effet, les juges d’appel marseillais avaient considéré à tort que l’obligation de notifier aux intimés une requête d’appel dirigée contre un jugement rejetant une demande d’annulation d’un permis de construire s’impose à peine d’irrecevabilité de cette requête alors même que le permis litigieux n’a pas été affiché sur le terrain.

Le Conseil a renvoyé l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Marseille.

Références : CE, 28 mai 2014, n°369456 ; CE, 20 juin 1997, Esnavant, n°136743 ; CE, 25 mars 1994, Lang, n°106839 ; CE, 22 juin 1992, Cordier, n°93253 ; CE, 15 mai 1995, Commune de Brain-sur-Authon, n°132185 ; CE, 25 janvier 1989, SCI Les prés, n°58935 ; CE, 5 mars 2014, Association SOS Paris, n°369996 ; CE, 5 mars 2014, Association ALMCV La Crau, n°370552 ; CAA Douai, 4 février 2014, n°13DA00065

Antoine Louche,
Avocat associé chez Altius Avocats
www.altiusavocats.fr

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Notes de l'article:

[1voir notamment en ce sens CE, 20 juin 1997, Esnavant, n°136743

[2voir notamment en ce sens CE, 25 mars 1994, Lang, n°106839

[3voir notamment en ce sens CE, 22 juin 1992, Cordier, n°93253 ; CE, 15 mai 1995, Commune de Brain-sur-Authon, n°132185

[4voir notamment en ce sens CE, 25 janvier 1989, SCI Les prés, n°58935

[5CE, 5 mars 2014, Association SOS Paris, n°369996 ; CE, 5 mars 2014, Association ALMCV La Crau, n°370552

[6voir notamment en ce sens pour un exemple récent CAA Douai, 4 février 2014, n°13DA00065

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