Des infos… Des infos…
Il est d’abord utile de connaître à l’avance la pratique de votre entreprise : utilise-t-elle souvent, peu ou pas du tout la rupture conventionnelle ? Existe-t-il une « procédure » en la matière en interne ? Pouvez-vous avoir accès à des « précédents », c’est-à-dire à des cas de ruptures conventionnelles intervenues dans le passé récent -selon les témoignages d’anciens salariés, par exemple ? Ou accès à une fourchette de montants de l’indemnité conventionnelle négociée dans des dossiers passés ? Quels autres avantages ont été accordés aux salariés partants (une formation, un outplacement, une indemnité majorée…) ? Si vous avez un projet de création d’entreprise, une synergie a-t-elle été possible dans le passé entre un ex-salarié et votre employeur (contrat de prestations de services) ?
Ces recherches préliminaires vont nécessairement orienter votre approche. Les représentants du personnel peuvent vous communiquer de précieuses informations en amont, aussi n’hésitez-pas à les contacter.
Un accord avant tout
Voilà ce qu’est la rupture conventionnelle. Il vous faut donc faire adhérer votre employeur à votre projet de départ.
Recherchez objectivement tous les intérêts possibles à votre départ du point de vue de l’entreprise.
A titre préparatoire, listez (pour vous) les raisons pour lesquelles vous voulez partir : tous vos motifs d’insatisfaction, toutes vos raisons professionnelles ou personnelles. En regard, notez en quoi cela impacte les résultats ou la situation du point de vue de l’entreprise.
Le contexte économique ou le carnet de commandes peuvent venir à votre rescousse : l’activité est dans « le creux de la vague » et vous proposez à votre employeur de faire des économies sur la masse salariale !
Le climat social peut aussi être un argument. S’il est bon, votre proposition vise à le maintenir ainsi en négociant un départ rapide et indolore. S’il va plus mal, vous tentez d’éviter qu’il empire…
Soyez persuasifs ! Il faut amener votre employeur à conclure que l’entreprise se portera mieux si vous la quittez. Projections chiffrées, étude d’impact seront les bienvenues !
Mais votre position juridique doit être en même temps au-dessus de tout motif de licenciement utilisable contre vous.
Au besoin, faîtes comprendre à votre employeur que la situation est dans l’impasse, pour l’entreprise comme pour vous et que seul un accord permettra d’en sortir de façon constructive car ni votre démission ni un licenciement de sa part ne sont envisageables.
Sur quoi lâcher du lest dans votre négociation ?
Proposez à votre employeur des avantages sérieux pour l’entreprise à opter pour une rupture conventionnelle, des avantages issus du fait que vous êtes en « négociation » dans un cadre juridique souple.
Le facteur temps.
Par exemple, vous proposerez de participer au recrutement ou à la formation du salarié qui vous succèdera. Vous accepterez une date de départ qui permettra l’arrivée ou la formation de votre successeur.
L’aspect financier.
Vous accepterez un rabais sur vos prétentions financières (sur le montant de l’indemnité de rupture) dans la limite du montant plancher fixé par la loi :
1) l’indemnité conventionnelle de licenciement -prévue par votre convention collective-
2) ou, à défaut de convention collective applicable, à l’indemnité légale de licenciement (1/5 e de mois de salaire brut par année d’ancienneté, augmenté de 2/15e de mois de salaire brut par année au-delà de dix ans d’ancienneté).
Un argument supplémentaire : la sécurité juridique
Un accord gagnant - gagnant sera de nature à éviter tout contentieux prud’homal.
Mais aussi, le sérieux que vous mettrez à négocier en tenant compte de l’intérêt de l’entreprise.
Par exemple, aborder la négociation assisté par un avocat, votre employeur ayant aussi le sien, peut sécuriser tant la procédure que le contenu de votre accord de rupture.
Toutefois, vous, salarié, ne pouvez renoncer par avance dans la convention de rupture conventionnelle à tout recours en justice contre votre ex-employeur. C’est ce que la Cour de Cassation vient de juger, le 26 juin 2013 (n° 12-15208).
Dans cette décision, la Cour a jugé pour la première fois qu’il est illégal de prévoir par une clause de l’accord de rupture conventionnelle que « les parties renoncent irrévocablement à toutes autres actions ou prétentions de quelque nature qui résulteraient de l’exécution ou de la cessation du contrat de travail. »
La clause est réputée « non écrite ». La rupture conventionnelle demeure cependant valable pour toutes ses autres clauses.
Ce type de clause, si votre entreprise le souhaite, devra trouver sa place dans un accord ultérieur à la date de rupture conventionnelle : un protocole transactionnel sera établi entre vous et votre ex-employeur lorsque la rupture sera définitive.
Il en coûtera, cependant, à votre ex-employeur : il achètera la paix judiciaire contre le versement nécessaire entre vos mains d’une indemnité transactionnelle qui sera la contrepartie de votre abandon de toute possibilité de recours en justice.