L'âge des migrants : un enjeu de justice et de protection. Par Yassine Yakouti, Avocat.

L’âge des migrants : un enjeu de justice et de protection.

Par Yassine Yakouti, Avocat.

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Explorer : # détermination de l'âge # mineurs non accompagnés # méthodes de vérification # droits des migrants

Le rapport de l’Institut des Études et de la Recherche sur le Droit et la Justice (IERDJ) intitulé “L’âge des migrants : un enjeu de justice et de protection”, analyse les problématiques juridiques et sociales liées à la détermination de l’âge des personnes migrantes, notamment celles qui se présentent comme mineures non accompagnées (MNA).
Il s’agit d’un sujet sensible et complexe, qui met en jeu les droits fondamentaux des migrants, les obligations des États et les capacités des acteurs de terrain. Le rapport propose une approche pluridisciplinaire et comparative, qui croise les regards de juristes, de sociologues, de psychologues, de médecins et de travailleurs sociaux.
Il s’appuie sur des données empiriques recueillies dans six pays européens (France, Belgique, Espagne, Italie, Royaume-Uni et Suède) et sur des entretiens avec des professionnels et des migrants.

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Les enjeux de la détermination de l’âge des migrants.

La détermination de l’âge des migrants est un enjeu majeur, car elle conditionne l’accès à des droits et à des protections spécifiques, notamment pour les Mineurs Non Accompagnés (MNA), qui relèvent du régime de l’enfance en danger et bénéficient d’une prise en charge éducative et sanitaire.
En revanche, les migrants majeurs sont soumis au régime du droit des étrangers et sont exposés à des mesures d’éloignement. La détermination de l’âge des migrants est également un enjeu de gestion des flux migratoires, car elle influe sur la répartition des responsabilités entre les États membres de l’Union européenne (UE) et sur les capacités d’accueil des structures locales.

Les difficultés de la détermination de l’âge des migrants.

La détermination de l’âge des migrants est confrontée à de nombreuses difficultés, qui tiennent à la diversité des situations individuelles, à la variabilité des critères juridiques et à la fiabilité des méthodes utilisées.

Le rapport souligne que :
Les migrants peuvent avoir des raisons de dissimuler ou de surestimer leur âge, pour échapper à des persécutions, pour rejoindre des proches, pour bénéficier de meilleures conditions d’accueil ou pour éviter des poursuites pénales.
Les documents d’identité des migrants peuvent être absents, falsifiés, contestés ou ignorés par les autorités, qui privilégient souvent leur appréciation subjective de l’apparence physique ou du comportement des migrants.
Les procédures de détermination de l’âge des migrants sont hétérogènes et variables selon les pays, les territoires, les juridictions et les acteurs impliqués. Elles peuvent être administratives, judiciaires, médicales ou sociales, et faire intervenir des services de l’État, des collectivités territoriales, des associations ou des organismes internationaux.
Les méthodes de détermination de l’âge des migrants sont imprécises et contestables, notamment les examens médicaux (radiographies, tests osseux, dentaires ou génitaux), qui présentent des marges d’erreur importantes, qui ne tiennent pas compte des facteurs environnementaux, culturels ou individuels, et qui posent des problèmes éthiques et déontologiques.

Les conséquences de la détermination de l’âge des migrants.

La détermination de l’âge des migrants a des conséquences significatives sur leur parcours migratoire, leur intégration sociale et leur bien-être psychologique.

Le rapport montre que :

  • Les migrants sont soumis à des processus de détermination de l’âge longs, complexes, incertains et répétitifs, qui génèrent du stress, de l’angoisse, de la frustration et de la méfiance. Ils sont confrontés à des situations de rupture, de précarité, de violence et de discrimination, qui affectent leur santé, leur scolarité, leur formation et leur insertion professionnelle.
  • Les migrants sont victimes d’une remise en cause de leur identité, de leur histoire, de leur parole et de leur crédibilité, qui entraîne une perte de confiance, une dévalorisation, une culpabilisation et une stigmatisation. Ils sont amenés à se conformer à des normes, des attentes et des représentations sociales, qui peuvent être en décalage avec leur vécu, leur culture et leur projet de vie.
  • Les migrants sont confrontés à des paradoxes, des incohérences et des contradictions, qui créent des tensions, des conflits et des dilemmes. Ils doivent jongler entre plusieurs statuts, plusieurs rôles, plusieurs références et plusieurs temporalités, qui peuvent être incompatibles ou inconciliables.

Les recommandations du rapport de l’Institut des Études et de la Recherche sur le Droit et la Justice.

Le rapport formule des recommandations pour améliorer la détermination de l’âge des migrants, dans le respect de leurs droits et de leur intérêt supérieur.
Il préconise notamment de :

  • Renforcer la coopération et la coordination entre les acteurs nationaux, européens et internationaux, pour harmoniser les critères, les procédures et les méthodes de détermination de l’âge des migrants, et pour favoriser le partage d’informations, d’expériences et de bonnes pratiques.
  • Privilégier une approche globale et pluridisciplinaire de la détermination de l’âge des migrants, qui prenne en compte les dimensions juridiques, sociales, médicales, psychologiques et culturelles, et qui associe les migrants, les professionnels et les experts.
  • Limiter le recours aux examens médicaux de détermination de l’âge des migrants, qui doivent être considérés comme des mesures exceptionnelles, subsidiaires et ultimes, et qui doivent être réalisés avec le consentement éclairé des migrants, dans le respect de leur dignité, de leur intimité et de leur intégrité physique.
  • Développer des alternatives aux examens médicaux de détermination de l’âge des migrants, qui reposent sur des méthodes plus fiables, plus respectueuses et plus participatives, telles que les entretiens psychosociaux, les évaluations éducatives, les tests cognitifs ou les analyses documentaires.
  • Appliquer le principe de présomption de minorité et le bénéfice du doute aux migrants dont l’âge est incertain, et leur garantir l’accès aux droits et aux protections qui leur sont dus, en attendant que leur situation soit clarifiée.

Accéder au rapport de l’Institut des Études et de la Recherche sur le Droit et la Justice ici.

Yassine Yakouti
Avocat au Barreau de Paris

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