Les motivations à l’origine de la création de l’association.
L’association "Intérêt à agir" [1] a été co-créée en décembre 2020 par les avocats Éléonore Delatouche-Biotteau et Sébastien Mabile.
Ces derniers se sont rencontrés lors du procès historique de l’Erika en 2007 à la suite duquel, la loi reconquête de la biodiversité a inscrit au Code civil l’existence d’un préjudice écologique. Cette loi a également ouvert le droit à des réparations pour les préjudices causés à l’environnement, mais l’application de ce droit reste floue, et pas toujours efficace, aussi ces deux avocats ont décidé de créer l’association pour poursuivre le combat.
De façon plus générale, leur volonté est de mieux défendre l’intérêt général et les biens communs tels que l’eau, la nature, la dignité humaine... Ainsi, les actions de l’association ne se cantonnent-elles pas à l’application du droit en matière de protection de l’environnement, mais également en matière d’économie responsable, de précarité et de migrations du fait du changement climatique.
Depuis sa création, l’association a initié 18 contentieux, accompagné 42 associations, 4 collectivités territoriales et a fourni près de 10 000 heures d’expertise.
Les objectifs de l’association.
Ses objectifs sont de faire appliquer le droit, de le faire évoluer lorsqu’il n’est pas suffisamment juste ou qu’il est inadapté et donner des moyens d’action et juridiques puissants aux associations, ONG qui n’en ont pas toujours les ressources (juridiques et/ou financières).
Comme le précise Éléonore Delatouche-Biotteau : « L’association est en quelque sorte un prestataire de service pour les ONG, associations et entités porteuses d’un contentieux d’intérêt général ».
À notre question, l’association peut-elle être qualifiée de think tank ou d’association lobbyiste, l’avocate répond ceci : « L’association n’est pas un think tank, car elle est dans l’action. Et, elle ne fait pas de lobbying, car ne produit pas de plaidoyer. Par contre, son action judiciaire au service des associations bénéficiaires peut contribuer à transformer les plaidoyers de ces dernières en règles de droit ».
Son fonctionnement et ses membres.
Actuellement, l’association est composée de 50 juristes, à savoir des avocats et des universitaires en Droit. L’ensemble de ces professionnels du droit s’entraident et comme le dit Maître Delatouche-Biotteau : « ils génèrent une intelligence collective autour de cette belle matière qu’est le droit ».
Ils contribuent en fonction des compétences propres à chacune des professions, ainsi, les avocats plaident et les universitaires apportent leurs savoirs dans la construction des dossiers.
Les membres œuvrent la plupart du temps de façon bénévole, ils reçoivent parfois une indemnisation lorsqu’une action judiciaire à générer des "gains" suffisants.
Les heures de travail réelles sont déclarées en bénévolat.
L’association est organisée autour de quatre grandes commissions :
- La commission environnement : elle crée et soutient des actions juridictionnelles pour obtenir réparations des préjudices causés à l’environnement ;
- la commission économie responsable : elle renforce la défense des ressources indispensables à l’épanouissement de chacun et de chaque écosystème ;
- la commission précarité : elle fait progresser les causes sociétales, notamment pour l’inclusion des personnes précaires ou pour l’effectivité des droits des handicapés, grâce à la mise en demeure ou la mise sous astreinte pour faire respecter les textes en vigueur ;
- la commission migration : elle déploie son expertise en matière de changement climatique et de ses conséquences, notamment en ce qui concerne les migrations qui en découlent, insuffisamment prises en compte par les autorités publiques.
L’association propose également des formations juridiques à destination du personnel de structures associatives et/ou engagées dans le travail social et médico-social [2].
Ces formations payantes et les dons faits à l’association permettent à cette dernière d’être indépendante financièrement.
Comment se fait la sélection des enjeux stratégiques à défendre ?
Pour que l’association entre en action, deux possibilités :
- soit elle est saisie par une association, une ONG pour intervenir dans un dossier (et dans ce cas, un conseil scientifique se réunit pour valider ou non l’intérêt stratégique de suivre ce contentieux) ;
- soit les membres de l’association ont repéré un contentieux stratégique arrivé à maturation soutenu par une association ou une ONG ayant un intérêt à agir dans le cadre de ce contentieux et propose à cette dernière une aide juridique et la prise en charge du dossier devant la juridiction.
Les critères de sélection des contentieux dits "stratégiques" :
- Universalité du dossier : droits humains et/ou environnemental ;
- Disproportion des forces en présence ;
- Effectivité de la règle de droit ;
- Enjeu de transformation réglementaire ;
- Éligibilité au mécénat de l’entité porteuse de l’affaire.
Quelques exemples de dossiers soutenus par l’association Intérêt à agir :
- L’affaire « Oiseaux », avec la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) ;
- L’affaire « Eau en Guadeloupe », avec l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages et du Patrimoine Naturel (ASPAS) ;
- L’affaire « Magnolia », expertise en soutien d’une intervention volontaire du Groupe National de Surveillance des Arbres (GNSA) et de Notre Affaire à Tous
- L’affaire « Exports Toxiques », avec le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD) et l’Institut Veblen ;
- L’affaire « accessibilité ENT », avec apiDV (accompagner, promouvoir, intégrer les Déficients Visuels) ;
- L’affaire « quota loi ELAN », avec APF France handicap.