Autorisation environnementale : impact d’une modification du PLU en cours d’instruction.

Par Orlane Sommaggio, Avocate.

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Explorer : # autorisation environnementale # urbanisme # modification du plu # projets éoliens

Lorsqu’un projet, tel qu’un parc éolien, fait l’objet d’une demande d’autorisation environnementale, le pétitionnaire doit fournir un document prouvant la conformité de son projet aux documents d’urbanisme en vigueur au moment du dépôt de sa demande, comme le prévoit l’article D181-5 I 12° a) du Code de l’environnement. Cela inclut le Plan Local d’Urbanisme (PLU), le Règlement National d’Urbanisme (RNU), ou la carte communale.
Cependant, si le PLU évolue pendant l’instruction de la demande, une question importante se pose : le pétitionnaire doit-il mettre à jour son dossier pour prouver que son projet est conforme aux nouvelles dispositions d’urbanisme, ou peut-il s’en tenir à la situation en vigueur au moment du dépôt ?

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Le cadre juridique.

Les projets éoliens, en tant qu’Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE), sont soumis à une évaluation environnementale et à une autorisation environnementale (article L181-1 du Code de l’environnement). Cette autorisation remplace le permis de construire, conformément à l’article R425-29-2 du Code de l’urbanisme, mais cela n’exonère pas le pétitionnaire de respecter les règles d’urbanisme en vigueur.

L’article D181-5 I 12° a) impose ainsi que le dossier de demande d’autorisation environnementale comprenne une attestation de conformité aux règles d’urbanisme applicables à la date de l’instruction. Mais l’instruction n’est pas un moment ponctuel ; c’est un processus continu, ce qui soulève la nécessité de s’adapter à d’éventuelles évolutions réglementaires pendant cette période.

Une évolution du PLU pendant l’instruction.

Dans un cas soumis au Conseil d’état, un pétitionnaire avait joint à son dossier un document justifiant la conformité de son projet éolien au PLU en vigueur au moment du dépôt de la demande. Cependant, l’instruction de cette demande a duré plus de trois ans, période durant laquelle le PLU a été modifié.

La commune d’implantation, qui contestait l’autorisation environnementale, a fait valoir que cette dernière était illégale car le pétitionnaire n’avait pas mis à jour son dossier pour prouver la conformité du projet au nouveau PLU.

Lecture de l’article D181-5-2 : deux interprétations.

Face à cette situation, une interrogation se pose : faut-il interpréter l’article D181-5-2 du Code de l’environnement de manière littérale, en estimant que l’attestation de conformité n’est requise qu’au moment du dépôt de la demande ? Ou, au contraire, faut-il considérer que le pétitionnaire doit actualiser son dossier si le PLU change pendant l’instruction ?

Le Conseil d’état a tranché pour une interprétation finaliste. Il a jugé que l’instruction d’une autorisation environnementale étant un processus continu, c’est au jour de la décision de l’administration que la conformité du projet aux règles d’urbanisme doit être évaluée. En conséquence, le pétitionnaire doit, le cas échéant, mettre à jour son dossier pour tenir compte des nouvelles dispositions du PLU en vigueur au moment de la décision.

Conformité aux règles d’urbanisme au moment de la décision.

Ainsi, la jurisprudence du Conseil d’état, confirmée notamment par un arrêt du 11 mars 2020 (n°423164), précise que les règles d’urbanisme en vigueur au jour de la décision d’octroi de l’autorisation environnementale doivent être respectées, et non celles applicables à la date du dépôt de la demande.

Cette obligation de se conformer aux règles d’urbanisme ne concerne pas uniquement les parcs éoliens, mais s’applique à toute utilisation du sol !

En effet, l’article L152-1 du Code de l’urbanisme rappelle que

« les constructions doivent respecter les règles d’urbanisme en vigueur à la date où l’autorité compétente statue sur la demande ».

L’obligation d’actualisation du dossier.

Cette exigence d’adapter le dossier pendant l’instruction, bien que contraignante, s’impose aux professionnels, qui doivent suivre l’évolution des documents d’urbanisme. L’impact de cette obligation reste limité, car les porteurs de projet, tels que les entreprises dans le secteur éolien, sont habitués à interagir avec l’administration et à suivre ces modifications dans le cadre de la procédure.

Toutefois, le Code de l’environnement prévoit aussi des cas particuliers. L’article L181-9 permet à l’autorité administrative de rejeter une demande d’autorisation environnementale si le projet est incompatible avec les règles d’urbanisme en vigueur.

Mais il est possible de déposer une demande d’autorisation environnementale alors que les règles d’urbanisme ne permettent pas encore le projet, à condition qu’une procédure de modification ou de révision du PLU soit en cours. Dans ce cas, l’autorisation ne sera délivrée qu’une fois les nouvelles règles adoptées, et le dossier doit comprendre la délibération ou l’acte formalisant cette procédure d’évolution.

Conclusion.

L’évolution du PLU pendant l’instruction d’une demande d’autorisation environnementale impose au pétitionnaire de veiller à la mise à jour de son dossier. La conformité au PLU doit être appréciée au moment de la décision administrative, et non au dépôt de la demande.

Cette exigence, bien qu’elle puisse sembler complexe, s’inscrit dans une logique de continuité et d’adaptation des projets aux cadres réglementaires en vigueur, garantissant une prise en compte des évolutions locales en matière d’aménagement du territoire.

Orlane Sommaggio
Avocate au barreau de Grenoble
Enseignante en droit de l’urbanisme
os chez sommaggio-avocat.fr

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