L’expulsion pour impayés en matière de baux commerciaux.

Par Jean-François Greze, Avocat.

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Explorer : # expulsion # baux commerciaux # impayés # procédure judiciaire

Le fait qu’un preneur cesse de régler son loyer peut être une vraie catastrophe pour son bailleur.
Selon les dispositions prévues par les articles 1728 du Code civil, l’obligation principal du preneur est d’avoir à régler son loyer et les charges à bonne date.
Si le preneur cesse de régler son loyer aux termes convenus, le bailleur a la faculté d’obtenir son expulsion.

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Il convient ainsi de s’intéresser au déroulement de la procédure, ce, à travers l’obtention d’une décision d’expulsion (1), puis son exécution (2).

Enfin, il sera abordé la question des délais particuliers pouvant être accordés au preneur avant qu’il quitte les lieux (3).

1) L’obtention d’une décision d’expulsion.

Il est d’usage de stipuler dans les contrats de baux commerciaux une clause permettant au bailleur d’invoquer la résiliation du contrat en cas de manquement par le preneur à ses obligations, tenant notamment au paiement du loyer.

Par application de l’article L145-41 du Code de commerce, pour que cette clause entraine la résiliation du contrat de bail commercial pour défaut de paiement, il est nécessaire de faire délivrer au locataire un commandement de payer visant ladite clause.

Suite à la réception du commandement de payer, le preneur dispose d’un délai d’un mois pour régler l’arriéré locatif dû.

A défaut de paiement de l’intégralité de la dette dans les délais requis, le bailleur pourra faire délivrer une assignation en référé visant à faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et condamner le preneur au paiement de l’arriéré.

Cette assignation devra être dénoncée par huissier de justice au preneur, ainsi qu’aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce sous peine d’irrecevabilité de l’action, et ce, à la lumière de l’article L143-2 du Code de commerce.

Par suite, le juge des référés, constatant que les causes du commandement n’ont pas été réglées peut rendre deux types de décisions :
- Soit, il constate l’acquisition de clause résolutoire insérée au bail commercial et ordonnance l’expulsion immédiate du preneur et de tous occupants de son chef ;
- Soit, le juge donne un calendrier de paiement au locataire, ou un délai pour s’exécuter, qui, s’il est demandé avant l’expiration du délai du commandement, suspend le jeu de la clause résolutoire, et s’il est demandé après, suspendra les effets de celle-ci.

Il est immédiatement précisé que, si le preneur respecte le calendrier fixé, la clause résolutoire n’aura pas joué, et le bail se poursuivra, au contraire, si le calendrier n’est pas suivi, la clause résolutoire reprendra son effet [1].

Par ailleurs, si le calendrier est respecté, mais que les échéances courantes ne sont pas payées, il est nécessaire de déterminer si l’ordonnance prévoit que le non-respect du paiement de cette échéance courante entraine la reprise des effets de la clause résolutoire.

Qu’il s’agisse du prononcé immédiat d’une expulsion ou de la fixation d’un calendrier de paiement, la décision devra faire l’objet d’une signification à l’adversaire.

2) L’exécution de la décision d’expulsion.

L’expulsion sera naturellement poursuivie en les cas ou la décision rendue a ordonné l’expulsion immédiate du preneur indélicat ou que le calendrier de paiement n’a pas été respecté.

Dans ces conditions, l’huissier de justice devra signifier au preneur un commandement d’avoir à quitter les locaux [2].

A la lumière de l’article L122-2 du Code des procédures civiles d’exécution, l’huissier de justice est en charge des opérations d’expulsions.

A ce titre, il peut recourir à la force publique et doit saisir le juge de l’exécution si une difficulté survient.

Par suite des opérations, l’huissier établit un procès-verbal d’expulsion contenant les mentions obligatoires visées par l’article R432-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

En cas de présence de la personne expulsée, le procès-verbal lui est remis en main propre, à défaut, elle lui est signifiée.

Enfin, l’article R441-1 du Code des procédures civiles d’exécution vise l’hypothèse dans laquelle un occupant se réinstalle dans les lieux postérieurement à l’expulsion.

Dans ce cas précis, la mesure d’expulsion peut être réitérée sans nécessité d’avoir à réaliser un nouveau commandement de quitter les lieux.

Il arrive fréquemment que des meubles soient laissés sur place par le preneur à raison de sa pure négligence.

Les meubles se trouvant sur place sont transportés à l’endroit désigné par la personne expulsée, à ses propres frais.

A défaut d’indication, il en est dressé un inventaire et sont soit, laissés sur place, soit transportés dans un lieu approprié et décrits par l’huissier de justice chargé de l’exécution avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de deux mois [3].

A l’expiration du délai imparti, il est procédé à la mise en vente aux enchères publiques des biens susceptibles d’être vendus. Les biens qui ne sont pas susceptibles d’être vendus sont réputés abandonnés. Le produit de la vente est remis à la personne expulsée après déduction des frais et de la créance du bailleur [4].

3) L’obtention de délais supplémentaires pour quitter les lieux.

Une fois le commandement de quitter les lieux délivré au preneur, celui-ci dispose encore de la faculté de saisir le juge de l’exécution pour obtenir des délais supplémentaires pour quitter les lieux.

En effet, au sens de l’article 1343-5 du Code civil et de l’article R121-1, alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution dispose du pouvoir d’accorder des délais pour quitter les lieux dans la limite de deux ans suspendant l’expulsion du locataire commercial ayant reçu un commandement de quitter les lieux [5].

Jean-François Greze
Avocat au barreau de Meaux
Site : https://greze-avocat.fr

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Notes de l'article:

[1Civ. 3e, 17 juill. 1996, no 94-18.406, P III, no 185 ; Gaz. Pal. 1997, 2, pan. p. 163.

[2Art. L411-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

[3Art. L433-1 et R433-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

[4Art. L433-2 du Code des procédures civiles d’exécution.

[5TGI Paris, JEX, 9 nov. 1998, RG no 98/85379, Gaz. Pal. 2000, somm. p. 867. Voir aussi pour l’octroi de délais sur le fondement des articles L412-3 et L412-4 du Code des procédures civiles d’exécution : CA Poitiers, 17-10-2017, n° 17/00402 ; CA Paris, 1, 8, 11-12-2015, n° 15/09694.

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