Remplaçant une précédente convention datant de 1963, la convention fiscale « en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscale en matière d’impôts sur le revenu et sur les gains en capital » entre la France et le Royaume-Uni, signée à Londres le 19 juin 2008, est entrée en vigueur en France le 18 décembre 2009. Elle a commencé à s’appliquer côté français aux revenus perçus à partir du 1er janvier 2010. Cette convention est inspirée du modèle établi par l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE).
Pour les britanniques résidant en France, il est tout d’abord nécessaire de définir précisément leur statut de résident fiscal de France (I), de gérer les différences entre les deux systèmes fiscaux nationaux (II), pour appliquer ensuite les dispositions de la convention afin de déterminer dans quel pays chaque revenu sera imposé (III), afin de faire application des dispositifs d’élimination de l’éventuelle double imposition de leurs revenus (IV).
I. La résidence fiscale
La détermination du domicile fiscal du contribuable est impérative afin de pouvoir faire application des dispositions de la convention. Cette notion se définit d’abord au regard de la législation nationale de chaque pays. Si un contribuable peut être qualifié de résident fiscal au regard des législations des deux pays, le conflit sera réglé au vu des dispositions de la convention fiscale bilatérale.
a. La résidence fiscale au regard de la législation britannique
Initialement basée sur une définition jurisprudentielle issue de très nombreuses décisions juridictionnelles, la notion de domicile fiscal a fait l’objet d’une profonde réforme par le fisc britannique, le HMRC (Her Majesty’s Revenue and Customs). En effet, il a été mis en place un protocole entré en vigueur le 6 avril 2013, applicable à partir de l’année fiscale 2013-2014.
Ce protocole dénommé Statutory Residence Test, fixe des critères permettant de considérer une personne comme résidente fiscale du Royaume-Uni. Ces critères sont les suivants :
séjour de plus de 183 jours au Royaume-Uni,
foyer d’habitation unique localisé au Royaume-Uni,
travail à temps plein au Royaume Uni.
Si l’une des trois conditions ci-dessus est remplie, le contribuable est considéré comme résident fiscal au Royaume-Uni. En revanche, si aucun de ces critères n’est rempli, le fisc britannique détermine également l’intensité des « liens personnels » ("Sufficient Ties Test") du contribuable avec le pays, au vu des critères de rattachement suivants :
famille,
domicile,
activité professionnelle,
présence au Royaume-Uni dans le passé.
Ces « liens personnels » sont étudiés en rapport avec le temps passé sur le territoire britannique au cours de l’année fiscale. Dès lors, plus un contribuable remplit de critères, moins de temps passé sur le territoire est nécessaire pour être considéré comme résident. En outre, cette appréciation diffère selon que l’on est en présence d’un contribuable “entrant” ou “sortant” du territoire au cours d’une année fiscale.
b. La résidence fiscale au regard de la législation française
Côté français, la notion de résidence fiscale en France est régie par les dispositions de l’article 4 B-1 du Code général des impôts, qui énumèrent un ensemble de critères du domicile fiscal :
le lieu du foyer fiscal ou du séjour principal,
celui de l’activité professionnelle non accessoire,
celui du centre des intérêts économiques.
Ces critères sont dits « alternatifs », ce qui signifie qu’il suffit d’en remplir un seul pour pouvoir être considéré comme résident fiscal de France.
c. La détermination de la résidence fiscale au regard de la convention bilatérale
En cas de conflit entre les deux pays en termes de résidence fiscale, il convient de se référer aux dispositions de l’article 4 de la convention bilatérale. Cet article énumère une liste de critères qui sont les suivants :
le foyer d’habitation permanent,
le centre des intérêts vitaux (liens personnels et économiques les plus étroits),
le lieu de séjour habituel,
et enfin la nationalité.
Ces critères sont quant à eux dits « successifs ». Il convient donc d’étudier la situation du contribuable au regard de chaque critère pris l’un après l’autre jusqu’à ce que l’un d’entre eux permette de résoudre la question.
Si ces critères ne permettent toujours pas de déterminer la résidence fiscale d’un contribuable, la convention prévoit que « les autorités compétentes des États tranchent la question d’un commun accord » (article 4-2-d).
d. La notion de « couple mixte »
Bien que le système français soit basé sur la notion de foyer fiscal, l’appréciation de la qualité de résident fiscal reste faite de manière individuelle. Dès-lors, il se peut que dans le cas d’un couple, l’un des conjoints soit résident fiscal de France, alors que le second est résident du Royaume-Uni. Cette situation, que l’on qualifie de “couple mixte”, conduit à prendre en compte ou non le conjoint non-résident dans la détermination du quotient familial du résident français et ce, en fonction du régime matrimonial du couple.
Lorsque le couple est marié/pacsé sous un régime de communauté, les deux conjoints sont pris en compte pour le quotient familial, mais seuls les éventuels revenus français du non-résident sont comptabilisés. En revanche, lorsque les conjoints sont mariés/pacsés sous un régime de séparation et ne vivent pas sous le même toit, ils font l’objet d’une imposition distincte (Article 6-4-a du Code général des impôts). Dès lors, le conjoint non-résident n’est pas pris en compte, ni pour ses revenus, ni pour le quotient familial. Il fera l’objet d’une déclaration séparée pour ses seuls revenus de source française s’il en perçoit.
Finalement, cette notion a peu d’impact en ce qui concerne les britanniques, car leur régime matrimonial légal est celui de la séparation. Partant, le conjoint britannique résident de France produira une déclaration de revenus individuelle, ne mentionnant que ses seuls revenus ; il ne bénéficiera que d’une seule part. Le non résident sera quant à lui éventuellement imposé sur ses seuls revenus de source française.
II. La gestion des différences entre les deux systèmes fiscaux nationaux
Les deux systèmes fiscaux nationaux présentent bien évidemment des différences qu’il convient de prendre en compte pour effectuer la déclaration en France des revenus de source britannique.
Tout d’abord, le système britannique impose les contribuables individuellement, sans connaître la notion de « foyer fiscal » de notre propre système. Mais cela ne pose pas de problème pratique, puisqu’il suffit de regrouper les revenus des conjoints (et éventuellement de leurs enfants) pour effectuer une déclaration commune en France.
Principalement soumis au système de retenue à la source, les contribuables anglais n’ayant pas d’autres revenus que des salaires ou revenus de capitaux mobiliers n’ont pas à produire de déclaration fiscale annuelle au Royaume-Uni. En revanche, ceux qui perçoivent des revenus ne pouvant être par nature soumis au prélèvement à la source (revenus fonciers, revenus d’activités non salariées etc…), produisent une déclaration fiscale annuelle dénommée « Self Assessment tax return ».
En outre, si l’année fiscale française est tout simplement basée sur l’année civile (1er janvier - 31 décembre), l’année fiscale britannique débute le 6 avril d’une année, pour se terminer le 5 avril de l’année suivante. Il est donc nécessaire pour les britanniques résidents fiscaux de France de tout d’abord proratiser leurs revenus sur l’année civile pour pouvoir les déclarer en France, ce qui peut parfois poser quelques problèmes pratiques.
Enfin, il est nécessaire de convertir en Euro les revenus perçus en devise britannique, la Livre Sterling. Pour cela, il convient d’effectuer une conversion sur la base de la parité quotidienne retenue par la Banque de France au jour d’encaissement du revenu. Par souci de simplicité, en cas d’encaissements multiples d’un même revenu au cours d’une année fiscale, l’administration admet que soit effectuée la conversion en Euros à partir de la moyenne arithmétique des cours de la Livre sterling au 1er janvier (en pratique au 31 décembre de l’année précédente) et au 31 décembre de l’année de paiement.
III. Pays d’imposition des différents revenus
La convention fiscale franco-britannique attribue l’exclusivité de l’imposition de chaque revenu au pays source ou au pays de résidence. Ne seront abordés ici que les revenus les plus couramment perçus par des britanniques résidents de France.
a. Les salaires
Au Royaume-Uni, les salaires sont imposés à la source, et la convention, dans son article 15, prévoit que le pays où est effectuée l’activité salariée, bénéficie de l’exclusivité de l’imposition de ce revenu. Cependant, ils sont à nouveau déclarés en France conformément aux dispositions de l’article 4 A du Code général des impôts, et bénéficient d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt français, afin d’éliminer la double imposition.
b. Les pensions de retraite
Il existe au Royaume-Uni trois types de pensions de retraites : les pensions du système public de retraite, les pensions complémentaires des organismes privés et les retraites de la fonction publique.
Aux termes des dispositions de la convention fiscale, les pensions servies par le système public ainsi que celles versées par les organismes privés sont imposables exclusivement dans le pays de résidence. Elles sont donc déclarées et taxées comme les pensions perçues en France.
En revanche, les pensions versées « au titre de services rendus à l’État » (article 19-2), soit aux anciens fonctionnaires donc, ne sont imposables que dans le pays source, sauf à ce que le bénéficiaire ait la nationalité du pays de résidence. Par exemple, un retraité de la fonction publique du Royaume-Uni mais résident fiscal de France qui perçoit une pension de source britannique, est imposé en France s’il possède la nationalité française. S’il n’a pas la nationalité française, sa pension de la fonction publique britannique est imposée au Royaume-Uni, puis déclarée en France tout en bénéficiant d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt français, afin d’éliminer la double imposition.
c. Les dividendes
La convention prévoit que l’imposition des dividendes est exclusivement réservée au pays de résidence. Mais les dividendes perçus au Royaume-Uni y sont imposés à la source au taux de 10%. Ils sont également imposés en France au taux progressif (art. 4-A du CGI), tout en bénéficiant de l’abattement de 40%. Afin d’éliminer cette double imposition, le contribuable reçoit un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt payé au Royaume-Uni, dans la limite de 15% du dividende brut.
d. Les intérêts
Pour ce qui est des intérêts, la convention dispose que leur imposition se fait exclusivement dans le pays de résidence. Pourtant, ces revenus sont taxés à la source au Royaume-Uni mais aucun crédit d’impôt n’est prévu par la convention afin d’éliminer la double imposition. Les britanniques résidant en France doivent donc demander au HMRC le remboursement de l’impôt payé à la source, après avoir obtenu de l’administration française un certificat attestant qu’ils ont bien déclaré ces revenus en France.
e. Les revenus immobiliers
L’article 6 de la convention prévoit que les revenus tirés d’un bien immobilier ne sont imposables que dans le pays de situation du bien. Dans la majorité des cas, les locations sont données meublées au Royaume-Uni. Le contribuable résident de France doit donc les déclarer en tant que revenu catégorie BIC et perçoit un crédit d’impôt égal à l’impôt français afin d’éliminer la double imposition.
IV. L’élimination de la double imposition
Aux termes de l’article 4 A du Code général des impôts français, « les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l’impôt sur le revenu en raison de l’ensemble de leurs revenus », donc, tous ceux perçus au niveau mondial. Les revenus de source britannique doivent donc être également inclus dans le revenu global déclaré par les contribuables résidents de France. La convention fiscale franco-britannique prévoit donc des mécanismes d’élimination des doubles impositions.
Le traité précédent optait pour la méthode dite du « taux effectif », qui consiste à ne pas imposer les revenus de source étrangère, mais à les prendre en compte pour calculer le taux moyen d’imposition du contribuable appliqué à ses revenus français. La nouvelle convention entre la France et le Royaume-Uni utilise quant à elle la méthode du « crédit d’impôt ». Par conséquent, pour éviter une double imposition des revenus conventionnellement taxables exclusivement au Royaume-Uni, le contribuable bénéficie en France d’un crédit d’impôt égal à l’impôt anglais pour les dividendes et égal à l’impôt théorique français pour les autres revenus.
Cependant, ce crédit d’impôt n’est accordé qu’ « à condition que le résident de France soit soumis à l’impôt du Royaume-Uni à raison de ces revenus » (article 24-3-a-i de la convention).
Cette notion de « soumission à l’impôt » a pu poser des problèmes pratiques en raison de la différence entre les deux systèmes fiscaux. C’est notamment la problématique du système britannique de la ”personal allowance”, qui est un abattement individuel (de 11.000 £, soit environ 12.950 €) en deçà duquel le contribuable britannique ne paie pas d’impôt. Or, pour les revenus dits complémentaires faisant l’objet d’une déclaration au Royaume-Uni (self assesment), ceux-ci sont parfois inférieurs au seuil de l’abattement.
Or, l’administration fiscale française considérait dans un premier temps ce système de personal allowance comme une exonération d’impôt et non comme une tranche d’imposition à 0% semblable à la première tranche d’imposition de notre système fiscal français. Dès lors, l’administration estimait que si la convention fiscale franco-britannique vise à éliminer la double imposition, elle n’avait pas pour vocation de créer une double exonération…
Mais cette position posait problème dans au moins deux hypothèses. Tout d’abord, celle des personnes ayant des revenus additionnels au Royaume-Uni excédant le seuil de cette personal allowance : 11.000 £ ne sont pas taxés, mais la fraction supérieure est imposée à un taux de 10%. Dans un tel cas de figure, le crédit d’impôt de la convention s’appliquerait-il alors sur la totalité du revenu, ou seulement sur la fraction supérieure taxée ?
Seconde hypothèse plus complexe, celle d’un contribuable qui aurait plusieurs catégories de revenus complémentaires de nature différentes. Si le cumul de ces revenus dépasse le seuil de la personal allowance, mais que l’un d’eux pris isolément ne le dépasse pas, comment savoir quel est le revenu qui dépasse ce seuil et donne lieu à taxation pour bénéficier du crédit d’impôt ?
Après avoir longuement tergiversé, l’administration fiscale française a fini par estimer que « la circonstance qu’à l’issue de l’application d’abattements personnels liés au revenu ou l’âge ayant pour effet de réduire ou d’annuler tout ou partie de la cotisation d’impôt au Royaume-Uni, ne doit pas conduire à refuser l’octroi de l’avantage prévu par la convention au résident fiscal français. Cette position est cohérente avec la jurisprudence (Conseil d’Etat « Regazzacci » du 27 juillet 2012) ». Cette réponse a permis d’obtenir une position claire de l’administration française, bien qu’elle s’appuie sur une décision du Conseil d’État rendue au sujet d’un autre dispositif du droit fiscal anglais dénommé "Remittance basis" et qui n’a aucun rapport avec la personal allowance…
Pour résumer donc, à partir du moment où les revenus de source britannique ont fait l’objet d’une déclaration au Royaume-Uni, le bénéfice du crédit est accordé, indépendamment du fait qu’un impôt ait été payé ou non au Royaume-Uni.
Seul problème pratique pour les britanniques, le fait qu’ils ne bénéficient pas d’avis de non-imposition à proprement parler s’ils sont en deçà de la personal allowance. Or, en cas de contrôle des services fiscaux français, ceux-ci demandent de justifier de la déclaration des revenus complémentaires au Royaume-Uni, ce qui est parfois difficile à prouver. En effet, il n’est possible que de fournir une copie de la télédéclaration ainsi qu’un accusé de réception, mais ces documents ne font pas toujours foi pour certains services… En outre, le HMRC refuse quant à lui de délivrer des attestations de déclaration. Ces situations impliquent donc parfois de longues négociations avec les services fiscaux français.
Discussions en cours :
Bonjour, Je suis de nationalité Britannique résident en France depuis 15 ans.
Je suis à présent retraité et perçois une retraite d’Etat (State Pension) à taux plein de l’Angleterre.
Le montant de cette retraite est peu élevé et fait donc l’objet d’une exonération de prélèvement à la source de l’impôt en Angleterre. Cette retraite est-elle soumise à l’impôt sur le revenu français ? Fait-elle l’objet d’un crédit d’impôt en France ?
Merci par avance de votre aide. Neil
Un citoyen britannique résidant en France depuis 40 ans, travailleur indépendant avec des revenus en France, peut-il faire sa déclaration d’impôts sur les revenus en Grande Bretagne ? Merci
Je dois recevoir 65 000€ de cryptomonnaie du Royaume-Uni via la HMRC. Celle-ci m’adresse un document déclarant 10°/° de 65 000€, hors la HMRC me réclame 30°/° des 65 000°/°. J’ai déjà payé 10 000€ et me réclame encore +8 000€. Est-ce normal
Bonjour j’ai mon fils qui habite et travail en Ecosse avec des revenus foncier en France associé d’une SCI de famille
Comment faire !!y’a t’il une déclaration autre que la classique à faire et ou ??
Merci de votre retour
Je suis Francais (Not settled ou Double nationalité) rentrant en France après 15 ans en UK.
Et fraichement divorcé d’une femme Britannique. 3 enfants.
J’ai recu l’argent de ma maison principale vendue et cette somme est sur mon compte Anglais.
Je ne veux pas (et -je crois que- je ne peux pas techniquement parlant) garder un compte en GBP en UK
(car je n’y habite plus et je ne suis pas Settled, je n’ai donc plus aucun droit "Anglais" car fiscalement plus du tout en UK.
Est-ce que mon argent GBP sera taxable en France lors de son rapatriement (et transfer en Euros) en France par le fisc francais ?
En sachant qu’en Angleterre, l’argent reçu suite à la vente de sa Maison principale (en UK) n’est pas taxée.
Merci