Les dispositions du Code du travail.
Sur la recherche de reclassement (article L1226-10).
Lorsque le salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise.
Le médecin du travail formule également des indications sur l’aptitude du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
Sur l’impossibilité de reclassement (article L1226-12).
Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement.
L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie :
- soit de son impossibilité de proposer un emploi,
- soit du refus par le salarié de l’emploi proposé,
- soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.
L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L1226-10, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.
En cas de licenciement, l’employeur doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel
Faits et procédure.
Un salarié, engagé en qualité de monteur courant fort, a été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail du fait d’une maladie professionnelle. Il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement après avoir refusé les 9 postes proposés éloignés géographiquement de son domicile.
Estimant que l’obligation de reclassement n’avait pas été exécutée loyalement ; aucun poste ne lui ayant été proposé en Normandie, il a saisi la juridiction prud’homale de demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.
La cour d’appel de Caen a dit le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et l’employeur a été condamné à lui verser des dommages-intérêts à ce titre.
La position de l’employeur.
L’employeur a formé un pourvoi. Il faisait valoir que dès lors que l’employeur a proposé au salarié un emploi aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail, l’obligation de reclassement est réputée satisfaite, à moins que le salarié rapporte la preuve de la déloyauté de l’employeur dans l’exécution de son obligation de reclassement.
Il reprochait à la cour d’appel d’avoir inversé la charge de la preuve en exigeant de l’employeur qu’il rapporte la preuve de l’absence en Normandie de poste disponible compatible avec les qualifications et capacités physiques restantes du salarié et en déduisant de la carence de l’employeur la mauvaise foi de celui-ci.
Il soutenait que c’était au salarié de rapporter la preuve de l’existence d’un poste plus adapté à ses vœux et de la déloyauté subséquente de l’employeur dans l’exécution de son obligation de reclassement.
La réponse de la Cour de cassation.
Elle reproche à l’arrêt critiqué, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse :
D’avoir constaté que les pièces versées démontrent qu’au-delà des neuf postes proposés, tous éloignés géographiquement du domicile du salarié, il existait de nombreux autres postes à pourvoir et que la société ne produit pas le registre unique du personnel de ses établissements situés sur la région Normandie.
De retenir qu’à défaut de rapporter la preuve qu’il n’existait pas en Normandie de postes disponibles compatibles avec les qualifications et les capacités physiques restantes du salarié, l’employeur ne démontre pas avoir respecté son obligation de reclassement dans des conditions suffisamment loyales et sérieuses.
La chambre sociale casse l’arrêt, car la cour a inversé la charge de la preuve et elle renvoie les parties devant la cour d’appel de Caen.
Elle considère que lorsque l’employeur a proposé un emploi conforme aux dispositions légales, l’obligation de recherche de reclassement est réputée satisfaite et c’est au salarié qu’il appartient au salarié de démontrer que cette proposition n’a pas été faite loyalement.
Décision rendue au visa notamment de l’article 1354 du Code civil selon lequel la présomption que la loi attache à certains actes ou à certains faits, en les tenant pour certains, dispense celui au profit duquel elle existe d’en rapporter la preuve.
Conclusion : la charge de la preuve pèse sur le salarié.
L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur propose un emploi, dans le respect des conditions prévues par le Code du travail, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.
En cas de litige, si le salarié considère que l’obligation de reclassement n’a pas été exécutée loyalement par l’employeur, c’est à lui, sur qui pèse la charge de la preuve, de démontrer que cette proposition n’a pas été faite loyalement.
Le principe ainsi dégagé par la Cour de cassation concerne également l’inaptitude d’origine non professionnelle (article L1226-2 Code du travail) ; les textes relatifs au reclassement étant rédigés en termes identiques.