Les enjeux de l'avant-projet de la nouvelle loi en matière immobilière dite loi ELAN. Par Capucine Kernevez.

Les enjeux de l’avant-projet de la nouvelle loi en matière immobilière dite loi ELAN.

Par Capucine Kernevez.

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Explorer : # construction de logements # mixité sociale # urbanisme # cadre de vie

A l’heure de la présentation de l’avant-projet de la loi Evolution du Logement et Aménagement Numérique dite "ELAN", il est temps de dresser un premier bilan des 57 articles qui constitue ce projet phare de l’actuel gouvernement.

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Trois axes principaux s’en dégagent :
- Favoriser la construction de logements ;
- Répondre aux besoins de chacun et favoriser la mixité sociale ;
- Améliorer le cadre de vie.

1. Favoriser la construction de logements (art. 1 et s.)

1.1. Libération du foncier public (art. 1 et s.)

Dans le cadre de Projets Partenariaux d’Aménagement, l’État pourra céder à l’amiable des terrains aux Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) ou aux opérateurs désignés dans un Projet Partenarial d’Aménagement.

La mobilisation de foncier public pour la production de logements sera facilitée. Lorsque sera mobilisé du foncier public avec décote par rapport à la valeur de marché, le seuil de la surface de plancher minimale consacrée au logement sera abaissé de 75 % à 50 % de la surface de plancher totale du projet. Dans ce cadre, le délai d’une durée de 5 années pour la mise en œuvre des logements est aménagé.

Le bail réel solidaire sera applicable aux logements en accession sociale à la propriété.

Il est prévu un contrôle par l’Agence Nationale de Contrôle du Logement Social de la Foncière Publique Solidaire dont un rapport devra prévoir une réflexion sur l’évolution de ses missions (art. 2)

Les données foncières devraient gagner en transparence (art. 3).

Le droit de préemption au bénéfice des Préfets dans les zones urbanisées des communes carencées soumises au règlement national d’urbanisme est maintenu.

Les établissements publics foncier d’État retrouveront la possibilité d’acquérir en vue de leur démolition des logements sociaux et ce dans le cadre d’opérations de renouvellement urbain.

Le Droit de Préemption Urbain (DPU) des communes carencées pourra être délégué à des Sociétés d’Économie Mixtes (SEM) de construction et de gestion de logements sociaux bénéficiant d’un agrément du ministère du Logement.

Les établissements Publics Territoriaux du Grand Paris pourront désormais créer des Zones d’Aménagement Différés (ZAD) (art. 4).

1.2. Dynamiser les opérations d’aménagement pour produire plus de foncier constructible. (art. 5 et s.)

Les engagements de l’État et d’une intercommunalité liées à la réalisation d’opérations d’aménagement d’importance pourront être transcrits dans un contrat intitulé Projet Partenarial d’Aménagement, auquel les régions, départements, communes et établissements publics pourront être parties (art. 5).

Le statut des Grandes Opérations d’Urbanisme (GOU) et des opérations d’intérêt national est précisé (art. 6)

Sont simplifiées les procédures d’enquête publique relatives aux Grandes Opérations d’Urbanisme (GOU) et aux Zones d’Aménagement Concertées (ZAC) (art. 7).

Les procédures des opérations d’aménagement des Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) seront simplifiées afin de réduire notamment les délais de réalisation des logements (art. 8).

1.3. Favoriser la transformation de bureaux en logements. (art. 9)

L’avant-projet de loi ELAN prolonge les dispositions instaurées en 2009 en vue de la création de logements temporaires dans des bureaux vacants, tout en apportant des simplifications quant aux règles applicables en matière de transformation de bureaux en logements.

Les maires ou présidents d’EPCI (Établissement Public de Coopération Intercommunale) compétents en matière de délivrance de permis de construire peuvent aux termes de l’avant-projet de loi octroyer une augmentation de 10% du volume constructible lorsque le projet porte sur une transformation de logements en bureaux.

De même les communes pourront également accorder des dérogations quant au nombre de logements sociaux requis pour un projet de transformation de bureaux en logements.

En matière de sécurité incendie il est prévu de rapprocher les dispositions applicables en matière d’immeubles de bureaux de celles applicables en matière d’immeuble d’habitation de moyenne hauteur.

L’État aura la possibilité de réquisitionner des bureaux vacants pour une durée inférieure à 2 ans à des fins d’hébergement.

1.4. Simplifier les règles d’urbanisme. (art. 10 et s.)

En cas d’annulation par les juridictions administratives du Plan Local d’Urbanisme (PLU) l’ancien Plan d’Occupation des Sols (POS) ne sera pas remis en vigueur (art. 10).

Les documents d’urbanisme seront désormais identifiés selon leur rang (hiérarchie des normes). Le seul lien de compatibilité sera privilégié afin de pas remettre en cause les objectifs des documents de rang supérieur (habilitation) (art. 11).

Les Schémas d’Aménagement Régionaux (SAR) seront simplifiés pour l’outre-mer (art. 12).
Les avis des Architectes des Bâtiments de France (ABF) seront purement consultatifs d’une part en matière d’opérations de lutte contre l’habitat indigne et d’autre part concernant les pylônes de téléphonie mobile (art. 13).

En cas de recours d’une collectivité contre une décision d’un ABF, le silence du préfet destinataire du recours vaudra acceptation par ce dernier du recours (art. 14).

Les demandeurs de permis de construire ne seront tenus désormais que de déposer les pièces prévues dans les textes (art. 15).

Il est prévu à l’horizon 2022 de dématérialiser le dépôt des permis de construire, notamment pour les communes dont la population est supérieure à un seuil qui sera défini par décret (art. 16).

1.5. Simplifier l’acte de construire. (art. 17 et s.)

Alors qu’à ce jour, la totalité des logements neufs doit être accessible aux Personnes à Mobilité Réduite (PMR) ils devront être 100 % évolutifs, c’est à dire offrir la possibilité d’être facilement transformés en logements accessibles. Un quota de 10% de logements accessibles reste maintenu (art. 17).

Les règles d’allotissement des marchés publics seront adaptées afin de faciliter les constructions préfabriquées (art. 18) et de permettre des échéanciers de paiement adaptés (art. 19).

La passation de commandes publiques pour les organismes HLM se trouve simplifié notamment en allongeant de 3 ans la possibilité de recourir au mécanisme conception-réalisation (art. 20).

La transposition de la directive relative au frais de chauffage est supprimée alors que la directive prévoyant l’individualisation en matière de refroidissement sera transposée (art. 21).

Dans le cadre de Ventes en l’État Futur d’Achèvement (VEFA), une plus grande liberté sera laissée aux acquéreurs et vendeurs dans le choix et la réalisation des finitions (art. 22).

Le droit de visite des agents chargés des contrôles en matière d’urbanisme et de construction est modifié en conformité avec l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme qui assure la protection du domicile (art. 23).

1.6. Améliorer le contentieux du droit de l’urbanisme. (art. 24)

Les recours abusifs, nombreux en matière de droit de l’urbanisme, sont visées, ainsi les délais des décisions relatives aux recours devraient être accélérées et les auteurs de recours abusifs devraient être sanctionnés.

1.7. Réformer en profondeur le secteur du logement social. (art. 25 et s.)

Deux ordonnances de ratification d’Action Logement se trouvent ratifiées (art. 26).

Les bailleurs sociaux auront davantage de liberté en matière de choix patrimoniaux afin de favoriser notamment l’accès social à la propriété et de permettre aux organismes du secteur HLM de dégager davantage de ressources.

Les critères de fixation des loyers devraient être moins corrélés au mode de financement des immeubles HLM mais davantage aux revenus des locataires.

2. Répondre aux besoins de chacun et favoriser la mixité sociale. (art. 29 et s.)

2.1. La mobilité (art. 29 et s.)

La création d’un bail-mobilité est prévue à l’avant-projet. Ce bail-mobilité serait un bail meublé de 1 à 10 mois non renouvelable sans dépôt de garantie mais avec caution et une clause de non solidarité en cas de colocation serait intégrée (art. 29).

Les commissions d’attribution de logement devraient désormais instituer un examen périodique tous les six ans afin de proposer aux locataires de logements sociaux un bien plus adapté à l’évolution de leurs besoins personnels (agrandissement ou diminution du nombre d’occupants, survenue d’un handicap …) (art. 30).

Les Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) tenus de se doter d’un Plan local de l’habitat devront mettre en place un système de cotation de la demande en logements sociaux (art. 31).

La procédure de désignation des demandeurs de logements sociaux en Quartier Politique de la Ville (QPV) est allégée (art. 32).

2.2. La mixité sociale. (art. 33 et s.)

La mixité intergénérationnelle est favorisée par l’octroi d’une aide personnalisée au logement aux locataires sous-louant une partie de leur logement à une personne de moins de 30 ans. (art.33).

Une plus grande fluidité dans l’attribution de logements sociaux est envisagée par l’introduction d’une gestion en flux des contingents de logements sociaux (art. 34).

Les procédures d’expulsion locative et de surendettement devraient être coordonnées afin de faciliter le maintien dans les lieux de locataires de bonne foi en situation de surendettement (art. 35).

Les commandements de payer des dettes locatives devront désormais obligatoirement mentionner le montant mensuel du loyer et des charges et fournir un décompte de la dette locative (art. 36).

Le protocole de cohésion sociale sera ouvert au cas d’absence de dette locative, soit les cas de dette remboursée ou effacée par une commission de surendettement (art. 37).

Les moyens de pilotage et d’organisation du dispositif d’accueil, d’hébergement et d’accompagnement vers l’insertion sont facilités (art. 38).

La transformation d’hôtels en résidences hôtelières sociales est facilitée (art. 39).

Un rapport devra être effectué sur le logements des adultes souffrant d’autisme (art. 40).

2.3. Améliorer les relations locataires/bailleurs et favoriser la production de logements intermédiaires. (art. 41 et s.)

Le Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilière revient à sa version consultative sans le rôle d’une commission de contrôle. (art. 41).

L’agrément des observatoires des loyers et la mise en place de l’encadrement des loyers en lui-même sera dissocié, aussi les agences d’urbanisme pourront-elles être agréées observatoires (art. 42).

Une amende administrative sera prévue en cas de non-respect de l’encadrement des loyers (art. 43).

Le renvoi à un décret pour la définition des normes spécifiques de décence en cas de colocation à bail unique est supprimé pour les hôtels meublés (art. 44).
Des dispositifs de contrôle seront prévus pour les locations touristiques de courte durée (art. 45).

3. Améliorer le cadre de vie. (art. 46 et s.)

3.1. Revitaliser les centres-villes. (art. 46)

Un contrat intégrateur unique entre l’Etat ses opérateurs et les collectivités sera instauré afin de répondre aux enjeux du développement local, tous les financeurs potentiels pourront y adhérer.

3.2. Rénovation énergétique. (art. 47)

Les obligations d’économie d’énergie du secteur tertiaire devront être rendues opérationnelles.

3.3. Lutte contre l’habitat indigne (art. 48 et s.)

La lutte contre l’habitat indigne au niveau intercommunal sera facilitée en donnant plus de stabilité aux transferts de police administrative aux présidents d’Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), en favorisant au niveau intercommunal l’organisation des services en charge de la lutte contre l’habitat indigne et en facilitant la délégation par les préfets aux présidents d’EPCI de leurs pouvoirs en matière de police de santé publique (art. 48).

Les maires pourront recouvrir à l’encontre des propriétaires les frais engagés pour le traitement en urgence des situations d’habitat insalubre (art. 49).

Une présomption de revenus sera créée à l’encontre des marchands de sommeil permettant à l’Administration fiscale de mettre en œuvre des poursuites. (art. 50).

Les astreintes liées aux polices de l’habitat indigne pourront être versées au budget des Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) compétents en matière d’habitat (art. 51).

3.4. Droit de la copropriété. (art. 52)

L’avant-projet a pour objectif de permettre aux copropriétés d’atteindre une meilleure gouvernance. Deux axes sont retenus. Le premier devra lever les blocages en adaptant le droit de la copropriété en fonction de la taille et de la nature des copropriétés. Le second axe devra adapter les règles de fonctionnement des organes de la copropriété.

3.5. Digitalisation et logement. (art. 53)

Est prévue la création d’un bail numérique qui devrait en outre permettre la remontée d’information sur le contenu des baux.

3.6. Déploiement de réseaux de communication électronique à très haute capacité (art. 54 et s.)

Le délai de deux mois après avoir déposé en mairie le dossier d’information auquel sont contraints les opérateurs pour les demandes d’autorisation en matière de droit de l’urbanisme est supprimé. Dans le même temps, le délai minimum imposé aux opérateurs avant de démarrer des travaux relatifs à des modifications d’installations électriques est réduit de deux à un mois (art. 54).

Les stations radioélectriques seront désormais hors champ de la procédure de mise en concurrence préalable à une occupation du domaine public (art. 55).

Sera facilité la mise en œuvre de servitudes nécessaires lors de déploiement de câbles optiques aériens.
Les propriétaires et copropriétaires auront désormais un mois et non plus trois mois afin de formuler leurs observations relatives à une demande de servitude.
Ne sera plus nécessaire pour l’obtention d’une nouvelle servitude, l’existence d’une servitude antérieure (art. 56).

La portée des engagements des opérateurs en dehors des zones peu denses sera confortée (art. 57).

Capucine Kernevez
Présidente de la société Europalion
Services Immobiliers
www.europalion.com

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