Un divorce sans juge est donc proposé ou devrais-je écrire encore une fois proposé car ce n’est pas la première fois que le législateur essaie de faire passer cette dé-judiciarisation. Il n’y a pas si longtemps, une proposition avait fait grand bruit, le divorce devait être homologué par un greffier et sans avocat. Il y a un peu plus longtemps, il était question du divorce chez le notaire sans les avocats.
Afin de ménager les susceptibilités et surtout pour éviter une mobilisation des avocats, cet amendement propose ce divorce sans juge mais avec les avocats qui contresigneront un acte déposé au rang des minutes d’un notaire.
Ce divorce serait une autre catégorie de divorce qui a vocation à s’ajouter aux autres mais qui a vocation surtout à se substituer à la majorité des cas de divorce par consentement mutuel.
Cet amendement est critiquable et nous, avocats, nous devons être très méfiants face à ces bonnes intentions affichées par le législateur.
On nous intègre à la procédure en précisant dans l’exposé sommaire que nous serons chargé du contrôle de l’équilibre des intérêts en présence et que nous n’avons pas à nous inquiéter ce ne sera pas le notaire qui aura en charge cette mission !
Cependant, ce que nous critiquions dans le divorce sans juge et effectué par un greffier ou par le notaire c’est l’absence du juge !
En effet, un divorce par consentement mutuel n’est pas aussi simple que l’on peut le penser surtout en présence d’enfants ou de patrimoine.
Le rôle du juge est essentiel :
- il contrôle le consentement des parties au divorce ;
- il s’assure de l’intérêt de l’enfant dans la mise en œuvre des modalités de résidence, dans le montant de la pension alimentaire ;
- il vérifiera qu’un époux n’exerce pas de pression sur l’autre pour qu’il ne demande pas de prestation compensatoire.
L’avocat n’a pas pour rôle de contrôler l’équilibre des intérêts en présence. Il a un rôle essentiel de conseil. Il conseillera les époux pour un équilibre des intérêts en présence. Cependant, ce sont les époux qui auront le dernier mot. L’avocat aura mandat de rédiger la convention de divorce selon les souhaits des époux qui se diront d’accord sur tous les points.
Aussi, une convention déséquilibrée pourrait être présentée au notaire pour homologation, l’avocat conseillant les époux, ayant parfois essayé de leur faire changer d’avis, sans succès.
Seul un juge qui est neutre, mandaté par aucune des parties, pourra vérifier le consentement des époux au divorce et aux dispositions prévues dans leur convention de divorce.
Cette proposition de divorce sous seing privé déposé auprès d’un notaire n’est pas satisfaisante et elle est dangereuse pour les époux même s’ils disposent d’un délai de réflexion.
En outre, il n’est pas question dans cet amendement du coût du divorce pour les époux.
Combien leur coûtera un tel divorce ? Aux honoraires d’avocat s’ajouteront les émoluments du notaire.
Aujourd’hui, les époux ne paient pas le juge qui les divorce. Ce divorce dé-judiciarisé coûtera plus cher aux époux que le divorce par consentement mutuel homologué par le juge.
En conclusion, il ne faut pas se leurrer, ce nouveau divorce que le législateur essaie de faire passer en catimini a pour seul et unique but d’économiser : économiser les salaires des juges aux affaires familiales.
En effet, si les JAF n’ont plus à prononcer les divorces par consentement mutuel, ils se consacreront aux autres divorces et aux liquidations de régime matrimoniaux.
Une grande part de leur travail leur sera retiré et le nombre de juges aux affaires familiales pourra être diminué et par conséquent l’État aura moins de salaires à payer.
L’État pense qu’il économisera, mais tel ne sera pas le cas, bien au contraire, il est à parier que ces divorces dont l’équilibre n’a pas été contrôlé par le juge referont surface devant le juge aux affaires familiales : les époux saisiront le juge pour un changement de résidence habituelle ou encore une modification du montant de la pension alimentaire.
Je devine que la profession sera sans doute moins mobilisée sur ce nouveau divorce par consentement mutuel car « elle en est ».
Oui, nous en sommes mais pour combien de temps, je crains que cet amendement ne soit qu’une étape et que dans quelques années un nouvel amendement propose de laisser ce divorce au notaire, un peu comme le changement de régime matrimonial qui pour partie nous a échappé.
Sous ses airs innocents cet amendement est à mon sens contraire aux intérêts de nos clients et également aux intérêts de la profession !
Discussions en cours :
Je suis stupéfaite de voir que les avocats persistent à scier la branche sur laquelle ils sont assis.
La déjudiciarisation est en marche, qu’on le veuille ou non !
Deux solutions ou bien les avocats se positionnent en professionnels du droit capables de traiter les dossiers en dehors d’un prétoire, ou bien ils commentent, râlent , vocifèrent et contestent et ils perdront ce domaine d’intervention au profit des Notaires ( qui eux ne rechigneront pas à faire des divorces par consentement mutuels sans juges) .
Il serait peut-être temps de se réveiller et de bien comprendre que l’avenir de la profession n’est pas au sein des tribunaux mais en amont .
Accepter la dé-judiciarisation c’est accepter notre future disparition et surtout (ce qui est plus grave) c’est accepter que la justice régalienne se privatise !
Il faut peut être voir plus loin que le bout de son nez et réfléchir sur la dé-judiciarisation, l’ultra-libéralisme qui est inquiétant pas seulement pour les avocats mais pour les justiciables surtout
nous sommes avocat, auxiliaire de justice et pas marchands de droit
nous ne pouvons nous contenter du "nous en sommes et nous devons accepter ce divorce sans garantie pour nos clients", nous ne pouvons accepter le premier pas vers une dé-judiciarisation qui sera de plus grande ampleur et touchera tous les domaines du droit
nous jouons un rôle important dans la négociation d’un divorce amiable et dans la recherche d’un équilibre de l’accord
cependant nous ne pouvons nous passer du juge qui débloque très souvent nos négociations, il est dissuasif , lorsque des clients souhaitent imposer des conditions farfelues, nous pouvons leur dire "non, pas possible, le juge n’homologuera pas "
avec le notaire que dirons nous ?
je vous invite à lire un complément à cet article plus approfondi, je ne me contente pas de râler comme vous dites mais je réfléchis à long terme et je réfléchis les yeux ouverts je suis bien réveillée, on ne m’a pas endormie avec cette proposition qui nous mets dans une position très délicate car on nous valorise exprès pour nous faire taire !
lisez aussi l’article de notre Confrère CASSEY
Afin de rendre les avocats encore plus indispensables dans tous les domaines, pourquoi ne pas revendiquer leur nécessaire intervention pour les mariages qui sont, au moins autant que les divorces, générateurs d’obligations de toutes sortes, plus importantes les unes que les autres ?
Pourquoi se defier de l avocat ?
Un avocat a des principes de probité et un divorce par acte d avocats est tout à fait possible.
Deux avocats chacun conseillant sous sa responsabilité.
Pas d avocat pour deux.
Le jaf n est pas infaillible.
Une solution :
Un médiateur pour contrôler.
Formé au droit de la famille et aux droits des enfants.
Et avec recours possible.
si vous ajoutez un médiateur et un recours !
l’amendement précise que c’est dans un but de simplification
Il faudrait prévoir :
Un conciliateur pour s’assurer préalablement que les époux sont inconciliables en tant que tels et seront conciliables en tant qu’ex ;
Deux avocats (un par époux) pour rédiger et contresigner l’acte d’avocat ;
Un bâtonnier (ou deux si les avocats sont de barreaux différents, et un troisième si les bâtonniers sont d’avis divergents) pour vérifier que l’acte respecte les principes essentiels et que les avocats sont à jour de leurs cotisations (et d’ailleurs qu’ils sont inscrits à un barreau …) ;
Un contrôleur de la DGCCRF pour vérifier l’existence d’une convention d’honoraires en bonne et due forme ;
Un OPJ pour vérifier l’identité des époux ;
Un médiateur pour faciliter la parole des époux et sa compréhension par les avocats rédacteurs ;
Un interprète s’il y a lieu (notamment si les avocats s’expriment en latin) ;
Un huissier pour constater le bon déroulement des opérations ;
Un avocat pour chacun des enfants capables de discernement ;
Un pédopsychiatre pour les autres ;
Un notaire pour garder l’acte ;
Un raton-laveur …
C’est vrai qu’un divorce simple par consentement mutuel entre époux intelligents avec un ou deux avocats compétents et un juge attentif, c’est beaucoup trop compliqué ! En tout cas, si c’est bon pour le moral (et la morale), c’est pas bon pour le marché ...
au XXIème siècle, nous réformons tout pour gagner du temps exemple JAF en trois mn chrono décide de votre vie et celle de vos enfants (exemple garde alternée 8 mois en attendant décision JAF qui revient à une garde restreinte du samedi 14 h au dimanche 19 h mais un mois l’été ! où est la logique, comment un enfant peut il comprendre qu’il voit son père 2 nuits dans le mois après avoir pratiquer une semaine/deux pendant 8 mois, (mais aura la chance de le voir un mois pendant les grandes vacances, là sa mère ne lui manquera pas, pas plus que son père quand il en est séparé et à la rentrée pour un peu que le we ne soit pas le bon restera encore 1 mois 1/2 sans voir son père. Quand va t’on réfléchir aux souffrances des enfants qu’on sépare de leurs papas parce que les mamans ont décidé de mettre suffisamment de kilomètres pour que le JAF oppose la distance à un père qui travaille en poste (une demi journée libre pour s’occuper des enfants) par rapport à la mère qui travaille en journée et laisse les enfants à la nounou de 8 h du matin à 19 h le soir ! OU EST L INTERET DES ENFANTS !! je suis désolée mais les pères s’occupent de leurs enfants autant que les mères (coupe le cordon, change les couches et savent s’occuper et aimer leurs enfants. Il faut mettre la résidence alternée systématique sauf bien sur en cas de violences.
Après une 1 ère réaction émotionnelle sur le principe, en voici une autre de gestionnaire .
Donc sur la France entière si on considère 65 000 divorces amiables /an, cela représente environ 50 postes de JAF…
Que de bouleversement dans la symbolique du domaine de l’état pour 50 voire 100 postes !!!
Si le ministre cherche à économiser 50 à 100 postes de juges, les avocats et les usagers peuvent lui proposer des idées sûrement plus rentables et plus douces !
Quant aux Notaires ? Combien de temps passent-ils dans les tribunaux par mois pour connaître l’argus des pensions, prestations compensatoires, nouveaux modes de droits de visite et hébergements, de garde des enfants, anticipation des litiges d’après divorce etc. ?
Ensuite si le Notaire est rétribué 50 euros par divorce, et qu’il faille de la prise de rendez-vous à l’archivage, 30 minutes par divorce, soit 2 à l’heure, donc la rémunération du Notaire est de 100 euros de l’heure ( y compris TVA ? ) si tout va bien !
.. A ce prix où est la rentabilité pour le Notaire ? Pour être rentable il va falloir qu’il effectue de la série ou qu’il ait des possibilités de ponctionner le couple par ailleurs, sinon il ne va pas y avoir beaucoup de Notaires désirant effectuer le travail
Nota : avec 50 euros, aura-t-on un Notaire ou un clerc de Notaire ?
Ce n’est qu’une réflexion durant le week end de l’Ascension !..
Sinon l’usager qu’il passe devant un juge ou un Notaire, cela ne lui importe peu. Ce qu’il désire : c’est un délai court et un coût compatible avec ses revenus. Les (vrais) gagnants vont être les officines du divorce amiable par Internet.
Michel MILAN
www.divorcefrance.fr
Bonjour,
Il me semble que les 50 Euros concernent les taxes d’enregistrement. Ils ne préjugent pas des honoraires du notaires qui vont s’y ajouter.
Ceci étant dit, je pense qu’il y a aussi une question de symbolique : de par l’individualisation croissante du couple, le mariage ne représente plus grand chose à notre époque, c’est un fait indéniable, chacun veut jalousement garder son indépendance financière et même plus ... Cette réforme ne fait que s’inscrire dans le sens de l’histoire et suit l’évolution de nos sociétés.
On pourrait d’ailleurs en profiter pour se poser la question de l’abrogation du mariage car c’est une institution infantilisante qui ne correspond plus aux aspirations des citoyens. Pourquoi même ne pas commuer les mariages existants en PACS ? Beaucoup de personnes mariées en seraient restées au PACS si celui-ci avait existé en leurs temps.
De toutes façons le mariage finira par disparaître de lui-même bien avant la fin de ce siècle et la question du divorce ne se posera plus.
C’est le mariage qu’il faut supprimer pour ne laisser que le PACS qui suffit amplement.
Il ne rime à rien de marier autant de gens pour les divorcer ensuite.
Le nombre de mariage est en décroissance permanente alors que le nombre de PACS est en croissance.
On voit donc bien que c’est l’institution du mariage qui est en échec car ne correspondant plus au souhait de la population. Les gens n’en veulent plus et lorsqu’ils se marient malgré tout, ils le font en séparation de biens.
De toutes façons le mariage finira par disparaître de lui-même avant le milieu de ce siècle ce qui ne sera pas pour me déplaire.