Pesticides et travailleurs, comment faire reconnaître sa maladie professionnelle ?

Par Guillaume Cornu, Responsable contentieux et Tristan Berger, Avocat.

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Explorer : # maladie professionnelle # pesticides # reconnaissance # indemnisation

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Une maladie est qualifiée de «professionnelle» si elle est directement causée par l'exposition d'un travailleur à un risque physique, chimique ou biologique, ou résulte de ses conditions de travail, et est répertoriée dans les tableaux de la Sécurité sociale. Les cas de maladies professionnelles répertoriées diffèrent de ceux non répertoriés, en termes de reconnaissance et d'indemnisation.
Description rédigée par l'IA du Village

Si mieux vaut prévenir que guérir [1], et donc ne pas être exposé aux pesticides, ou à défaut l’être un minimum avec un maximum de protection, il n’en demeure pas moins qu’un nombre important de travailleurs ont développé des pathologies qui sont corrélées à leur exposition aux produits phytopharmaceutiques ; se pose alors la question de la reconnaissance de leur maladie professionnelle.

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Une maladie est qualifiée de « professionnelle » lorsqu’elle est la conséquence directe de l’exposition d’un travailleur à un risque physique, chimique, biologique ou qu’elle résulte des conditions de travail de ce dernier et que cette maladie figure dans un des tableaux du régime général ou agricole de la Sécurité sociale.

Deux cas de figure sont à distinguer, selon que la maladie est inscrite ou non au sein de l’un des tableaux des maladies professionnelles (Art. L. 461-1 à L. 461-8, R. 441-10 à R. 441-17 et R. 461-1 à R. 461-8 du code la sécurité sociale), lesquels sont en permanente évolution.

I. Le cas des maladies professionnelles inscrites aux tableaux.

Dans le secteur privé, lorsque la pathologie est inscrite dans l’un de ces tableaux, et à condition qu’elle ait été contractée dans les conditions précisées par ces derniers, elle peut faire l’objet d’une reconnaissance sans qu’un avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) ne soit sollicité.

La demande de reconnaissance peut être réalisée, à condition que le médecin traitant constate une détérioration de l’état de santé lié au travail, au moyen du formulaire CERFA n°16130*01 [2]. Ont ainsi été reconnus au titre des maladies professionnelles provoquées par les pesticides le cancer de la prostate en 2021 [3], la maladie de Parkinson en 2020 [4], le lymphome non-hodgkinien en 2019 [5].

Dans le secteur public, c’est l’agent qui effectue la déclaration au moyen du formulaire CERFA S6100 ; il doit alors adresser une demande d’imputabilité de sa maladie à son administration en mentionnant le lien de causalité entre la maladie et le service [6]. Si la maladie est inscrite aux tableaux professionnels, le demandeur bénéficie alors d’une présomption d’imputabilité [7].

La situation est, évidemment, plus délicate lorsque la maladie n’est pas inscrite aux tableaux, par exemple pour un myélome multiple [8], ou même lorsqu’elle a été contractée dans des conditions qui diffèrent de celles visées par ces dernières, car la procédure est plus exigeante.

II. Le cas des maladies professionnelles non-inscrites aux tableaux.

Dans le secteur privé, la reconnaissance de la maladie professionnelle est alors soumise à l’avis du CRRMP. Ce dernier dispose de quatre mois pour rendre son avis argumenté (plus deux mois supplémentaires lorsqu’un examen ou une enquête complémentaire est nécessaire).

Au terme de ce délai, deux situations peuvent se présenter, soit le CRRMP émet un avis favorable à la reconnaissance de la maladie professionnelle du salarié victime, soit il rend un avis défavorable. En tout état de cause, l’avis rendu lie la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Ainsi, si la maladie professionnelle est reconnue par le CRRMP, le salarié victime bénéficiera d’une indemnisation versée par la Sécurité sociale.

À l’inverse, si l’avis est négatif, il est possible de contester cette décision devant le pôle social du Tribunal judiciaire compétent afin d’obtenir la reconnaissance de la maladie professionnelle. Le Tribunal désignera alors, avant-dire droit, un second CRRMP autre que celui précédemment saisi afin de recueillir son avis (Art. R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale). A ce titre, il convient de souligner que si les avis émis par les CRRMP lient les CPAM, ce n’est pas le cas concernant les juridictions saisies, qui demeurent libres de prendre une décision contraire [9] y compris en présence de deux avis défavorables [10].

Dans le secteur public, l’agent ne bénéficie pas de la présomption d’imputabilité et devra apporter la preuve que sa maladie est directement ou essentiellement causée par son travail habituel, or il est parfois extrêmement difficile d’apporter une telle preuve. Par exemple, pour un jardinier de la ville de Paris qui a été exposé aux pesticides en 2007, le lien entre l’exposition et un myélome multiple n’a pas été reconnu [11].

En tout état de cause, les travailleurs ayant développé des pathologies à la suite de leur exposition aux pesticides peuvent légitimement demander à être indemnisés à ce titre.

Guillaume Cornu
Responsable contentieux
et Tristan Berger
Avocat à la Cour - Barreau de Paris
Docteur en droit

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[2Pour plus de détails sur la suite de la procédure, cf. : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F176)

[3Décret n° 2021-1724 du 20 décembre 2021 révisant et complétant les tableaux de maladies professionnelles annexés au livre VII du code rural et de la pêche maritime

[4Décret n° 2012-665 du 4 mai 2012 révisant et complétant les tableaux de maladies professionnelles annexés au livre VII du code rural et de la pêche maritime

[5Décret n° 2015-636 du 5 juin 2015 révisant et complétant les tableaux de maladies professionnelles annexés au livre VII du code rural et de la pêche maritime

[6Pour plus de détails sur la suite de la procédure, cf. : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R53534

[7CE, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 10/03/2006, n°267860 ; CE, 8ème sous-section jugeant seule, 06/10/2011, n°343350, Inédit au recueil Lebon

[8CA de Montpellier, 3ème ch. Soc., 25 janv. 2023, n°22/03332

[9Cass. Civ. 2ème, 12 février 2009, n° 08-14.637

[10CA Nancy, 29 mars 2022, n° 21/02416

[11TA de Paris, 2e section - 3e chambre, 6 octobre 2022, n° 2013934

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