Signature d’une rupture conventionnelle durant la période de pandémie de Coronavirus ?

Par Gauthier Chevalier, Avocat.

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Explorer : # rupture conventionnelle # covid-19 # homologation # chômage partiel

De nombreuses personnes se demandent si :
- elles peuvent signer une rupture conventionnelle malgré la période de confinement ; et
- la pandémie peut avoir une conséquence sur la rupture conventionnelle antérieurement signée et non encore homologuée ?
Article actualisé par son auteur le 27 avril 2020 [1].
Article vérifié par l’auteur en septembre 2023.

-

I) Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?

La rupture conventionnelle est un mode de rupture du contrat de travail dit amiable. Autrement dit, l’employeur et le salarié souhaitent tous deux rompre le contrat de travail.

Elle permet à l’employeur et au salarié de trouver une solution rapide et efficace, évitant aux deux parties des procédures judiciaires longues et coûteuses, et évitant au salarié de se retrouver dans l’obligation de démissionner et de perdre en partie ses droits au chômage [2].

L’article L1237-11 du code du travail définit la rupture conventionnelle comme suivant : « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties
 ».

II) Rupture conventionnelle et Covid-19.

a) Puis-je signer une rupture conventionnelle durant la période de confinement du Covid-19 ?

Juridiquement, il n’existe aucune restriction quant à la signature d’une rupture conventionnelle durant cette période délicate pour tous.

Les principales précautions à prendre sont sanitaires, avec l’organisation d’un entretien préalable par vidéoconférence, ainsi que l’organisation, en évitant tout risque, du rendez-vous de signature de la rupture conventionnelle.

Les parties peuvent convenir d’opter pour le chômage partiel dans un premier temps, afin d’attendre la fin du confinement pour signer, en personne, la rupture conventionnelle. Cela permettrait de respecter le confinement sans faire peser un poids supplémentaire sur l’entreprise, et sans léser le salarié.

b) La pandémie de coronavirus influence-t-elle l’homologation de ma rupture conventionnelle ?

Votre employeur a déjà transmis à l’administration (la Direccte) votre demande de rupture conventionnelle, et vous vous interrogez sur l’incidence de la pandémie actuelle ?

Si la signature de la rupture conventionnelle reste possible, une attention doit être portée sur le délai d’homologation.

Ainsi, si le délai d’homologation devait expirer avant le 12 mars 2020, la rupture conventionnelle est considérée comme homologuée.

Si le délai d’homologation n’a pas expiré au 12 mars 2020, il est alors suspendu, et reprendra un mois suivant le terme de l’état d’urgence sanitaire.

S’agissant des ruptures conventionnelles non-encore transmises à la Direccte, le point de départ du délai d’homologation sera reporté au jour suivant le délai d’un mois suivant le terme de l’état d’urgence sanitaire (fin de l’état sanitaire + un mois = point de départ du délai de 15 jours).

Le coronavirus n’impactera donc pas, en lui-même, la signature de la rupture conventionnelle, mais retardera son l’homologation.

Attention, certaines Direccte affirment être en mesure de procéder à l’homologation des ruptures conventionnelles transmises de préférence par internet, via le site : https://www.telerc.travail.gouv.fr.

Au regard de la difficile lecture de la politique gouvernementale, nous vous invitons à : 
1) Transmettre vos rupture conventionnelle via le portail suivant : https://www.telerc.travail.gouv.fr

2) Essayer de télécharger, au terme du délai d’homologation, le certificat d’homologation sur le site de la Direccte. Seul ce certificat permettra de vous assurer de la bonne homologation de votre rupture conventionnelle.
En l’absence de tout certificat, contactez la Direccte afin que cette dernière vous confirme la suspension du délai d’homologation.

Selon les éditions législatives, dans une brève de sa revue ActuEL RH du 8 avril 2020, le Gouvernement penserait à publier une disposition spécifique permettant le maintien des homologations des ruptures conventionnelles, autrement dit permettant de déroger à l’ordonnance n°2020-306, et ce dans le courant de la semaine prochaine, sous réserve des "arbitrages définitifs". La suspension des homologations n’aurait donc pas été initialement anticipée et voulue par le Gouvernement. À suivre.

Par une ordonnance du 15 avril 2020 (2020-427), le gouvernement est venu préciser la réglementation applicable aux ruptures conventionnelles durant cette période exceptionnelle (la réglementation découle de l’ordonnance du 25 mars 2020, n°2020-306).
Le délai de rétractation n’est pas impacté. Vous pouvez donc signer votre rupture conventionnelle et faire courir le délai de rétractation. L’article 2 de l’ordonnance du 15 avril précise cela : 
« Le présent article n’est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement ».

Le délai de rétraction est uniquement suspendu pour les personnes travaillant dans la fonction publique.
L’homologation, elle, reste pour le moment suspendue. Le gouvernement n’est donc pas encore revenu sur la suspension de l’homologation. Pour autant, et comme précisé, certaines Direccte continuent d’homologuer (Marseille, Hauts-de-Seine). La Direccte 75 (Paris) semble pour le moment avoir suspendu ses homologations.

Attention, le Gouvernement viendra éventuellement, par décret, exclure le délai d’homologation du champ d’application de cette ordonnance dans les prochains jours. Affaire à suivre.

Fin de la suspension des homologations ! Par un décret n°2020-471 du 24 avril 2020, le gouvernement est (Enfin) venu mettre fin à la suspension des homologations des ruptures conventionnelles. Les délais d’homologation qui avaient été suspendus à partir du 12 mars 2020 reprennent à partir du 26 avril 2020. Le délai ne repart pas à zéro, il reprend dans la situation dans laquelle il se trouvait au 12 mars 2020.

c) Comment se préparer pour « l’après-pandémie » ?

La sortie de la crise sanitaire, que l’on espère la plus protectrice possible, aura indéniablement des conséquences sur l’activité économique des sociétés.

Certaines fermeront, d’autres procéderont à des plans de licenciements économiques ou de départs volontaires, et d’autres rechercheront une solution plus adaptée à la taille ou au besoin, laquelle pourra être la rupture conventionnelle.

Les salariés doivent se préparer à l’éventualité d’une rupture du contrat de travail, et doivent, à ce titre, se protéger et se renseigner sur la rupture conventionnelle, et notamment :
- Sa fiscalité : Comment est imposée l’indemnité de rupture conventionnelle ? Par Gauthier Chevalier, Avocat.,
- Ses avantages et sa procédure : La rupture conventionnelle : ses avantages et sa procédure. Par Gauthier Chevalier, Avocat. ,
- Les cas d’ouverture : Quand peut-on demander une rupture conventionnelle ? Par Gauthier Chevalier, Avocat. .

L’anticipation est nécessaire, mais le bon respect des mesures de confinement est primordial, ainsi que le soin apporté à ses proches, amis et voisins. La vie et l’entraide priment.

Gauthier Chevalier,
Cabinet CHG-Avocat / Négociation - Rupture de contrat - Expatriation & Cadres Dirigeants
www.chg-avocat.com

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Notes de l'article:

[1Article à jour des ordonnances en date du 25 mars 2020 et des changements survenus depuis.

[2Nb : le Gouvernement a modifié et prévoit de continuer à modifier les conditions d’obtention du chômage.

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 15 avril 2020 à 08:51
    par santos olivier , Le 12 avril 2020 à 16:49

    Bonjour,
    Je suis Olivier SANTOS, j’ai 45 ans et je travail dans une société de dépannage automobile. Entré dans la société en tant que fouriériste le 19/09/2016, je suis devenu chef d’exploitation le 03/04/2018. Le 17 mars 2020, j’ai reçu une promesse d’embauche dans une autre société dans un autre secteur d’activité. Cette démission survient un an après ma prise de fonction, car pas été payé dans mes nouvelles fonctions car j’avais découvert que nous seulement mon employeur ne me payait pas de mes nouvelles fonctions, mais il avait embauché plusieurs personne avant la prise de fonction à un salaire supérieur au mieux. J’ai donc écrit une lettre de démission qui est parti au courrier en A/R le 20 mars 2020. Le 24 mars, le courrier est arrivé et la société à été avisé de ce recommandé, puis déposé au point relais le 26 mars. A ce-jour, mon chef d’entreprise n’a pas récupéré ce-courrier. Le 23 mars, je l’ai contacté pour l’aviser de ma démission et qu’un courrier en A/R devait arriver le 24 ou le 25 mars. Il m’a alors indiqué que vu la situation sanitaire personne n’ira chercher ce courrier. La semaine suivante, afin de préparé mon départ et afin de pouvoir transmettre au plus tôt des documents d’embauche à mon futur employeur, j’ai demandé par mail à la RH et au comptable plusieurs documents (contrat ; avenant au contrat suite changement de poste au 3 avril 2018 et quelques fiches de salaires détruit lors d’un incendie dans mon service) mais au lieu d’avoir une réponse de leur par, mon employeur m’a alors téléphoné et indiqué que m’a démission ne pouvait pas être prise en compte au vu de la situation actuelle (incendie de mon service et COVID 19) Cette semaine, j’ai reçu de la part d’un collègue (responsable d’exploitation du site temporaire de la fourrière) un protocole d’accord de démission ou il m’indique que je dois attendre la fin du confinement et refaire une lettre de démission et refaire le mois de préavis avant de pouvoir quitter l’entreprise, ce qui signifie, que si la fin du confinement se termine en fin d’année, je serais obliger de rester dans cette entreprise qui ne m’a pas payer de salaire de chef d’exploitation depuis deux ans, mais en plus, de perdre l’embauche. Ma question se porte sur cette légalité de fin de confinement ou puis-je partir légalement au terme de mon mois de préavis, soit le 20 avril 2020 ? En vous remerciant par avance pour votre aide, car j’ai téléphoné à l’inspection du travail, mais que personne ne décroche le téléphone. Cordialement. Olivier SANTOS (Besançon)

    • par Gauthier Chevalier , Le 15 avril 2020 à 08:51

      Cher Monsieur,

      La situation de pandémie ne peut aucunement vous empêcher de démissionner.

      Votre démission peut-être transmise par écrit ou par oral, et pas nécessairement en LRAR, sauf à ce que votre convention collective le prévoit.

      Je vous invite donc à transmettre un email à votre employeur en expliquant que vous avez transmis votre LRAR, que vous l’avez eu au téléphone, et que vous avez transmis un email aux RH. Cela constitue et démontre votre démission.
      Qu’au demeurant, le non-paiement d’une partie du salaire constitue une faute justifiant le cas échéant une résiliation judiciaire. Que vous quitterez donc votre poste à la date prévue, et que vous serez attentif à la transmission des documents légaux, outre les rappels de salaire.

      Pour le rappel de salaires, il vous faudra peut-être prendre un avocat à Besançon.

      Bien à vous
      Gauthier Chevalier
      Cabinet CHG-Avocat - Rupture Conventionnelle

  • Dernière réponse : 15 avril 2020 à 08:41
    par Louit , Le 12 avril 2020 à 16:54

    Bonjour Maître,

    Je suis en télétravail et Je souhaiterais démissionner car mon employeur me harcèle par téléphone, m’insulte de tous les noms, m’agresse verbalement et me hurle dessus comme ce n’est pas permis. J’en peux plus psychologiquement, j’en ai peur dès qu’il m’appelle. Travailler à distance n’est pas chose facile et deux fois plus difficile quand on a un employeur agressif. Quels sont vos conseils dans la situation que je vous expose ? Pour exemple une question que je me pose, peut on avoir droit aux indemnités chômage exceptionnellement après une démission pendant le confinement ?
    Je vous remercie d’avance de vos précieux conseils et de votre aide.
    Cordialement,

    • par Gauthier Chevalier , Le 15 avril 2020 à 08:41

      Chère Madame, Cher Monsieur,

      Je déplore cette délicate situation que vous traversez.

      Démissionner ne vous donnera malheureusement pas accès à l’assurance chômage, même en une telle période.

      Vous devriez dans un premier temps vous mettre en arrêt maladie, vous pouvez à ce titre faire une téléconsultation avec un médecin, et lui expliquer votre situation. Il serait intéressant que le médecin mentionne sur l’arrêt que votre état est lié aux conditions de travail.

      Ensuite, vous devriez expliquer la situation à votre employeur, et sollicitez le cas échéant une rupture conventionnelle. Le gouvernement devrait modifier son ordonnance aujourd’hui et autoriser l’homologation des ruptures conventionnelles.

      Bien sincèrement,
      Gauthier Chevalier
      Cabinet CHG AVOCAT - Rupture Conventionnelle

  • Bonjour la procédure à été lancé avant le covid 19 .
    Accepter à la dirrect à partir du 16 mars .
    Il me reste que les papiers à signé et le solde à récupéré et mon employeur m’informe que suite à la situation covid 19 il est dans l obligation de me payer le solde en trois mensualité.
    Que puis je faire ?

    • par Gauthier Chevalier , Le 13 avril 2020 à 10:54

      Chère Madame, Cher Monsieur,

      La rupture ayant été homologuée, votre employeur doit vous payer vos indemnités.
      Aucune raison ne justifie un paiement en trois fois, sauf évidemment une trésorerie amoindrie par la présente situation, ce qui pourrait se comprendre.

      Votre droit le plus stricte est un paiement immédiat en une fois. Maintenant, si votre employeur refuse, l’unique solution est de patienter.

      Envoyez un email en rappelant vos droits, et faisant preuve de compréhension et en invitant à un paiement plus rapide (en deux mensualités par exemple)

      Bien à vous
      Gauthier Chevalier
      Cabient CHG Avocat - Rupture Conventionnelle

  • par Elimam , Le 10 avril 2020 à 22:50

    Bonjour maître,

    Je dois signer une rupture conventionnelle le 16 Avril 2020 dont j avais déjà demandé depuis le 19 février mais mon employeur a laissé traîner les choses.
    On me propose une signature le 16 avril mais pour un départ au 31 juillet ce dont je refuse, car ils s evoquent les mesures gouvernementales et que les ruptures sont gelées jusqu’au 24 juin. Pouvez vous m aider.
    Cordialement Nadia

  • par David , Le 9 avril 2020 à 18:29

    Bonjour Maitre,

    J’ai signé une rupture conventionnelle le 19 mars pour une fin de contrat le 26 avril. Quand vous parlez de report d’homologation, cela reporte la date de fin de contrat ou si c’est homologué plus tard ce n’est pas grave.
    En cas de refus d’homologation tardive, comment ça se passera.

    Merci

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