Le paiement du salaire est la contrepartie du travail fournit par le salarié. Si le salaire est fixé librement entre le salarié et son employeur, il doit cependant respecter certains minima, qu’ils soient réglementaires ou conventionnels et surtout le salaire doit être réglé régulièrement.
A défaut de paiement régulier du salaire, le salarié a tout un arsenal juridique à sa disposition pour faire respecter ses droits, y compris en cas de défaillance de l’entreprise.
La libre fixation du salaire entre les parties
Si le salaire est en principe librement fixé entre le salarié et l’employeur, il existe cependant dans notre droit un certain nombre de planchers en-dessous desquels l’employeur ne peut aller.
Le SMIC
Le SMIC, acronyme de Salaire Minimum interprofessionnel de Croissance, qui est applicable sur l’ensemble du territoire métropolitain ainsi que dans les Départements d’Outre-Mer et à Saint-Pierre et Miquelon est fixé par décret. [1]
Le SMIC est le salaire minimum horaire. Il est applicable à tous les salariés, dès lors qu’ils sont âgés de 18 ans révolus.
Par contre, un abattement s’applique pour les apprentis et les titulaires de contrat de professionnalisation.
Un salaire minimum spécifique s’applique aux travailleurs à domicile et aux assistants maternels.
Enfin, des dispositions spécifiques s’appliquent au secteur agricole et marin ainsi qu’aux professions dans lesquelles l’usage veut qu’une partie du salaire soit réglé pour partie en nourriture et en logement.
Pour mémoire le SMIC horaire est de 9,53 euros au 1er janvier 2014 et sera de 9,61 euros au 1er janvier 2015
Le salaire minimum conventionnel
Le SMIC n’est cependant pas le seul plancher en matière de salaire, le second plancher en dessous duquel il n’est pas possible de descendre est la grille des salaires de la Convention Collective applicable.
Il convient de rappeler que les minima imposés par les conventions collectives sont en réalité des grilles de salaires dont les montants sont négociés entre les partenaires sociaux et le sont en fonction de divers critères dont les fonctions occupées, la formation ou l’ancienneté acquise par le salarié.
Il convient néanmoins de préciser que l’employeur peut s’écarter du mode de fixation du salaire par la convention collective dès lors que le système adopté ne soit pas globalement défavorable au salarié. [2]
D’autre part, il faut savoir que l’augmentation des minima conventionnels ne s’applique pas aux salariés dont le salaire réel est au-delà de ces minima, sauf stipulation contraire de la convention collective. [3]
Le salaire prévu par le contrat de travail
La remarque peut sembler superfétatoire, mais il convient de rappeler que le contrat de travail, s’il est géré par le code du travail, relève néanmoins, pour toutes les questions qui ne sont pas réglées par le code du travail, par les dispositions de l’article 1134 du Code civil.
Il existe également divers accessoires au salaire qui sont par exemple la fourniture de nourriture, d’un logement ou d’un véhicule et qui doivent être pris en compte dans l’évaluation du salaire.
La valeur des avantages en nature, à défaut d’indications données dans la convention collective, est évaluée par la loi, par référence au minimum garanti (à ne pas confondre avec le SMIC).
Le paiement du salaire
Le paiement du salaire, contrepartie obligatoire du travail
Le salaire est la contrepartie obligatoire du travail. Il en résulte que l’employeur ne peut se libérer de son obligation contractuelle en matière de salaire par l’octroi d’avantages non prévus au contrat. [4]
Par ailleurs, l’employeur n’est pas tenu de verser le salaire lorsque le travail, contrepartie dudit salaire n’a pas été effectué, en cas d’absence par exemple ou en cas de grève.
Néanmoins toutes les absences ne donnent pas lieu à des retenues de salaires.
En effet, les absences pour maladies ou accident, professionnels ou non, sont, sous certaines conditions rémunérées, voire font l’objet d’un maintien de salaire. Quant-aux congés payés, comme leurs noms l’indiquent, il s’agit d’absences intégralement rémunérées permettant aux salariés de prendre du repos.
Par contre, le salaire étant la contrepartie du travail, lorsque le salarié n’a pas effectué ce travail (absences autres que congés payés,...) le salaire n’est pas dû.
Pour les salariés payés au mois, la retenue doit tenir compte du salaire horaire réel. [5]
La retenue de salaire doit être strictement proportionnelle au temps d’absence. Ainsi, la retenue de deux heures de salaire pour une heure de grève constitue une sanction pécuniaire prohibée par l’article L. 122-42 du Code du travail. [6]
Il convient également de souligner que le salaire étant la contrepartie du travail, l’employeur peut contraindre le salarié à rembourser le salaire indûment perçu alors qu’il n’avait pas travaillé. [7]
Le paiement du salaire peut également se faire, sous réserve de l’accord du salarié, au moyen de devises étrangères lorsque le contrat de travail de droit français s’exécute à l’étranger. [8]
Enfin, par deux arrêts de mai 2007, la Haute Cour a décidé que l’employeur ne pouvait pas s’acquitter de son obligation de paiement de tout ou partie du salaire sous forme de versement au plan d’épargne d’entreprise. [9]
Le mode de paiement
Le paiement peut se faire en espèces, par chèque barré ou par virement.
Néanmoins, il convient de souligner que le paiement en espèces n’est autorisé que pour des sommes inférieures à 1500 euros.
Lorsque le montant du salaire est fixé en devises étrangère, et en l’absence de stipulations différentes dans le contrat, la conversion en monnaie nationale se fait au cours du change officiel au jour du paiement. [10]
La date du paiement et sa périodicité
Contrairement à une légende urbaine fort répandue chez les non juristes, la date limite du versement du salaire n’est pas le 11 du mois suivant.
Les règles suivantes s’appliquent.
L’employeur doit verser le salaire sur le lieu du travail et pendant les heures de travail. Bien entendu cette règle ne s’applique pas en cas de virement bancaire. [11]
Il doit simplement respecter la périodicité de la paie.
La rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois. [12]
Quatre catégories de salariés sont exclues de la mensualisation : les travailleurs à domicile ; les travailleurs temporaires ; les travailleurs saisonniers et les travailleurs intermittents. [13]
La rémunération d’un salarié mensualisé a un caractère forfaitaire, elle est indépendante du calendrier, du nombre de jours travaillés dans le mois et du nombre de jours ouvrés. [14]
En cas d’accord de mensualisation, c’est-à-dire dans la très grande majorité des cas, la périodicité du versement de salaire est de 30 jours. En d’autres termes, il ne peut pas s’écouler plus de 30 jours entre deux versements du salaire.
Néanmoins sur demande du salarié, un acompte correspondant à, pour une quinzaine, de la moitié de la rémunération doit être réglée.
En cas d’absence d’accord de mensualisation, le salaire doit être versé au moins deux fois par mois, à 16 jours au plus d’intervalle, et au moins tous les trois mois concernant les commissions dues aux voyageurs représentants placiers. [15]
Dès lors que les dispositions du code du travail sont d’ordre public, il est illégal de convenir de rémunération différée avec le salarié, même en cas d’accord de ce dernier.
Le salaire est quérable et non portable. Le salarié ne peut exiger de recevoir son salaire par courrier à son domicile. L’employeur ne peut être condamné au paiement d’intérêts de retard si le salaire a été tenu à la disposition du salarié. [16]
Les recours en l’absence de paiement du salaire
La prise d’acte de rupture
Le non-paiement de tout ou partie des salaires est considéré comme un manquement grave à ses obligations contractuelles de la part de l’employeur.
Lorsque le salarié prend acte de la rupture dans le cas où l’employeur effectue le paiement du salaire avec retard, la rupture est imputable à l’employeur. [17]
De surcroît si le retard de paiement est dû à la mauvaise foi de l’employeur, le salarié subit un préjudice indépendant des intérêts moratoires dont ils ont souverainement fixé le montant. [18]
Le non-paiement intégral des salaires peut lui aussi justifier une prise d’acte de rupture de la part du salarié. [19]
L’absence de paiement du salaire justifie lui aussi une prise d’acte de rupture. [20]
En d’autres termes, le défaut de paiement de salaires, lorsque le salarié en prend acte par une prise d’acte de rupture, va s’analyser comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes les conséquences de droit que comporte une telle décision lorsqu’elle vient qualifier la nature de la rupture du contrat de travail.
Néanmoins, dans certaines espèces très précises, la Haute Cour en décide différemment.
Ainsi la Haute Cour a-t-elle jugé que la carence de courte durée ne justifiait pas la prise d’acte de rupture par les salariés alors qu’était mise en place la garantie des créances salariales du fait de l’insolvabilité de l’employeur et que c’est à tort que ces derniers ont procédé à une prise d’acte de rupture. [21]
L’assignation devant le conseil des prud’hommes
Le salarié qui est victime de salaires impayés peut également saisir le conseil des prud’hommes, soit par la voie des référés, soit par une demande sur le fond.
La façon la plus rapide d’obtenir une condamnation de l’employeur à verser les salaires est la saisine de la formation de référé du Conseil des Prud’hommes.
Ce dernier, en matière de salaires impayés va condamner l’employeur, le plus souvent sous astreinte à régler avec effet immédiat les salaires impayés.
Cependant la formation des référés ne peut condamner à des dommages et intérêts ; aussi si le salarié souhaite obtenir des dommages intérêts, il lui faut saisir le conseil des prud’hommes sur le fond.
Dès lors que les procédures sur le fond peuvent s’avérer lentes, le code du travail offre la possibilité au salarié de demander que le bureau de conciliation lui accorde une provision du montant des salaires impayés. Cette décision permettra au salarié d’obtenir de suite les salaires impayés en attendant que la juridiction se prononce sur les dommages et intérêts demandés ainsi que sur l’éventuelle résolution judiciaire du contrat si cette dernière fait partie des chefs de demande.
La prescription des salaires
Les délais de prescription
L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. [22]
Le délai de prescription court à compter du jour où le salarié prend connaissance de l’existence et du montant des sommes qui lui sont dues. En conséquence, l’action exercée par une salariée le 15 janvier 2003 pour le paiement de sommes dues au titre des exercices 1995 et 1996, mais dont elle n’a eu connaissance qu’à compter du 31 août 1998 n’est pas prescrite. [23]
Les sommes versées par l’employeur au titre de l’indemnité compensatrice de préavis sont des substituts de salaires. Elles ont à ce titre la nature d’un salaire et sont soumises à prescription quinquennale (triennale depuis juin 2013). [24]
La prime d’ancienneté a un caractère salarial, elle est donc soumise à la prescription quinquennale (triennale depuis juin 2013). [25]
Par contre, Il convient de souligner que la prescription ne court pas lorsque la créance dépend d’éléments qui ne sont pas connus du créancier. [26]
L’acte interruptif de prescription
Il convient de rappeler que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. [27]
Par ailleurs, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription. [28]
Néanmoins le dépôt d’une demande au secrétariat du conseil de prud’hommes ne produit pas, à lui seul, les effets d’une citation ; en effet, sauf dispositions contraires, c’est la convocation qui vaut citation, laquelle interrompt la prescription. [29]
Discussions en cours :
bonjour,
Article R1455-7
Dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
le fait d’écrire alors "Cependant la formation des référés ne peut condamner à des dommages et intérêts ; aussi si le salarié souhaite obtenir des dommages intérêts, il lui faut saisir le conseil des prud’hommes sur le fond." constitue, même pour les juristes, une légende urbaine. En effet, la formation des référés dispose des pouvoir pour accorder des provisions sur dommages et intérêts, notamment en cas de non paiement du salaire mais aussi pour d’autres motifs lorsque le fait cause à autrui un préjudice évident et incontestable.
"Attendu que pour débouter la société Intel corporation de sa demande en paiement d’une somme à titre de provision sur dommages-intérêts pour manquement du salarié à son obligation de confidentialité, l’arrêt retient qu’en présence d’une contestation sérieuse, il n’appartient pas au juge des référés de statuer sur une demande en paiement de réparations, l’évaluation du préjudice relevant de la compétence de juge du fond ;
Qu’en se déterminant ainsi, alors que les pouvoirs du juge du fond n’excluent pas ceux du juge des référés pour allouer une provision sur dommages et intérêts, la cour d’appel, qui a procédé par de simples affirmations quant au caractère sérieusement contestable de l’existence de l’obligation, n’a pas donné de base légale à sa décision"
Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 12 février 2014
N° de pourvoi : 11-27899
Cher Monsieur
comme la cour le dit si bien, il s’agit d’une provision pour dommages et interêts et non d’une condamnation pour dommages et interêts ;
je comprends que la nuance vous échappe, mais ce n’est pas la même chose. Mais je ne peux, dans un article juridique laisser passer une telle erreur
Comme le dit la Cour il s’agit bien d’une demande de provision et non d’une condamnation. "
Qu’en se déterminant ainsi, alors que les pouvoirs du juge du fond n’excluent pas ceux du juge des référés pour allouer une provision sur dommages et intérêts"
Une provision sur D&I n’est pas une condamnation, le régime juridique est différent.
Donc à ne pas confondre
Le juge du fond peut revenir sur une provision, même si c’est rare, alors qu’il ne peut pas revenir sur une condamnation, qui elle ne peut êter modifiée que par une instance d’appel.
En pratique, vous avez une provision, vous faites exécuter, l’huissier vous verse les fonds.
Le juge du fond, déjuge, vous remboursez.
Si c’est uen codnamantion à des dommages-interêts, vous récupérer vos fonds s’il y a uen exécution provisoire, et on ne peut vous demander de les rembourser, sauf si la partie adverse fait appel ;
Bref si 15 000 euros au titre de dommage et interêts et 15 000 euros au titre de provision sur dommages interêts, sont bien tous les deux 15 000 euros sauf que leur régime juridique n’est pas le même.
votre juriprudence ne fait que confirmer ce que j’écris.
CDLT
C.NEUBAUER
je viens de m’apercevoir que j’ai confirmé le message qui comportait des fautes de frappe. je suis désolée. Je présume que chacun a rectifé de lui-même
Avec mes excuses
Le salaire est querable au lieu convenu (lieu de travail ou siège de l’entreprise) mais généralement il est versé sur un compte de l’employé ou salarié.
Que se passe t-il en cas de retard de paiement excessif dû aux services banquaires de l’employeur ou d’erreur de compte ou autre commise par l’employeur ?
Est ce que le lieu du paiement quérable ne devient pas la banque de l’employé ?