« - Combien je risque, Maître ? »
5 ans.
« - Quoi ? 5 ans de prison pour un Prud’hommes ! »
Non, 5 ans de salaire ; si vous perdez, vous risquez - au minimum - de payer à votre salarié une somme, toutes indemnités confondues, correspondant à 5 années de salaire brut.
« - Comment est-ce possible ; toutes les heures travaillées lui ont été payées, il n’a pas été licencié et son ancienneté atteint à peine 10 ans ? »
Je vous explique.
Votre employé, embauché à temps partiel pour une durée hebdomadaire de 21 heures (3/5ème), a saisi le Conseil de Prud’hommes pour solliciter la requalification à temps complet.
Selon la jurisprudence, cette requalification est acquise si les conditions d’emploi du salarié l’ont obligé à se tenir à la disposition permanente de l’employeur.
Dans cette hypothèse, vous serez condamné à une première « peine plancher » consistant en un rappel de rémunération sur 5 ans. Mécaniquement, vous devrez verser dans cette affaire 44 mois de salaire (S) [40 mois (S x 2/3 x 60) + 4 mois au titre des congés payés en incidence].
De plus, vous serez également condamné - automatiquement - à une autre sanction si le salarié demande aux juges de prononcer la résolution du contrat de travail. En effet, la juridiction n’aura d’autre solution que de rompre le contrat aux torts de l’entreprise puisque celle-ci a manqué à l’obligation essentielle de rémunérer le temps pendant lequel le salarié a été contraint d’être disponible.
Sur la base des mêmes faits, vous subirez donc une deuxième peine, elle aussi « incompressible ».
En l’occurrence, les indemnités minimales de rupture s’établiront ainsi (pour un non cadre dans une entreprise de plus de 10 salariés) :
a) indemnité compensatrice de préavis : 3,66 mois de salaire[3,33 mois (S x 5/3 x 2) + 0,33 mois de congés payés] ;
b) indemnité légale de licenciement : équivalant à 3,33 mois (S x 5/3 x 1/5ème x 10) ;
c) dommages et intérêts : équivalant à 10 mois (S x 5/3 x 6).
Soit un total correspondant à 61 mois de salaire.
Mais il y a des salariés plus gourmands.
J’ai une affaire en cours dans laquelle l’avocat a sollicité pour son client, toutes indemnités confondues, ...46 ans de salaire.
Qui dit mieux ?
Patrick LAURENT, Avocat au Barreau de Paris