I. Les causes du divorce.
Il est à noter que plusieurs facteurs peuvent conduire à la dissolution du mariage civil. Ces facteurs s’apprécieront selon qu’il s’agisse d’un divorce par consentement mutuel (A) ou d’un divorce pour faute (B).
A. Le divorce par consentement mutuel.
En vertu de l’article 2 de la loi n °2022-793 du 13 octobre 2022 relative au divorce et a la séparation de corps,
« le divorce par consentement mutuel a lieu sur demande conjointe des époux après au moins deux (2) ans de mariage. La demande en divorce par consentement mutuel n’a pas à être motivée ».
Cet article mentionne que le divorce par consentement mutuel est une procédure amiable de dissolution du mariage, ne nécessitant pas l’invocation de causes spécifiques ou de fautes de l’un des époux. C’est une procédure conduite selon la convenance personnelle des époux. Il est le plus souvent le résultat d’une prise de conscience commune des époux que leur mariage ne répond plus à leurs attentes ou besoins respectifs, et qu’une séparation à l’amiable est la solution la plus raisonnable.
Il en va autrement du divorce pour faute.
B. Le divorce pour faute.
Le divorce pour faute est régi par l’article 14 de la loi n °2022-793 du 13 octobre 2022 relative au divorce et a la séparation de corps. Il ressort de cet article que
« le divorce pour faute peut être prononcé, à la demande de l’un des époux pour l’une des causes suivantes, lorsque celle-ci rend intolérable le maintien du lien conjugal ou de commune : 1°) adultère de l’autre époux ; 2°) condamnation de l’autre époux pour des faits portant atteinte à l’honneur et à la considération ; 3°) abandon de famille ou de domicile conjugal par l’autre époux ; 4°) mauvais traitements, excès, sévices ou injures graves ».
Au vu des termes de cet article, la loi mentionne deux éléments intrinsèquement liés. En effet, pour que le juge prononce le divorce pour faute, il faille d’abord la survenance d’un comportement fautif qui viole les obligations essentielles du mariage comme : l’adultère, la condamnation pour des faits portant atteinte à l’honneur, l’abandon de la famille ou du domicile conjugal, et les mauvais traitements, excès, sévices ou injures graves, constituant une violation grave des devoirs du mariage.
Il faut que ce comportement fautif rendre intolérable la continuation du mariage. Ce n’est pas simplement la faute elle-même qui justifie le divorce, mais le fait que cette faute crée une situation insupportable pour l’époux victime, rendant impossible la poursuite de la vie conjugale. La partie qui invoque la faute doit en apporter des preuves suffisamment convaincantes. Il peut faire appel à des témoins, y compris les parents, en vertu du principe de la liberté de preuve de la faute évoquée. Toutefois, les enfants des époux et leurs domestiques ne peuvent pas être entendus comme témoins.
Il est important de préciser que les situations prévues à l’article 4 de la loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 relative au mariage ne sont pas des fautes reconnues comme des causes de divorce. Ces situations relèvent uniquement de l’annulation du mariage, pas du divorce pour faute.
Le divorce pour faute intervient lorsque l’un des époux a commis une violation grave des devoirs du mariage (comme l’infidélité ou l’abandon du domicile conjugal). En revanche, l’annulation du mariage intervient lorsque le mariage est considéré comme juridiquement nul en raison de vices de consentement ou d’autres irrégularités survenues lors de sa formation, ce qui rend le mariage nul et non avenu dès le départ.
II. Les conséquences du divorce.
Le divorce produit des effets tant chez les époux (A), que chez les enfants (B).
A. Les conséquences à l’égard des époux.
1. Les conséquences non pécuniaires.
A l’égard des époux, le divorce produit plusieurs effets dont :
- La dissolution du mariage. En effet une fois prononcé, le divorce dissous le mariage. En conséquence il est mis fin aux devoirs réciproques des époux et au régime matrimonial (article 39). Cette dissolution entraine également la rupture des liens d’alliance qui unissent chaque époux à la famille de son conjoint. Dès lors, il n’y a plus d’obligation alimentaire entre un époux et ses anciens beaux-parents. La perte par la femme de l’usage du nom de son ex-mari. Le divorce conduit systématiquement à faire perdre à la femme l’usage du nom de son ex mari. Toutefois, elle peut conserver l’usage du nom du mari avec son accord ou sur autorisation du juge, si elle justifie d’un intérêt particulier pour elle-même ou pour les enfants (article 40).
- La perte du conjoint étranger de la nationalité si le mariage a duré moins de dix ans et les stipulations faites par les parties dans la convention homologuée par le juge s’imposent à elles (effets propres au divorce par consentement mutuel, article 11 et 12).
- La possibilité de contracter nouveau mariage : après le divorce, les époux peuvent se remarier. Mais il peut arriver que les époux se réunissent. Dans ce cas une nouvelle célébration du mariage est nécessaire. La femme divorcée peut se remarier immédiatement après que le jugement ou l’arrêt de divorce devient irrévocable, sous certaines conditions, notamment le respect d’un délai de 300 jours depuis la décision autorisant la résidence séparée ou l’irrévocabilité du jugement de divorce. Cependant, elle peut faire abréger ce délai par le Président du tribunal du lieu de son domicile en faisant la preuve qu’elle n’a pas cohabité avec son précédent mari depuis 300 jours, et qu’elle n’est pas en état de grossesse. (article 41).
- Le domicile conjugal. La loi ivoirienne ne prévoit aucune disposition à cet effet. Dans l’hypothèse où le domicile conjugal est détenu par location conclu par les deux époux, les époux d’un commun accord peuvent décider du maintien du bail au profit de celui qui a la garde des enfants. En cas de désaccord des époux ou lorsque le bail n’a été conclu que par un seul, le juge pourra l’attribuer d’office à celui des deux qui a la garde des enfants. Lorsque le domicile familial est détenu à titre de propriété par les deux époux ou par un seul : dans ce cas, le juge n’a aucun pouvoir pour imposer un bail forcé du logement familial. L’époux propriétaire est maintenu dans le domicile.
L’autre époux peut solliciter une aide au logement et une pension alimentaire s’il lui au reconnu la garde de l’enfant.
2. Les conséquences pécuniaires du divorce.
Les conséquences pécuniaires comprennent :
- Le paiement d’une pension alimentaire à l’époux ayant obtenu la dissolution du mariage : si l’époux qui a obtenu le divorce n’a pas assez de ressources pour subvenir à ses besoins, le tribunal peut ordonner à l’époux qui a perdu le divorce (celui qui a été jugé en tort) de verser une pension alimentaire pour l’aider financièrement. Dans le cas d’un divorce aux torts partagés, où les deux époux sont considérés en faute, le tribunal peut toujours accorder une pension alimentaire à l’un des époux si les avantages consentis par les époux ne suffisent pas pour assurer la subsistance de celui qui en a besoin. Le tribunal évaluera les ressources et les besoins des deux parties pour décider si une pension est nécessaire et, si oui, à quel montant. Toutefois, cette pension ne peut pas aller au-delà du quart du revenu de l’autre époux et est payée sur ses propres biens ou revenus. Le tribunal peut fixer un terme au paiement de la pension en fonction des circonstances (remariage de l’époux bénéficiaire, amélioration de la situation financière du bénéficiaire, dégradation de la situation financière du débiteur, indépendance financière du bénéficiaire, accord entre les parties, etc.) Le tribunal peut adapter la durée et le montant de la pension alimentaire en fonction des évolutions dans la vie des deux époux (article 42).
- Le maintien des avantages entre les époux (Article 43) : le divorce n’affecte pas les avantages que les époux se sont consentis. Toutefois, les avantages qui ne prennent effet qu’au décès de l’un des conjoints sont révoqués de plein droit par le divorce, sauf volonté contraire de l’époux qui les a consentis.
- Le paiement de dommages et intérêts : en cas de divorce prononcé aux torts exclusifs de l’un des époux, le tribunal peut accorder, à la demande de l’époux qui a obtenu le divorce, des dommages et intérêts pour le préjudice matériel ou moral causé par la dissolution du mariage (Article 44).
- Dans un régime de communauté de bien, le divorce entraine : la dissolution de la communauté de biens (article 11 de la loi relative au divorce et article 87 du Code Civil I, loi n°570 de 2019 sur le mariage). Chaque époux reprend ses biens propres, et les biens communs sont partagés. Une liquidation des intérêts est effectuée pour déterminer les récompenses dues à l’un ou l’autre époux (articles 90-92 du Code du mariage). Les dettes contractées pour le ménage sont partagées entre les époux. Celles contractées individuellement pour des besoins personnels sont à la charge de l’époux concerné (articles 76-79 du Code du mariage). Si un époux s’est enrichi au détriment des biens communs ou des biens propres de l’autre, une indemnité peut être accordée (article 80).
- Dans un régime de séparation de bien, en cas de divorce, il n’y a pas de partage des biens sauf pour ceux acquis en indivision (articles 98-100 Code mariage). En matière de divorce, l’indivision se réfère généralement à des biens que les époux ont acquis ensemble ou à des biens pour lesquels ils n’ont pas pu prouver la propriété exclusive de l’un ou l’autre. Il peut s’agir d’un bien Immobilier, d’un compte bancaire commun, d’un bien meuble, d’une entreprise commune... en cas de divorce, les biens en indivision doivent être partagés. Cela peut se faire par attribution d’un bien spécifique à l’un des époux (compenser l’autre époux par d’autres biens ou par paiement d’une somme d’argent), par vente et partage du produit de vente, ou même les époux divorcés peuvent choisir de maintenir le bien en indivision. Chaque époux demeure seul tenu des dettes contractées à son propre nom, que celles-ci aient été engagées avant ou pendant le mariage. Toutefois, les dettes afférentes aux charges du ménage, c’est-à-dire les obligations financières liées à l’entretien du foyer et à l’éducation des enfants, sont considérées comme ayant été contractées dans l’intérêt commun. En conséquence, ces dettes doivent être prises en compte dans l’évaluation des contributions financières respectives des époux lors de la liquidation des intérêts pécuniaires consécutifs au divorce (article 98 code du mariage).
- Les époux partagent à parts égales les dépens.
B. Les conséquences du divorce à l’égard des enfants.
A l’égard des enfants, le divorce laisse subsister les droits et obligations des parents divorcés. Ils sont ténus de subvenir aux besoins quotidiens des enfants chacun selon leurs facultés. Après une enquête sociale, le juge confie la garde juridique des enfants à l’un des deux époux en tenant compte de l’intérêt des enfants. Et si l’intérêt de l’enfant l’exige, la garde peut être confiée à un tiers (personne physique ou morale) autre que les époux, tout en laissant demeurer les droits et obligations des époux (article 45-47 la loi n °2022-793 du 13 octobre 2022 relative au divorce et a la séparation de corps).
Mot de la fin :
Le divorce en tant que dissolution légale du mariage, est fortement réglementé par la loi n °2022-793 du 13 octobre 2022 relative au divorce et a la séparation de corps, encadrant ainsi ses causes, sa procédure et ses conséquences. Chaque étape est minutieusement régulée pour protéger les intérêts des parties, en particulier ceux des enfants mineurs.
Toutefois, il est essentiel de rappeler l’adage ivoirien qui dit « on ne se marie
pas pour divorcer ». Ce proverbe souligne l’importance pour les futurs époux de bien se connaître avant de s’engager dans le mariage. En effet, le divorce, loin d’être une simple formalité, entraîne des conséquences souvent douloureuses, tant sur le plan émotionnel que sur le plan matériel. Il est donc crucial de bien réfléchir et de se préparer avant de franchir le pas du mariage, afin d’éviter les épreuves difficiles que peut engendrer une séparation.