1. Définition et champ d’application du contrat de contenus numériques et services numériques.
Ce nouveau contrat recouvre toute opération entre un professionnel et un consommateur et ayant pour objet la fourniture :
D’un contenu numérique, défini comme « des données produites et fournies sous forme numérique » [2] ;
D’un service numérique, défini comme « un service permettant au consommateur de créer, de traiter ou de stocker des données sous forme numérique ou d’y accéder, ou un service permettant le partage ou toute autre interaction avec des données sous forme numérique qui sont téléversées ou créées par le consommateur ou d’autres utilisateurs de ce service » [3].
On trouve notamment au rang de ces contenus et services numériques : les applications mobiles, les réseaux sociaux, ou encore les plateformes de streaming audio ou vidéo.
La « fourniture » s’entend non seulement de la vente moyennant le paiement d’un prix par le consommateur, mais également de la fourniture en contrepartie de laquelle n’est pas versé un prix, mais un avantage de toute nature procuré par le consommateur au professionnel. L’ordonnance prend la peine de rappeler qu’il s’agit là d’une autre forme d’un contrat à titre onéreux.
Exemple d’un tel avantage : en contrepartie de la fourniture d’une application mobile gratuite, le visionnage obligatoire de publicités par l’utilisateur générera des revenus publicitaires pour l’éditeur de l’application.
La nature de cet avantage devra faire l’objet d’une clause informative dans les conditions générales B2C du professionnel, selon des modalités fixées par décret à paraître [4].
L’article L224-25-3 du Code de la consommation s’applique à énoncer des inclusions et exclusions du champ d’application de ce nouveau contrat. Ainsi :
Sont explicitement inclus les contenus ou services numériques constituant un dispositif médical que les consommateurs peuvent obtenir sans l’intervention d’un professionnel de la santé (Directive UE 2019/770) ;
Sont en revanche explicitement exclus certains contenus et services dans les secteurs de la communication électronique, des soins de santé fournis par les professionnels de santé, des jeux d’argent et de hasard, des services financiers ou encore des logiciels Open Source ;
A noter que sont également exclus les contenus et services délivrés par une autorité publique.
Il convient enfin de préciser que ce nouveau type de contrat est à ne pas confondre avec le contrat de fourniture d’un bien comportant des éléments numériques, lequel est défini comme portant sur « tout bien meuble corporel qui intègre un contenu numérique ou un service numérique ou qui est interconnecté avec un tel contenu ou un tel service, de manière telle que l’absence de ce contenu numérique ou de ce service numérique empêcherait le bien de remplir ses fonctions ». Le régime décrit ci-après ne s’y applique pas, mais il bénéficie du nouveau régime légal de conformité instauré par la même ordonnance, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2022.
2. Formation du contrat et informations précontractuelles.
Les dispositions nouvelles, codifiées à l’article L224-25-5 du Code de la consommation, instaurent tout d’abord un certain nombre de mentions obligatoires spécifiques au contrat de fourniture de contenus numériques et services numériques.
Il s’agit de :
l’identité et les coordonnées du professionnel,
la nature de l’avantage consenti par le consommateur au lieu ou en complément du prix,
la durée du contrat,
les conditions de renouvellement et d’interruption du service,
les frais éventuels en cas de résiliation anticipée du contrat,
les données à caractère personnel nécessaires pour la fourniture des contenus ou des services numériques ou recueillies dans le cadre de cette fourniture,
le type de mesure qu’est susceptible de prendre un professionnel pour réagir à un incident de sécurité ou pour faire face à des menaces ou à des situations de vulnérabilité,
les produits et services conçus pour les personnes handicapées.
L’ordonnance apporte également des précisions sur les modalités de fourniture des informations précontractuelles. Aussi, celles-ci devront être fournies au consommateur d’une manière claire et compréhensible, sur un support durable ou, lorsqu’il n’est pas possible de communiquer ces informations sur un support durable, dans un document facilement téléchargeable mis à disposition par le professionnel, qui doit alors attirer expressément l’attention du consommateur sur l’intérêt qu’il a à le lire, le télécharger et le conserver.
3. Règles relatives à la durée du contrat.
Le contrat ne peut contenir une clause imposant une durée de plus de 24 mois à compter de sa conclusion, ou à compter de la dernière modification du contrat au cours de la vie de celui-ci [5]. En d’autres termes, le professionnel ne pourra faire repartir à zéro le délai de 24 mois en modifiant le contrat ou le service.
S’agissant des contrats à durée indéterminée, le consommateur devra pouvoir résilier sans préavis, ou avec un préavis n’excédant pas 10 jours à compter de la réception par le professionnel de la demande de résiliation [6], sauf demande contraire du consommateur.
4. Précisions sur l’obligation de délivrance.
L’obligation principale pesant sur le professionnel est de s’acquitter de son obligation de rendre disponible ou accessible le contenu ou service pour le consommateur, en tout lieu physique ou virtuel choisi par ce dernier [7]. En cela, peu importe que le consommateur accède et/ou télécharge effectivement le contenu ou service, pourvu qu’aucune action du professionnel ne soit plus nécessaire pour rendre disponible celui-ci.
En cas d’inexécution de l’obligation de délivrance par le professionnel, le consommateur dispose d’un choix [8]. Il peut :
soit notifier au professionnel la suspension du paiement du prix jusqu’à reprise d’exécution du contrat ;
soit résoudre le contrat, après mise en demeure laissant un délai suffisant et convenu entre les parties (!), sans formalisme particulier prescrit.