La responsabilité du vendeur-constructeur en cas de travaux de rénovation énergétique.

Par Grégory Rouland, Avocat.

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Explorer : # vices cachés # rénovation énergétique # responsabilité du vendeur # isolation thermique

Toute personne qui entreprend par lui-même des travaux dans sa maison d’habitation, qu’elle soit professionnelle ou non, est tenue aux garanties légales qui découlent des actes de construction d’un ouvrage ;

C’est ce qu’un arrêt du 02 juin 2014 [1] de la Cour d’appel de Toulouse est venu rappeler.

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Les propriétaires d’une maison d’habitation ont personnellement procédé à d’importants travaux d’aménagement des combles et de réhabilitation, avant sa mise en vente.

Quelques mois plus tard, durant l’été, les acquéreurs se sont aperçus qu’il régnait une très forte chaleur sous les combles, laissant supposer qu’il n’y avait aucune isolation thermique, contrairement à ce qui était marqué sur le diagnostic énergétique. A l’inverse, durant la saison froide, il s’est avéré que l’immeuble était difficile à chauffer sans dépenser beaucoup d’énergie.

Aussi, les acquéreurs arguant de désordres thermiques ont assigné leurs vendeurs en vue d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire.

Ce dernier a ainsi mis en évidence le manque d’isolation de la maison et fait établir un bilan thermique complet de la maison, lequel bilan a démontré que la maison était faiblement isolée.

L’expert a aussi mis en évidence d’autres désordres qu’il qualifie de vices cachés lors de l’achat.

Il en conclut que « les différentes malfaçons sont de nature à engendrer des coûts de chauffage totalement prohibitifs, que les travaux de rénovation ont été faits totalement en dehors des règles de l’art par des bricoleurs absolument incompétents, qu’ils sont de nature à rendre l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné c’est à dire une maison d’habitation rénovée ».

Le coût des travaux de réparation a ainsi été évalué à 15.000€.

Les juges d’appel, confirmant le jugement du Tribunal de grande instance de Toulouse, a alors déclaré que la responsabilité des venderesses était engagée sur le fondement de l’article 1792 du Code civil, faute pour les travaux de rénovation d’avoir permis d’apporter une isolation thermique suffisante à la maison.

En outre, les juges ont retenu la responsabilité des vendeurs pour vices cachés, car la partie arrière de la toiture était affectée de désordres uniquement visibles depuis la propriété voisine et un des murs de la maison n’était pas recouvert d’un enduit d’étanchéité non visible pour un profane.

Les juges ont ajouté que les vendeurs ayant rénové par eux-mêmes leur maison, ils connaissaient nécessairement son état exact et ne pouvaient, compte tenu de leur mauvaise foi, revendiquer l’application de la clause de non garantie des vices cachés figurant dans l’acte de vente.

En conséquence, les vendeurs ont été condamnés à verser la somme de 15.000€ aux acquéreurs au titre de leur préjudice de jouissance et afin de leur permettre d’entreprendre les travaux de rénovation énergétique convenus et convenables.

Que retenir de cet arrêt ?

Si une personne entreprend elle-même des travaux de rénovation énergétique, elle endosse la qualité de constructeur et engagera sa responsabilité.

En effet, que des travaux de rénovation énergétique aient été ou non réalisés par un professionnel, cela n’a aucune incidence sur les garanties dues par le vendeur-constructeur.

De fait, si ce dernier cède son bien immobilier, il n’échappera pas à d’éventuelles poursuites si les travaux qu’il a effectués sont affectés de désordres.

De même, si la mauvaise foi du vendeur est démontrée, il ne pourra pas se prévaloir de la fameuse clause de non-garantie des vices cachés stipulée dans l’acte de vente, ce qui n’est pas sans intérêt pour les justiciables considérant (à tort) que cette clause les prive de tout recours.

Grégory Rouland
Docteur en Droit et Avocat
gregory.rouland chez outlook.fr

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  • par boulaye , Le 13 janvier 2017 à 15:41

    Bonjour,
    J’ai fait l’acquisition d’une maison en avril 2015. Les travaux des combles n’ont pas fait l’objet d’une déclaration en mairie et venait tout juste d’être terminé par l’ancien propriétaire. Or, il nous arrive exactement ce que vous décrivez dans votre article avec en plus la condensation et les moisissures qui vont avec !!! Ma protection juridique refusait de nous aider pour cause de "non fondement juridique" !!! Un notaire contacté par mes soins m’a répondu "maison acheté dans l’état !". Mais ce que vous écrivez là me redonne de l’espoir. Nous il n’y a que les combles mais mes filles s’en servent de chambre... Enfin s’en servaient.... Nous avons été obligés de les reloger.

  • par sylvain , Le 18 octobre 2014 à 14:50

    Fort intéressant, merci !
    Sylvain, du site http://kelisol.fr

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