La faute inexcusable de l'employeur et la modélisation du DUER. Par Bruno Fessol et Gilles Guerineau, Consultants.

La faute inexcusable de l’employeur et la modélisation du DUER.

Par Bruno Fessol et Gilles Guerineau, Consultants.

3877 lectures 1re Parution: 2 commentaires 4.14  /5

Explorer : # faute inexcusable # obligation de sécurité # document unique d'évaluation des risques professionnels (duerp) # responsabilité de l'employeur

Le Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER) et la faute inexcusable de l’employeur : une transposition atypique en droit du travail du principe de précaution.

-

Il s’agit là, d’une obligation d’ordre public, à laquelle il est impossible de déroger et dont le pendant est la responsabilité pénale du chef d’entreprise sans préjudice de l’engagement de sa responsabilité civile pour la réparation des dommages causés et de la reconnaissance de sa faute inexcusable au sens du Code de la sécurité sociale (Articles L 452-1 et suivants et L 453-1).

En matière d’accident du travail, il y a faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. La faute inexcusable de l’employeur ou d’un salarié substitué dans la direction permet à la victime de bénéficier d’une majoration de sa rente et d’avoir des indemnités complémentaires (réparation de ses souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique et d’agrément, de la perte ou diminution de ses chances de promotion professionnelle). En cas d’accident mortel, les ayants droit de la victime peuvent demander réparation du préjudice moral. La reconnaissance de la faute inexcusable ne relève pas de la matière pénale au sens de l’article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

C’est à bon droit et sans méconnaître les exigences de ce texte qu’une cour d’appel retient qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par le salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise.
Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Même dans le cas où les dépenses afférentes à la maladie professionnelle sont inscrites au compte spécial parce que celle-ci n’a été inscrite au tableau que postérieurement à la période d’exposition au risque, la Caisse primaire d’assurance maladie est tenue de faire l’avance des sommes allouées en réparation du préjudice de caractère personnel, et elle conserve contre l’employeur dont la faute inexcusable a été retenue le recours prévu par l’article L 452-3 al. 3 du Code de la Sécurité sociale. (Arrêt de la Cour de Cassation, chambre civile du14 décembre 2004).

Nous comprenons alors immédiatement l’importance de l’obligation. Pour faire écho à ces dispositions, le gouvernement a fait publier au Journal Officiel, le 5 novembre 2001 (applicable depuis novembre 2002), le Décret N° 2001-1016 (article R 4121-1 du Code du travail) portant obligation de transcription dans un Document Unique, d’un « audit des risques professionnels ».

Il s’en suit, qu’évaluer et apprécier les risques dans son entreprise est obligatoire depuis 2002, que celle-ci soit grande ou petite et quel que soit le secteur d’activité. Ainsi, les entreprises, qui faute de temps ou de méthode n’ont pas souscrit à cette obligation ou à celle de mise à jour annuelle ou dans les conditions fixées à l’article R 4121-2 du Code du Travail (évolution ou changement de nature du risque, modifications structurelles de l’entreprise, …) sont dans l’illégalité et passible d’une contravention pénale de 5ème classe, soit d’une amende de 1 500 € et de 3 000 € en cas de récidive. Il apparaît donc important de faire un point de l’économie légale même de l’obligation, ou en d’autres termes, de révéler ce qu’elle recouvre, sa nature, ses implications judiciaires potentielles (cas de l’accident du travail et de la maladie professionnelle).

Pourquoi un point de l’économie même de l’obligation ? Parce qu’il met en lumière l’étendue de la responsabilité qui pèse sur l’employeur. Il convient de ne pas s’y tromper. Il faut illico poser et intégrer qu’il y a là, l’émergence d’une responsabilité accrue, de plus d’ampleur, sinon nouvelle, mise à la charge du chef d’entreprise. Une application atypique et singulière à l’entreprise et à son dirigeant du principe de précaution.

Chapitre I – La reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et ses conséquences subintrantes.

1/ Le contenu et l’étendue du principe

2/ Le Document Unique : de la prévention à la précaution

Chapitre II - L’audit et la rédaction du DUER.

1/ L’audit

2/ De l’audit à la rédaction

Analyse complète de l’article

Bruno FESSOL.
Jurisconsultant / formateur. Fondateur et responsable de THEMIS TPE/PME Développement, coadministrateur du GIE SOLAXE Partners - Haute-Savoie.

Gilles GUERINEAU
Cosnsultant expert RH. Fondateur et responsable d’EMPATHIE Développement Consulting, coadministrateur du GIE SOLAXE Partners - Haute-Savoie.

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

14 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • J’ai eut un AT le 26/09/2008 suite à une machine défectueuse (lave vaisselle) consolidé le 01/07/2012 par la CPAM pour une inaptitude total à tout métier à 60% ( bras droit gelé "droitière" avec raideur des doigts-main-bras + algodystrophie ; les seules preuves que j’ai pour faire reconnaitre la faute lourde de l’employeur sont : témoignage d’une cliente qui est venue me libérer le bras suite à mes appels de secours ; et mes ex collègues qui témoignent bien que la machine était bien défectueuse depuis plus de 10 jours ; mais le problème est qu’elles témoignent également que mon employeur avait affiché toutes interdiction de manipuler la machine sans l’aide d’une deuxièmes personne " se qui est pourtant totalement FAUX" ; mon employeur à apporté une preuve qu’il avait fait appel à une entreprise avant mon AT ; alors que le 10/10/2009 la CPAM à fait son enquete , et mon employeur était dans l’impossibilité d’apporter une preuve justifiant l’appel à une entreprise de réparation ; alors comment se fait il que maintenant il puisse apporter cette preuve ???? beaucoup de questions se pose !!!!!!!!!! et voilà que le TGI à refusé la faute lourde de l’employeur pour manque de preuve , je ne ferait pas comme lui ; à venir avec de faux témoignages ; mais sa aussi je ne peu pas le prouver ; que me restet’il ??? faire appel !! oui je l’ait fait ; mais je n’est plus d’espoir ; car en principe si sa était refusé la première fois , sa ne sera pas reconnue à l’appel ; riens que de penser que je ne pourrait plus jamais retravailler me rend malade ; je ne suis qu’un simple salarié et je n’est pas le meme portefeuille que mon employeur pour me défendre ; je présice également que mon dossier est suivi par la FNATH ; et malgrés cela !!!! alors donner moi encore un peu d’espoir en me donnant des conseils pour peut etre arriver à faire reconnaitre la faute lourde de mon employeur ; merci

    • par Kay Phongsavanh , Le 17 mars 2015 à 03:14

      Bonjour,
      Je pense que vous confondez principe de prévention et principe de précaution. Les deux définitions (prévention/précaution) sont totalement différentes juridiquement et techniquement., voir elles sont complémentaires. Il s’en suit que les deux ne peuvent être confondues. Il faut savoir que la prévention, -> par le document unique, est "synonyme " évaluer les risques ; si risque il y a, il y a probabilité. Par exemple, les accidents sur la nationale x sont fréquents, et sont de l’ordre de : 10%. Donc, si vous voulez prendre cette nationale, vous connaissez les risques. C’est sur cette idée que l’obligation d’évaluer les risques dans les entreprises va apporter les informations aux travailleurs.
      Alors que pour la précaution, la valeur de la probabilité n’existe pas. Il y a quelque chose, mais je ne sais pas quoi ! Alors, je vais m’avancer avec prudence : c’est le principe de précaution.
      Par ailleurs, la notion de faute inexcusable de l’employeur existe depuis 1898 ( plus de 100 ans). Il est loin d’être une notion de responsabilité émergente ! Par contre, je conçois que l’évolution économique, politique et sociale etc. ont modelées notre environnement et notre vie, la loi doit alors s’adapter aux évolutions. Dans votre développement, vous partez d’un arrêt de la cassation 2004, vous continuez avec "Nous comprenons alors immédiatement l’importance de l’obligation." du décret du 5 novembre 2001. -> C’est comme si le législateur avait deviné en 2001 qu’en 2004, les juges de la cassation allait donner de nouveaux critères pour la faute inexcusable.
      Et, vous ajoutez "évaluer et apprécier les risques dans son entreprise est obligatoire depuis 2002" c’est à dire que l’obligation d’évaluer ne date que de 2002.
      A mon avis, l’obligation est issue de la loi du 31 décembre 1991, qui prévoit en son article L4121-2 du code du travail (ancien L230-2 du CT) que : L’employeur met en œuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
      1° Eviter les risques ;
      Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;
      Donc, l’obligation d’évaluer existait déjà, le décret ne fait que venir préciser comment le législateur "voit" la méthode ou la façon dont il faut le faire => le document unique.
      Il y a d’autres points que je pourrais développer, mais..
      Bien à vous.
      Kay PHONGSAVANH / doctorant en droit / Université d’Avignon.
      Mon texte est écrit à la volée. Il se peut que quelques coquilles puissent s’y glisser.

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27876 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs