Une personne donne à bail à des époux un local à usage d’habitation, qui sera cédé à une SCI en 2002.
Le 28 août 2009, le préfet de la Charente-Maritime a, par arrêté, décidé du traitement d’urgence de la situation d’insalubrité du logement eu égard à la présence de peintures dégradées contenant du plomb, la présence de rats, l’absence d’éclairage naturel suffisant, l’absence d’aération suffisante de certaines pièces et une installation électrique vétuste.
Puis, par arrêté du 30 novembre 2009, le préfet a déclaré par arrêté le logement insalubre.
Le 1er septembre 2009, le bail est alors résilié et les preneurs assignent la bailleresse pour les préjudices de jouissance, matériels et moraux subis depuis 2002, date la cession du bien à SCI.
La Cour d’appel ne fait que partiellement droit aux demandes des preneurs, en leur accordant des dommages-intérêts d’un montant moins important que celui demandé sous prétexte que la bailleresse avait tenté de remédier à l’insalubrité tout au long du bail, en faisant intervenir des entreprises spécialisées en dératisation, en en plomberie, en peinture et en électricité.
En outre, la sur-occupation du logement a contribué à en accentuer la dégradation, mais aussi les autres logements du même immeuble n’attiraient pas les rats, si bien que la présence de rongeurs n’était pas seulement imputable au bailleur.
De fait, la Cour d’appel n’a indemnisé le préjudice de jouissance qu’à compter du 1er janvier 2009, jusqu’au 1er septembre 2009, date de résiliation du bail !
Mais la Cour de cassation a annulé cet arrêt au motif que :
l’indemnisation du preneur pour les troubles de jouissance subis du fait du manquement par le bailleur à son obligation de délivrance d’un logement décent n’est pas subordonnée à une mise en demeure du bailleur
Que retenir de cet arrêt ?
En premier lieu, la Cour de cassation applique strictement l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, disposant que le bailleur doit remettre à son locataire un logement décent.
La solution est d’autant plus logique que l’obligation de délivrer un logement décent est d’ordre public [1].
En second lieu, le preneur doit assurer la jouissance paisible des lieux [2].
A défaut pour un logement de remplir ces qualités, le bailleur doit tout mettre en œuvre pour y satisfaire, et ce quand bien même le bailleur (bien entendu préalablement informé) n’aurait pas été mis en demeure d’y remédier.
Dans ce cas, le bailleur doit indemniser le préjudice de jouissance de son locataire à compter de sa date d’apparition.
Cette décision peut être rapprochée d’un arrêt de la Cour d’appel d’Angers du 12 novembre 1998 [3], qui avait condamné un bailleur au paiement des dommages-intérêts équivalant à trois mois de loyers, pour avoir mis à la disposition du preneur un logement infesté de puces, alors que le locataire n’était demeuré qu’un mois sur place.
La décision de la Cour de cassation est donc à saluer, les juges entendant préserver le droits du preneur au meilleur niveau satisfactoire dans le respect le plus strict de la loi.