Pour rappel, l’employeur est tenu par une obligation de sécurité à l’égard de ses salariés. Pour préserver leur santé, il doit organiser les visites médicales obligatoires prévues par le Code du travail.
Tout salarié bénéficie d’examens médicaux périodiques, au moins tous les vingt-quatre mois, par le médecin du travail. Ces examens médicaux ont pour finalité de s’assurer du maintien de l’aptitude médicale du salarié au poste de travail occupé. Certains salariés peuvent faire l’objet d’une surveillance médicale renforcée pouvant être annuelle.
A défaut de respecter cette obligation, l’employeur engage sa responsabilité à l’égard de ses salariés lesquels peuvent, en cas de défaillance de l’employeur, solliciter notamment le versement de dommages et intérêts.
En outre, au cours de sa vie professionnelle, le salarié peut se trouver dans l’incapacité physique d’exercer tout ou partie de ses fonctions. Dans ce cas, l’inaptitude du salarié ne peut être constatée que par le médecin du travail soit dans le cadre de la surveillance médicale des salariés à l’embauche, au cours de l’exécution du contrat de travail ou après suspension du contrat pour maladie, maternité ou accident, soit dans le cadre de la visite médicale de reprise.
Sauf si le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité, ou pour celles de tiers, le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude qu’après étude du poste et des conditions de travail dans l’entreprise et deux examens médicaux de l’intéressé espacés de deux semaines.
Tout licenciement prononcé pour inaptitude après un seul examen médical ou après deux examens médicaux non espacés du délai minimum de deux semaines est nul.
Mais qu’en est-il lorsque le non respect de ces deux examens médicaux est imputable à la défaillance du médecin du travail ?
Dans un arrêt très récent du 27 novembre 2013, la Cour de cassation a dû se pencher sur cette question.
Dans cette affaire, le salarié, ayant été absent à plusieurs reprises pour maladie, a été examiné par le médecin du travail du service de santé inter-entreprises lequel a rédigé un certificat d’inaptitude. Eu égard à cet avis d’inaptitude, l’employeur a procédé dès le lendemain au licenciement du salarié.
Par la suite, ce licenciement a été déclaré nul par la Cour d’appel qui a condamné l’employeur au paiement de dommages-intérêts au salarié.
La Cour d’appel a en effet constaté que le licenciement avait été prononcé dès le lendemain de l’unique examen médical d’inaptitude. Ce licenciement aurait été possible si l’avis d’inaptitude constatait et caractérisait l’existence d’un danger immédiat.
Or, dans cette affaire, l’avis d’inaptitude ne faisait aucunement mention du danger immédiat ni même qu’une seule visite était nécessaire.
Dès lors, le licenciement ne pouvait avoir lieu avant un second examen médical espacé de deux semaines du premier.
L’employeur condamné a alors recherché la responsabilité du service de santé inter-entreprises ayant délivré l’avis d’inaptitude litigieux.
La Cour de cassation a donné gain de cause à l’employeur considérant que la faute du médecin du travail avait été, au moins en partie, à l’origine du caractère illicite du licenciement du salarié.
La responsabilité des services de santé au travail a été également étendue par la Cour de cassation qui, dans un autre arrêt du 19 décembre 2013, a eu à statuer sur les dysfonctionnements récurrents d’un service dans la mise en œuvre des examens médicaux obligatoires.
Dans cette affaire, le service de santé au travail n’avait procédé qu’à un seul des examens médicaux périodiques sur les cinq demandés par la société et n’avait pas respecté le délai de visite annuelle pour quatre des salariés soumis à une surveillance médicale renforcée.
En tout état de cause, la situation résultant des défaillances du service de santé au travail dans l’exécution de sa mission constituait une infraction pénale commise par l’employeur, qui se trouvait également confronté à un déficit d’informations déterminantes pour l’accomplissement des actions de prévention et le respect des obligations qui lui incombaient dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail.
Il était ainsi établi que la société avait subi un préjudice en rapport avec l’insuffisance des examens médicaux et de la surveillance des salariés imputable au service de santé au travail, préjudice évalué au montant de la cotisation annuelle due au titre de l’adhésion au service de santé au travail.
Il est important de rappeler que ces condamnations récentes de services de santé au travail ne dispensent par l’employeur de respecter ses obligations en matière de sécurité et de santé au travail et de veiller à l’organisation des examens médicaux de ses salariés auxquels il est tenu.
Sources :
Cass, 1e civ., 27 novembre 2013, pourvoi n° 12-25242
Cass, 1e civ., 19 décembre 2013, pourvoi n° 12-25056