Présence de mérule : la clause limitative ou exclusive de responsabilité du vendeur ne joue pas.

Par Grégory Rouland, Avocat.

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Explorer : # vices cachés # mérule # responsabilité du vendeur # diagnostic technique

Un récent arrêt statuant sur la clause d’irresponsabilité du vendeur en cas de mérule est l’occasion d’introduire la disposition de la loi ALUR sur ce point, laquelle règlera bien des difficultés futures.

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Généralement, un dossier de diagnostic technique est annexé au contrat de vente d’un bien immobilier, afin d’informer l’acquéreur sur la présence de matériaux ou d’insectes dangereux pour la santé, l’état et l’environnement de l’immeuble.

À défaut de diagnostic technique, le vendeur ne pourra pas s’exonérer de la garantie des vices cachés [1], et ce, quand bien l’acte de vente comporterait une telle clause.

Outre l’établissement d’un dossier de diagnostic technique, la loi ALUR  [2], est venue ajouter l’obligation pour le vendeur d’informer l’acheteur sur la présence d’un risque de mérule, si le bien vendu est situé dans une commune où des foyers de mérule sont identifiés par un arrêté préfectoral [3].

Bien entendu, pour les litiges antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi ALUR, l’acquéreur ne pourra qu’invoquer la garantie des vices cachés.

Un arrêt du 8 avril 2014 rendu par la Cour de cassation [4] permet de rappeler les droits des acquéreurs en la matière.

En l’espèce, les acquéreurs d’une maison d’habitation ont découvert la présence de mérule.

Ils ont assigné le vendeur en vue d’obtenir une réduction du prix de vente du bien acquis.

Les juges du fond ayant donné gain de cause aux acquéreurs, les vendeurs se sont pourvus en cassation, faisant valoir que la présence de mérule était aisément décelable en raison de l’état particulièrement dégradé de certaines pièces, et que l’application de la clause exonératoire de garantie des vices cachés n’est exclue que lorsque le vendeur est de mauvaise foi.

La Cour de cassation a rejeté leurs arguments, car en premier lieu, le mauvais état de certaines pièces de la maison ne suffisait pas à rendre apparent le vice lié à la mérule. En outre, la rénovation réalisée par les vendeurs ne pouvait pas inciter les acquéreurs à s’inquiéter de la présence éventuelle d’un champignon. De ce fait, l’infection par la mérule était un vice caché pour les acquéreurs.

En second lieu, la clause d’exonération de garantie ne pouvait s’appliquer, car l’un des vendeurs, professionnel de la construction, avait lors des travaux de rénovation découvert la présence de mérule, qui était donc antérieure à la vente.

Les conditions nécessaires à la caractérisation des vices cachés étant réunies, la clause exonératoire de garantie des vices cachés ne pouvaient donc pas s’appliquer, car le vendeur était un professionnel [5].

En résumé la clause exonératoire ou limitative de responsabilité en cas de vices cachés ne trouve pas application :

- Lorsque le bien a été acquis avant la promulgation de la loi ALUR, si le vice lié à la mérule n’était pas suffisamment apparent ou si le vendeur était un professionnel

- Lorsque le bien a été acquis après la promulgation de la loi ALUR, si le vendeur n’a pas joint au dossier de diagnostic technique une indication sur la présence de mérule, à la condition que le bien soit situé dans une commune où un foyer a été identifié.

Grégory Rouland
Docteur en Droit et Avocat
gregory.rouland chez outlook.fr

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Notes de l'article:

[1article L. 271-4 du Code de la Construction et de l’habitation

[2JO 26 mars 2014, p. 5809

[3article L. 133-8 du Code de la Construction et de l’habitation

[4n°09-72.747

[5en ce sens, Cass. 3e civ., 27 septembre 2000, n° 99-10.297

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 26 novembre 2020 à 21:18
    par Johann , Le 11 mars 2015 à 16:22

    Bonjour,

    et qu’en es t’il pour les ventes réalisées après la promulgation de la loi et n’entrant pas dans une zone déclarée par la préfecture ?

    J’ai acheté un bien, et viens de découvrir en voulant changer le carrelage que tout le plancher était attaqué par la mérule... tout le rdc... Je n’ai pas encore vérifié les murs, le bardage et la charpente...

    Le diagnostic n’étant pas obligatoire dans notre département, mon vendeur a mis une clause d’exonération pour vices cachés.

    Mais je doute grandement qu’il n’en avait pas connaissance car le plancher a été réparé a deux endroits avec des bastaing neufs... Mais comment prouver qu’il y avait de la mérule à ce moment la et qu’il a tenté de le cacher ???

    Ah oui et j’allais oublié le vendeur était menuisier / charpentier de métier et a construit la maison en bois lui même. Je pense donc qu’il sait trés bien ce qu’est de la mérule contrairement à moi qui le découvre à mes dépends aujourd’hui.

    Merci pour votre aide

    • par pontier francis , Le 21 avril 2017 à 12:36

      manifestement il y avait un vice caché (réparation) par le vendeur , un professionnel de la construction .
      on ne répare pas par hasard une zone de plancher.
      la cause certainement une ventilation insuffisante du vide sanitaire défaut de conception ou un dégât des eaux ou les deux qui ont permis le développement de mérule.
      au moment de votre achat , il n’existait pas de zones délimitées par arrêté préfectoral, et la loi laisse le choix au propriétaire de ne pas déclarer la présence de mérule, en ce sens le législateur aurait dû imposer que ce soit l’expert ou le diagnostiqueur ( comme pour le plomb ou l’amiante) qui doivent déclarer la présence de mérule et non le propriétaire ?, le locataire ? ou le syndic ? nous sommes là-aussi dans la cadre de la sécurité sanitaire, des effondrements liés à la présence de mérule se sont déjà produits. modification du contenu de la loi à faire évoluer.

    • par Gaïa , Le 2 août 2017 à 17:47

      J’ai signé un compromis de vente il y a plus de 4 ans pour une maison présentée comme totalement rénovée. Suite à cette signature, j’ai revisité la maison (hors délai de rétractation ) avec un maçon pour envisager des travaux. Nous avons découvert, en été, de l’humidité cachée sur le parquet du RDC. Le professionnel m’informe que le système d’étanchéité n’est pas existant. Je décide de ne pas continuer la vente et en informe l’agence qui me répond par courrier que le délai de rétractation est passé et que je suis dans l’obligation d’acheter.
      Je prends les conseils d’un avocat qui écrit à l’agence pour avoir les coordonnées de leur conseil et 0 réponse. La vendeuse me dit que cela me coutera cher mais reconnaît verbalement avoir connaissance du souci.
      Mon notaire prend contact avec son notaire pour trouver un accord en vain et nous décidons de ne pas nous présenter à la sommation de signature, l’avocat de la vendeuse ne souhaitant aucune discussion.
      Aucune nouvelle pendant des mois donc avec mon avocat nous nous sommes dit "naïvement" que le dossier était clos.
      Nouvelle dans la région, je suis repartie en recherche d’un bien. J’ai signé un nouveau compromis de vente pour et, petite ville aidant, je reçois, 2 semaines après et 10 mois après la date de signature, une assignation au TGI pour vente forcée de la vendeuse.
      Je déménage dans ma nouvelle maison en juin et la procédure se poursuit avec un an plus tard une condamnation en vente forcée exécutoire plus paiement de la clause pénale de 10%. Mes comptes sont saisis par deux fois durant l’été et je suis contrainte de vendre la maison que j’habite depuis un an pour financer le nouveau bien. J’ai ainsi passé mes soirées et WE à rénover cette maison pour la rendre vivable ... J’ai immédiatement fait poser un drain pour la rendre étanche !
      Je suis en appel et ayant depuis été mutée en région parisienne j’ai voulu revendre mon bien et j’ai annulé ma demande d’annulation de la vente forcée. Malheureusement, lors de la vente, j’ai réalisé un diagnostic mérule à la demande des acquéreurs et l’expert a diagnostiqué de la mérule précisément aux endroits où j’avais dit avoir constaté des infiltrations d’eau. La vente a donc été annulée et j’ai du traiter, déconstruire, déposer le parquet, les coffrages, couler une dalle de béton, reconstruire....
      L’audience se tiendra à l’automne et mes questions : que puis je attendre de cet appel ? Y a t-il déjà eu des cas similaires ? La présence de mérule n’est-elle pas une preuve de ce que j’ai invoqué dès le départ ?
      Pour l’anecdote : j’ai omis de préciser que dans mes nombreuses péripéties, l’agence immobilière s’est réveillée lorsque j’ai été condamnée pour m’assigner afin d’obtenir sa commission. Elle avait été totalement muette durant toute la procédure... Puis-je l’assigner si tardivement ?
      Merci pour vos commentaires et avis sur ce dossier.

    • par Lecteurfidèle , Le 29 février 2020 à 17:53

      Bonjour Gaïa,

      Avez-vous des nouvelles suite à la terrible histoire que vous avez évoquée ?

      Cordialement

    • par Bolognaise02 , Le 26 novembre 2020 à 21:18

      Bonjour nous avons eu la remise des clés le 1 er septembre il y a 2mois de notre maison acheter a une société immobilière
      Lors de la visite de la maison nous avons pas pu voir la cave dans son entièreté ( car stokage de matériel )
      Hier en nettoyant la cave et en enlever des plaques de polystyrène tomber des mur et plafond qui avait fraîchement poser et quelque carton laisser je me suis aperçu de 2 poutres pourri et 1 mur
      Un expert passe début semaine pour analyser

      La maison a était entièrement rénovée par une société immobilière a qui nous avons acheter cette maison, nous avons pas eu de diag mérule car nous faisons pas parti d’un département obligatoire

      J’ai garder les photos de l’annonce ou il est indiqué qu’elle est entièrement rénové et qu’ils n’ont pas connaissance d’un champignon
      Nous avons dans notre acte la garenti des vices cachés
      Serions nous couvert par cette garantie ?

      Merci beaucoup

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