Le dirigeant qui souhaite développer son activité en recourant au financement externe est très souvent confronté à l’obligation d’avoir à se porter caution personnelle de sa société, ce qui atténue considérablement la portée de la séparation du patrimoine professionnel et du patrimoine personnel voulue au travers de la création d’une société.
Bien que le cautionnement du dirigeant de société soit considéré comme un cautionnement commercial, il bénéficie des dispositions protectrices voulues par le législateur vis-à-vis des personnes physiques.
Ainsi, depuis le 5 février 2004, tout acte de cautionnement consenti par une personne physique envers un créancier professionnel est soumis à une exigence de forme très stricte. A peine de nullité de l’engagement de la caution, celle-ci doit faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante « En me portant caution de X, dans la limite de la somme de ... € couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n’y satisfait pas lui-même. » (article L 341-2 du Code de la Consommation).
En outre, si le créancier professionnel demande un engagement solidaire par lequel la caution s’engage à désintéresser le créancier sans que celui-ci n’ait à poursuivre préalablement le débiteur, la mention manuscrite devra également comporter la mention suivante : « En renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2021 du code civil et en m’obligeant solidairement avec X, je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuivre préalablement X. » (article L 341-3 du Code de la Consommation).
Enfin, l’article L 341-4 du Code de la Consommation dispose qu’un créancier professionnel ne peut pas se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique lorsque ce dernier est manifestement disproportionné à ses biens et à ses revenus.
La Cour d’Appel de Paris a, dans un arrêt du 1er juin 2007, jugé que ce texte bénéficie à toutes les cautions personnes physiques, y compris les dirigeants des sociétés cautionnées (un précédent arrêt de la Cour d’Appel de Rennes du 19 décebre 2003 avait déjà statué dans ce sens). Le caractère manifestement disproportionné doit s’apprécier au moment de la conclusion du contrat de caution mais également au moment où la caution est appelée. Lorsque ces conditions sont réunies, et que l’engagement de caution est réputé excessif, le créancier professionnel ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement.
A noter que le créancier professionnel doit également avertir la caution personne physique avant le 31 mars de chaque année du montant du principal, des intérêts, commissions et frais restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie. Si l’engagement est à durée indéterminée, le créancier doit également rappeler la faculté pour la caution de révoquer son engagement à tout moment (la caution restera néanmoins tenue des dettes présentes au moment de ladite révocation). A défaut, le créancier professionnel ne peut pas se prévaloir de l’application des pénalités et intérêt de retard échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information.
La chambre commerciale de la Cour de Cassation, dans un arrêt du 27 novembre 2007, a également précisé que l’obligation d’information de la caution en cas de défaillance du débiteur principal dans le mois du premier incident de paiement s’applique également aux cautions dirigeantes qui peuvent ainsi se prévaloir des sanctions attachées au non respect de cette obligation d’information, à savoir la déchéance des pénlités ou intérêts de retard entre la date du premier incident et la date de l’information.
Enfin, le projet de loi de modernisation de l’économie tel que présenté à l’Assemblée Nationale (Projet AN n°842) prévoit que le dirigeant de bonne foi, qui s’est porté caution de sa société, puisse bénéficier, le cas échéant, de la procédure de surendettement et de rétablissement personnel. Ainsi l’article L 330-1 du Code de la Consommation serait modifié comme suit : "La situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l’impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. L’impossibilité manifeste pour une personne physique de bonne foi de faire face à l’engagement qu’elle a donné de cautionner ou d’acquitter solidairement la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société peut également caractériser une situation de surendettement" et l’article L 332-9 du même code serait complété comme suit : "Elle entraîne aussi l’effacement de la dette résultant de l’engagement que le débiteur a donné de cautionner ou d’acquitter solidairement la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société."
Nathalie Metais
SCM BENSAID METAIS