La société Auto Look Perfect exerce une activité de négoce dans le domaine des accessoires pour l’automobile. Estimant qu’un de ses concurrents, la société Perfect Car’Line, avait reproduit de nombreux éléments de son site internet, elle la met en demeure, le 22 Août 2011, de cesser les agissements litigieux, puis l’assigne devant le TGI de Paris, en décembre 2011, se fondant sur l’atteinte à ses droits de producteur de base de données et sur la concurrence déloyale et parasitaire.
Sur l’atteinte aux droits du producteur de base de données :
Pour rappel, les bases de données peuvent faire l’objet d’une double protection juridique :
Par le droit d’auteur pour la création intellectuelle que constitue le choix opéré entre les données et leur agencement, devant néanmoins exprimer une certaine originalité ;
Par le droit sui generis des producteurs de bases de données visant à assurer la protection d’un investissement substantiel dans « la constitution, la vérification ou la présentation » du contenu d’une base de données.
C’est ce dernier régime de protection dont il est question en l’espèce.
Selon l’article L 341-1 du Code de la propriété intellectuelle, le producteur d’une base de données "bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel".
Le producteur de base de données est normalement celui qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants ; il lui appartient d’apporter la preuve du caractère substantiel de l’investissement financier, matériel ou humain, ayant permis la constitution de ladite base de données.
En l’espèce, l’investissement substantiel résultait notamment des éléments suivants :
La base de données du site internet de la société Auto Look Perfect était constituée de plusieurs milliers de références de jantes « replica » et de leur description professionnelle précise, classées selon leur compatibilité avec les marques de fabricant automobiles et modèles de véhicules ;
Le nombre d’heures passées par le gérant de ladite société à recenser les modèles de jantes « replica » existants et à les rassembler, avec les informations pertinentes était évalué à 500 heures ;
Des mises à jour de cette base de données étaient régulièrement effectuées par la société Auto Look Perfect qui justifie des frais correspondant aux services de son prestataire informatique.
Les juges ont ainsi considéré que la base de données avait bénéficié d’un « important investissement humain et financier ». Cet investissement a notamment été apprécié au regard de la taille de la société et de son capital social (7500 euros au jour de son immatriculation).
Les droits du producteur de base de données lui permettent notamment d’en interdire :
L’extraction de tout ou partie, dans ce cas qualitativement ou quantitativement substantielle, de sa base de données ;
La réutilisation, par la mise à disposition du public de tout ou partie, dans ce cas qualitativement ou quantitativement substantielle, du contenu de sa base de données.
Afin de démontrer l’extraction litigieuse de sa base de données par la société Perfect Car’Line, et apporter la preuve de la contrefaçon ainsi opérée, la société Auto Look Perfect a fait procédé à un constat : sur 40 modèles de jantes qui étaient communs aux deux sites, l’agent assermenté a choisi, de manière aléatoire, 7 modèles de jantes et a constaté :
la reprise des mêmes erreurs grammaticales sur les 7 descriptifs,
l’insertion du logo, et
l’apposition du filigrane d’Auto Look Perfect.
En outre, le TGI a constaté que l’organisation de la base de données est identique sur les deux sites : choix d’une marque automobile, puis d’un modèle de véhicule et enfin d’un modèle de jantes d’après vignette photographique. Pour sa défense, la société Perfect Car’Line s’est bornée à invoquer un prétendu partenariat entre les deux sociétés dont elle ne parvient pourtant pas à démontrer la véritable existence.
Sur la concurrence déloyale
La société Auto Look Perfect fondait également sa demande sur la concurrence déloyale opérée par Perfect Car’Line en s’immisçant dans son sillage, profitant ainsi indûment de ses investissements et de sa notoriété sans bourse délier.
Sur ce point, de manière assez classique, les juges ont débouté la société Auto Look Perfect de sa demande en raison de l’absence de faits distincts de ceux invoqués par cette dernière pour l’atteinte aux droits du producteur de base de données : « un même fait ne pouvant être sanctionné sur deux fondements distincts, ils ne peuvent être retenus cumulativement au titre de la concurrence déloyale ».
Néanmoins, les juges ont estimé que les éléments invoqués pour ce fondement constituaient une « cause aggravante » qu’il convient de prendre en compte au titre de la réparation du préjudice subi par la société Auto Look Perfect.
En conclusion, si vous produisez une base de données nous vous recommandons de :
• conserver les preuves pouvant attester de la nature et de l’étendue des investissements consacrés à la constitution de vos bases de données ;
• effectuer une veille afin d’être en mesure de réagir rapidement en cas de « pillage » de votre base de données ;
• faire procéder à des constats d’huissier ou constats APP pour établir la preuve de la violation de vos droits.