Très généralement, lorsque le salarié aura le souhait de quitter son emploi, il le fera par l’intermédiaire d’une lettre de démission, en se basant sur un modèle de courrier très facile à trouver sur Internet.
Mais si le salarié souhaite rompre son contrat de travail en raison d’une faute commise par son employeur, ce mode de rupture est à proscrire impérativement. Dans un tel cas, il appartient au salarié d’envoyer non pas une lettre de démission, mais une lettre de prise d’acte de la rupture de son contrat de travail.
Par un tel courrier, le salarié va mettre fin immédiatement au contrat de travail, sans préavis (même si le salarié peut proposer dans son courrier d’effectuer son préavis).
Le salarié ne bénéficiera d’aucune indemnité lors de son départ, et notamment pas de l’indemnité de licenciement. Il ne pourra pas non plus percevoir d’indemnisation chômage. En pratique, il sera donc dans la même situation qu’un salarié démissionnaire.
Mais cependant, le courrier de prise d’acte lui permettra de saisir le juge prud’homal afin de contester les conditions dans lesquelles la rupture du contrat est intervenue. Il appartiendra alors au juge d’apprécier les manquements reprochés à l’employeur. Si le juge estime que les manquements reprochés à l’employeur sont suffisamment graves, la rupture du contrat de travail produira les mêmes effets qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et permettra au salarié de percevoir les indemnités correspondantes (indemnité compensatrice de préavis, indemnité de licenciement et indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse) (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 25 juin 2003 n° 01-43578).
L’employeur sera par ailleurs condamné à transmettre une nouvelle attestation Pôle Emploi, mentionnant comme motif de rupture un « licenciement », ce qui permettra au salarié de bénéficier d’un rappel d’allocations d’aide au retour à l’emploi auprès de Pôle Emploi, au titre de l’indemnisation chômage à laquelle il a droit.
Si le juge estime que les manquements ne sont finalement pas assez graves, le salarié sera considéré comme démissionnaire.
Dans sa rédaction, le courrier de prise d’acte diffère peu du courrier de démission ; il suffit d’écrire les termes de « prise d’acte de la rupture du contrat de travail », et d’expliquer dans le courrier les manquements reprochés à l’employeur, manquements qui sont suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat.
S’agissant de ces manquements, par principe, c’est au juge qu’il appartiendra d’apprécier leur gravité. Il faut rappeler qu’aucune règle de formalisme particulière ne s’impose dans la rédaction du courrier de prise d’acte : ce qui signifie que le juge devra analyser l’ensemble des manquements qui seront évoqués plus tard lors de l’audience, et qu’il ne peut pas se limiter aux faits qui sont mentionnés dans la lettre de rupture (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 9 avril 2008 n° 07–40668).
C’est au salarié de rapporter la preuve, devant le juge, des manquements qu’il invoque ; si un doute subsiste sur la réalité des faits, il va profiter à l’employeur.
Si les manquements sont suffisamment graves, la rupture va produire les mêmes effets qu’un licenciement abusif ; si le juge estime qu’ils ne le sont pas, la rupture du contrat sera analysée comme une démission (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 30 mars 2010 n° 08–44236). Par ailleurs, la prise d’acte produira les mêmes effets qu’un licenciement nul si les manquements de l’employeur consistent en un harcèlement moral ou une discrimination.
La jurisprudence donne plusieurs exemples de manquements graves :
- un manquement à l’obligation de sécurité de résultat (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 3 février 2010 n° 08–40144),
- un abus dans l’exercice du pouvoir disciplinaire par l’employeur (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 23 novembre 2010 n° 09–42748),
- une modification forcée du contrat de travail (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 7 décembre 2010 n° 09–67652),
- le fait d’avoir laissé le salarié revenir travailler sans organiser la visite de reprise qui était pourtant obligatoire (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 16 juin 2009 n° 08–4179),
- le fait pour la salariée de retour de congé maternité de ne pas retrouver le poste qu’elle occupait précédemment (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 3 novembre 2010 n° 09–67928),
- l’absence de fixation des objectifs alors que le salarié percevait des primes d’objectifs (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 9 novembre 2011 n° 10–11658),
- le fait d’avoir refusé de transmettre au salarié les éléments servant de base de calcul de la rémunération variable (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 18 juin 2008 n° 07–41910), etc.
Mais certains manquements seront automatiquement considérés comme graves, sans que le juge n’ait à les apprécier. Il en va ainsi dès lors que l’employeur porte atteinte à la rémunération, dans son montant, ou dans sa structure, c’est-à-dire dans le mode de calcul du salaire (par exemple : arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 13 juillet 2005 n° 03–45247). Et ce, même si cette modification est faite dans un sens plus favorable au salarié (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 5 mai 2010 n° 07–45409).
Toute décision de l’employeur qui entraîne une modification de la rémunération peut constituer un manquement. Par exemple, la modification du secteur géographique dans lequel le salarié effectue ses missions, laquelle va entraîner une modification de la rémunération variable (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 15 février 2012 n° 09–70632) ; ou alors l’absence de paiement du complément de salaire pendant un arrêt de travail consécutif à un accident du travail, alors que la convention collective obligeait à payer ce complément (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 12 décembre 2012 n° 10–26324).
Bien entendu, l’absence de paiement d’heures de travail, par exemple d’heures supplémentaires, constitue un manquement grave dès lors qu’il est démontré (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 24 octobre 2012 n° 11–30387).
Le paiement du salaire est en effet une obligation fondamentale de l’employeur. Tout comme le fait de donner un travail à exécuter. Ainsi, l’employeur commet un manquement grave lorsqu’il ne donne aucun travail à faire à son salarié ; et la Cour de cassation précise en outre que c’est à l’employeur qu’il appartient de prouver qu’il a rempli son obligation, et qu’il a donné un travail à effectuer (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 15 mai 2012 n° 10–25721).
Il faut préciser par ailleurs que le juge dispose également d’un pouvoir pour apprécier les conditions dans lesquelles une démission a été donnée. Si le salarié a employé des termes de « démission » et n’a pas mentionné dans son courrier de reproches particuliers à l’encontre de son employeur, cette démission peut tout de même être considérée comme une prise acte de la rupture du contrat de travail, en fonction du contexte et des circonstances. La démission sera alors considérée comme étant équivoque.
Tel sera le cas, par exemple, lorsque le salarié avait réclamé par courrier recommandé le paiement d’heures supplémentaires quelques jours auparavant (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 26 septembre 2012 n° 11–17134), ou lorsque la démission est donnée dans une période pendant laquelle l’employeur n’a pas payé les salaires (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 7 novembre 2011 n°09–71651), ou lorsque le salarié avait, avant de démissionner, saisi le juge prud’homal pour solliciter par exemple des rappels de salaires (arrêt Ch. soc. de la Cour de cassation 18 janvier 2011 n° 09–41073).
Mais il faut également préciser que ces règles, même si elles ont été posées par la Cour de cassation, ne sont pas nécessairement appliquées par le Conseil de Prud’hommes ou par la cour d’appel. Régulièrement, le juge auquel l’affaire est soumise va décider de ne pas remettre en cause la démission dès lors que la lettre de démission ne mentionne aucun reproche fait à l’employeur.
S’agissant de la procédure devant le Conseil de prud’hommes, l’article L 1451-1 du Code du travail précise que « l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine ». Mais ce délai prévu par la loi n’est que très rarement respecté en pratique. En effet, chacune des parties au procès doit disposer d’un délai suffisant pour prendre connaissance et analyser les pièces et les arguments de son adversaire : il s’agit du principe du contradictoire, qui est essentiel pour toute procédure. Or ce délai d’un mois est bien souvent insuffisant pour permettre le respect de ce principe. Ce d’autant plus lorsque l’affaire en question est complexe, au regard du nombre de manquements reprochés à l’employeur et au regard de leur gravité.
Un autre mode de rupture possible est le fait, pour le salarié, de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Dans un tel cas, le salarié va saisir le Conseil de Prud’hommes en demandant à celui-ci de rompre le contrat, en raison des graves manquements commis par son employeur, et qui rendent impossible, selon le salarié demandeur, la poursuite du contrat de travail. Une procédure classique aura alors lieu, avec notamment une tentative de conciliation préalable devant le bureau de conciliation et d’orientation ; puis en cas d’échec de cette tentative, une audience de plaidoirie devant le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes. La difficulté est que pendant toute cette procédure, le contrat de travail continuera à courir : il appartient au salarié de continuer à travailler pour son employeur, jusqu’à ce que le juge ait statué.
Et ce dernier n’a le choix qu’entre deux décisions possibles, après avoir examiné les arguments et les pièces de chacune des parties :
- Soit il décide qu’au jour où il statue, l’employeur a commis des manquements graves qui rendent impossible pour le salarié la poursuite du contrat ; auquel cas le juge prononce la rupture du contrat, et le salarié perçoit les mêmes indemnités que s’il avait fait l’objet d’un licenciement abusif (indemnité compensatrice de préavis, indemnité de licenciement, et indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse) ;
- Soit le juge estime qu’il n’y a pas de manquement grave commis par l’employeur au moment où il statue. Auquel cas, le juge ne prononce pas la rupture du contrat de travail, et celui-ci doit dès lors continuer à s’exécuter.
En conclusion, sur un plan stratégique, la demande de résiliation judiciaire va permettre de « forcer » l’employeur à modifier son comportement afin que les manquements reprochés par le salarié n’existent plus lorsque le juge statuera. Mais bien entendu, ce résultat dépend de la bonne volonté de l’employeur.
Quant à la prise d’acte de la rupture du contrat de travail, elle constitue un moyen très efficace de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié. Dans l’immédiat, après avoir envoyé son courrier, celui-ci se retrouve exactement dans la même situation que s’il avait envoyé une lettre de démission : pas de paiement d’indemnité de départ, pas de droit, en principe, à l’indemnisation chômage, etc. Mais cependant, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail va permettre au salarié de contester, par la suite, devant le Conseil de Prud’hommes, les conditions dans lesquelles la rupture du contrat de travail est intervenue. Si le salarié a pris sa décision en raison de manquements graves de l’employeur, il pourra obtenir des indemnités importantes, qui répareront son préjudice.
Discussions en cours :
Bonjour , voila je m’explique je suis salarié en cdi dans une entreprise depuis un peut plus de 1ans .
Mon poste est livreure de diesel en VL ( vehicule non adapté pour se tipe de transport ) forte odeur qui provoque des migraine assez régulièrement.... ( 2 a 3 fois pas semaine jai de forte migraine ) mon medecin ma deja arrêté a plusieur reprise )
D’ou ma question , est-ce que je peut rompre mon contrat pour la non présentation a la visite médicale que je ne jamais eux !
Convention collective nationale du négoce et de distribution de combustibles solides, liquides, gazeux, produits pétroliers .
Franchement je ne peut plus travailler dans ces condition surtou pour ma santé .
Je vous remerci pour vos réponse
Bonjour,
Malheureusement les chances de succès me semblent assez réduites, car le juge prud’homal n’accorde pas (à mon grand regret) une importance fondamentale à la visite d’médicale d’embauche.
Je pense que dans votre dossier, il vaut mieux vous orienter sur la situation actuelle plutôt que passée. Il faut réclamer auprès de votre employeur des équipements de protection individuels pour éviter ces désagréments. Et il faut également solliciter votre médecin traitant si la situation est n’est pas supportable.
Mais surtout, je vous invite à prendre contact avec le médecin du travail. Il peut vous déclarer inapte à votre poste de travail, compte tenu des circonstances. Ce qui entraînerait un licenciement, et donc un droit au chômage.
Cordialement,
Bonjour ,
jaimerai savoir si il est possible de saisir mon employeur au prud’homme pour harcèlement moral et discrimination en étant encore en poste ?
Car je je ne peux pas me permettre de rester sans activités.
Bonjour,
il n’y a aucun obstacle à cela. Vous pouvez parfaitement agir même en étant en poste. Dans ce cas de figure une des voies à envisager serait la demande de résiliation judiciaire.
Je vous invite à consulter un avocat pour avoir une analyse de votre situation.
Cordialement,
Bonjour,
Je permets de vous contacter. Car, actuellement, mon contrat de travail sous contrat CDI n’est pas encore rompu et je n’ai plus de travail. Suis dans l’attente de la décision des Prud’hommes pour ainsi valider la date du licenciement.
Sans emploi, je me suis inscrit à Pôle Emploi. Pour le moment, je ne peux pas leur transmettre l’attestation de fin de contrat qui est obligatoire, et, également, je ne peux pas percevoir d’allocations de chômage.
Lorsque je me suis inscrit à Pôle Emploi, l’agent à l’accueil a eu un doute. Quand je lui ai fait part, entre autres, “Actuellement mon contrat de travail n’est pas rompu et je suis sans travail. Je suis dans l’attente de passer devant les prud’hommes dans le cadre de la rupture du contrat de travail. Je souhaite m’inscrire à Pôle emploi.”. De fait, il a demandé à un de ses collègues. La réponse fût que je peux m’inscrire ; les agents n’en étaient pas certains du tout.
Est-il possible de s’inscrire à Pôle Emploi, en sachant que le contrat de travail n’est pas rompu et sans travail ?
Dans l’attente,
Merci par avance,
Cordialement,
Dublin
Bonjour,
J’ai embaucher en juillet pour un poste d’employée polyvalente dans un magasin de déstockage. Lors de l’entretien d’embauche la directrice de secteur m’as énumérés les tâches :
Monter et démonter des rayons.
Mettre les lots nouvellement reçu en avant.
Réapprovisionnement et réassort.
Poste Caisse.
Néanmoins depuis que j’y suis, je passe le plus clair de mon temps à la réserve où je manutentione des poids excédant à 40 ou 50 kg et je tracte parfois au dessus de 150kg.
Pourtant suivant l’article R. 4541-9 du Code du travail qui réglemente la charge maximale qu’une femme peut porter. Ainsi « les femmes ne sont pas autorisées à porter des charges supérieures à 25 kilogrammes ou à transporter des charges à l’aide d’une brouette supérieures à 40 kilogrammes, brouette comprise. »
Sans oublier que je monte et démonte des meubles et charges les véhicules des clients.
Je ne suis pas magasinière, ni menuisier, ni agent de conditionnement, pourtant c’est ce que je fais.
La direction sais pertinemment ce qu’il y a à faire dans leurs magasins et qu’il n’y à que des femmes et pourtant rien n’est aménager pour faciliter le poste. Et il se garde bien et de le dire et d’indiquer sur le contrat de travail les tâches à effectuer part le salarié. Ainsi rien n’est précisé sur
mon contrat.
J’ai pris des photos des cartons avec les poids indiqué dessus pour me servir de preuve.
Puis je partir en faisant une lettre de prise d’acte de rupture dans ces conditions ?
Merci pour votre réponse.
Bonjour en mai 2017je me suis retrouver en AT en août 2017 reconnu maladie professionnelle en novembre 2017 j ai repris mon ancien poste pendant 4 mois sans visite médical de reprise je me suis retrouver en rechute en maladie professionnelle en mars 2018 Fin avril j’ai été opérer en août 2018 reconnu travailleur handicapé. Le 3 septembre j’ai repris un autre poste et toujour pas de visite de reprise je suis toujour en soins sans arrêt et j’aimerais savoir si je peu faire une prise d’acte ? Merci d’avances
Bonjour,
Tout dépend du dossier et des circonstances pour savoir si la prise d’acte est opportune ou pas. Il me semble au vu des éléments que vous indiquez que l’employeur a commis en effet des manquements graves ; mais le juge appréciera.
Une autre possibilité est de demander vous-même une visite de reprise auprès du médecin du travail, pour être déclarée inapte et être licenciée. Vous pourriez d’ailleurs contester votre licenciement s’il apparaît que c’est le manque de surveillance de votre employeur qui a causé l’inaptitude.
Je vous invite à consulter un avocat.
Cordialement,