Les mesures "Covid".
Deux ordonnances françaises n°2020-306 et n° 2020-316 du 25 mars 2020 ont neutralisé tant les "astreintes, clauses pénales, clauses résolutoires, clauses prévoyant une déchéance", venant à échéance entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire [1], que les voies d’exécution forcée justifiées par le "défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents aux locaux professionnels et commerciaux".
Ce mécanisme a été prolongé dans le contexte du deuxième confinement par l’article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 qui a prévu notamment que "toute clause résolutoire ou prévoyant une déchéance en raison du non-paiement ou retard de paiement de loyers ou charges, est réputée non écrite" et concerne les entreprises déclarées éligibles selon les critères établis par le décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020 [2].
L’article 91 du decreto-legge italien n.18 du 17 mars 2020 ("Cura Italia") a prévu la prise en considération "des mesures de confinement aux fins d’exclusion de la responsabilité du débiteur, au sens des articles 1218 et 1223 du Code civil [3], en ce qui concerne également l’application d’éventuelles déchéances ou pénalités dues en raison de retards ou d’inexécution contractuelle".
L’article 103 al.6 a disposé la suspension de l’exécution des procédures d’expulsion des locaux d’habitation et commerciaux pour défaut de paiement des loyers jusqu’au 1er septembre 2020, terme prorogé par la suite jusqu’au 30 juin 2021, et le decreto-legge n.34 du 19 mai 2020 a prévu une réduction de 50% du loyer des salles de sport et installations sportives pour la période allant de mars 2020 à juillet 2020.
Dans les deux pays, de nombreux instruments (aides financières, chômage partiel, reports de charges, prêts garantis par l’Etat, crédits d’impôts pour les bailleurs acceptant un abandon de loyer, etc) ont été mis en place pour venir en aide aux entreprises éligibles, qui n’ont cependant en aucun cas empêché la multiplication de contentieux ayant trait au paiement des loyers commerciaux.
Un an après la sidération et les bouleversements causés par la pandémie, les nombreuses décisions publiées à ce jour permettent aujourd’hui d’avoir un certain recul et de dégager des caractéristiques communes entre les jurisprudences italienne et française, qui, malgré des motivations qui n’ont cessé de se diversifier, ont été dans leur ensemble plutôt favorables aux preneurs.
Les dispositions de droit commun.
Dans leur grande majorité, les solutions apportées par les tribunaux saisis dans le cadre de procédures d’urgence [4] (référé et ricorso cautelare) reposent, non pas tant sur les mesures "covid" précitées sur lesquelles les juges se sont rarement appuyés, mais sur des dispositions de droit commun.
Hormis l’absence dans le droit italien de la référence explicite à la force majeure que l’on trouve à l’article 1218 du Code civil français [5], le Code civil italien est très proche de son correspondant français, prévoyant le cas de l’inexécution/impossibilité d’exécution découlant d’une cause non imputable au débiteur (articles 1218 – cfr note n.3, 1256 et 1463 [6]), l’impossibilité partielle de l’exécution (article 1464 [7]), l’exception d’inexécution (article 1460 c.c [8]), l’imprévision (article 1467 [9]), l’obligation de délivrance du bailleur et la jouissance paisible du bien loué (article 1575 [10]), et consacrant le principe de la bonne foi dans les relations contractuelles (articles 1175, 1366 e 1375 C.c. italien [11]).
Les tribunaux italiens [12], saisis durant et peu après le premier confinement, ont "ouvert le bal" dès le printemps 2020, tandis que la première décision française traitant des conséquences de la pandémie a été rendue en juillet 2020.
Les tribunaux de Venise (14 avril 2020, n.3744/2020), Bologne (12 mai 2020, n.5503/2020), Rimini (25 mai 2020, n.1371/2020) et Gênes (1er juin 2020) ont fait droit aux demandes des locataires visant à bloquer temporairement l’encaissement de chèques de garantie ou la mise en œuvre de garanties à première demande, essentiellement en raison de l’existence d’une contestation sérieuse et du risque de préjudice irréparable pour le locataire "dans le contexte évolutif et inédit de la pandémie".
La force majeure.
Si le Ministre français de l’Economie et des Finances avait évoqué le 9 mars 2020 la possibilité "d’étudier le cadre juridique que nous pourrions mettre en place pour l’application du cas de force majeure dans l’exécution des contrats privés", il est constant qu’aucune disposition, ni en France ni en Italie, n’a conféré le caractère de force majeure à la pandémie, aux fins de suspension de l’exigibilité des loyers (cfr Tribunal de commerce de Lyon, 17 novembre 2020, n. 2020J00420 : "la mise en place d’un fonds de solidarité et de mesures pour reporter ou étaler le paiement des loyers pour une catégorie d’entreprises exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences de la propagation du covid-19, démontre que le législateur ne reconnait pas le caractère de force majeure à la pandémie" et Tribunal de Pise, 30 juin 2020 : "l’intervention du législateur n’a en aucun cas introduit le droit du preneur à la suspension du loyer du local mais a seulement permis d’évaluer l’incidence de l’état d’urgence sanitaire sous l’angle du caractère excusable de la violation contractuelle au sens des articles 1218 et 1223 c.c").
La prestation du locataire.
L’impossibilité de payer les loyers dus pendant la période de fermeture pour un motif de force majeure et/ou de "fait du prince", souvent invoquée par les locataires, a ainsi été rejetée par les tribunaux, à de rares exceptions près [13]. Dans leur grande majorité, les tribunaux n’ont pas manqué de relever de manière identique et en conformité à une jurisprudence constante des Cours de Cassation respectives [14] que l’obligation pécuniaire est toujours susceptible d’exécution et que son débiteur ne peut jamais en être exonéré pour un cas de force majeure, quel qu’il soit, selon un principe commun au droit positif des deux pays (cfr Tribunal Judiciaire Paris, 17 juillet 2020, n.20/50920 : "si les mesures prises par le gouvernement ont empêché la société de recevoir la clientèle, cette circonstance n’est pas de nature à faire échec au paiement des loyers postérieurs au 14 mars 2020 dès lors que le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure", Tribunal Judiciaire de Paris 26 octobre 2020, n.20/53713 et 20/55901, Tribunal de commerce de Paris, 11 décembre 2020, n.2020035120 ; Tribunal de Rome 9 septembre 2020 : "une obligation de paiement ne peut devenir objectivement impossible, étant donné la nature de l’argent en tant que bien fongible, tandis que les non-paiements attribuables, comme en l’espèce, à des conditions subjectives du débiteur, telles que son incapacité à payer, ne peuvent être considérés comme pertinents aux fins de contrôle de l’impossibilité").
La prestation du bailleur.
En Italie, le rejet des demandes de paiement formulées par les bailleurs a été motivé par certains tribunaux au visa des articles 1256 et 1464 c.c. (cfr notes n.6 et 7), par :
"L’impossibilité d’exécution de l’obligation du bailleur, qui est partielle, lorsque l’exécution est devenue impossible en ce qui concerne l’obligation de permettre au locataire d’exercer le droit d’exercer le commerce, mais est restée possible en ce qui concerne l’octroi du droit d’utiliser les locaux pour d’autres usages, et temporaire, car l’impossibilité d’utiliser le commerce était limitée à la période pendant laquelle les autorités ont empêché l’exploitation du commerce en réponse à l’urgence COVID-19" (cfr Tribunal de Rome, 29 mai 2020, n.18779/2020, Tribunal de Venise, 28 juillet 2020, n.5480/2020, Tribunal de Milan, 15 septembre 2020).
En France, l’impossibilité d’exécuter la prestation pour manquement à l’obligation de délivrance visée par l’article 1719 c.c. [15] a été également invoquée par les tribunaux, qui ont relevé que :
"Le preneur n’a pas pu exercer son activité durant le temps du confinement, de sorte qu’au 1er avril 2020, jour où le loyer du 2e trimestre 2020 est devenu exigible, il ne pouvait jouir du local selon la destination prévue au contrat" (cfr Juge de l’Exécution de Paris, 9 juillet 2020, n.20/80712)
Et que :
"L’obligation de délivrance du bien loué est une obligation de résultat qui consiste à délivrer et assurer la jouissance paisible et utile du bien loué, résultat convenu et nécessaire. Cette jouissance paisible et utile n’est plus assurée du fait de l’obligation de fermeture et le preneur n’est plus apte à y exercer l’activité prévue au bail" (cfr Tribunal judiciaire de Limoges, 31 juillet 2020, n.20/00387).
Ce moyen a cependant souvent été écarté par la suite comme inopérant au motif que :
"S’il est exact que la jouissance paisible des locaux a été affectée, il n’est pas démontré un manquement du bailleur à ses obligations qui entrainait une impossibilité absolue pour le preneur d’utiliser les lieux loués conformément à la destination du bail"
Et que :
"Si l’accès du lieu loué a été temporairement interdit au public, les mesures sanitaires n’ont pas fait cesser sa mise à disposition par le bailleur ni la possibilité pour le locataire d’en jouir puisqu’il pouvait toujours y accéder physiquement" (cfr Tribunal Judiciaire de Paris 26 octobre 2020, n.20/53713 et 20/55901, Tribunal de commerce de Paris, 11 décembre 2020, n.2020035120).
Dans le même esprit, certaines juridictions ont tenu à préciser que :
"Le bail commercial n’a pas subordonné le paiement des loyers à une occupation particulière des locaux ni à aucun taux de remplissage" (cfr Cour d’Appel Grenoble 5 novembre 2020, n.16/04533)
,
"L’article 1719 du Code civil relatif à l’obligation de délivrance du bailleur n’a pas pour effet d’obliger le bailleur à garantir au preneur la chalandise des lieux loués et la stabilité du cadre normatif, dans lequel s’exerce son activité" (cfr Tribunal Judiciaire de Paris, 25 février 2021, n.18/02353)
Et que
"Si le bailleur doit assurer la jouissance du preneur, il ne lui garantit pas que le bail sera fructueux" (cfr Cour d’Appel Riom 2.3.2021, n.20/01418).
Le moyen tiré de l’impossibilité de la prestation sur le fondement de l’article 1575 du Code civil italien (cfr note n.10), similaire à l’article 1719 c.c. français, a été également rejeté par le Tribunal de Rome, en raison du caractère "non définitif de l’impossibilité d’utiliser le local loué" et au motif que la garantie de délivrance du bailleur ne peut :
"Jamais être considérée comme incluant la rentabilité du bien concédé en jouissance" (cfr Tribunal de Rome, 9 septembre 2020, 16 décembre 2020 et 25 février 2021, n.60430/2020).
La perte du local.
L’impossibilité du preneur de jouir du local pour un motif assimilé au cas d’espèce visé par l’article 1722 du Code civil français [16] (soit la perte ou destruction partielle de la chose louée) a obtenu la faveur de certains juges français, parmi lesquels le Juge de l’Exécution de Paris :
"L’impossibilité objective pour le locataire de jouir de la chose louée conformément à sa destination peut le libérer pour tout ou partie définitivement ou temporairement de son obligation…la situation dans laquelle s’est trouvée le preneur au cours du deuxième trimestre de l’année 2020 est parfaitement assimilable à celle envisagée per l’article 1722 c.c" (JEX 27 octobre 2020, n.20/81460)
,
"Laquelle a pour effet de libérer le preneur de l’obligation de payer le loyer tant qu’il ne peut jouir de la chose louée, peu important à cet égard la clause de non responsabilité invoquée par le bailleur" (JEX 20 janvier 2021, n.20/80923)
,
Et la Cour d’Appel de Versailles, qui a estimé que :
"L’allégation par le locataire de la perte partielle des locaux loués en application des dispositions de l’article 1722 du Code civil en raison de la fermeture de son commerce durant la période de confinement revêt le caractère d’une contestation sérieuse opposable à son obligation de payer le loyer et les charges pendant la période de fermeture contrainte du commerce" (4 mars 2021, n.20/02572).
Cette motivation, qui n’a pas manqué de susciter un certain scepticisme, a été expressément écartée par d’autres tribunaux (cfr Tribunal judiciaire de Strasbourg 19 février 2021, n.20/00552 : "les dispositions de l’article 1722 du code civil ne concernent que les hypothèses de destruction totale ou partielle, mais définitive, de la chose louée et ne sont donc manifestement pas applicables aux faits de l’espèce").
La bonne foi.
La référence à la notion de bonne foi dans l’exécution des contrats, codifiée dans les deux systèmes juridiques, a été expressément encouragée par la Cour de Cassation italienne dans la "Relazione tematica" [17] publiée le 8 juillet 2020, qui a rencontré un large écho auprès des tribunaux.
Après avoir relevé que la réponse du législateur à la crise sanitaire a été "partielle et insatisfaisante", que l’article 91 du decreto-legge n.18 du 17 mars 2020, "d’interprétation incertaine" et de "formulation malheureuse" est en substance inapplicable [18], dans la mesure où l’impossibilité d’exécuter une obligation pécuniaire ne peut jamais être invoquée et que les remèdes traditionnels prévus par le Code civil ne peuvent satisfaire les "exigences concrètes des entreprises", la Cour Suprême transalpine a suggéré d’imposer aux parties une véritable "obligation de résultat" de renégociation des conditions contractuelles, en vertu du principe de bonne foi visé à l’article 1375 c.c. (cfr note n.11) et du devoir de solidarité prévu par l’article 2 de la Constitution italienne.
Ainsi, en cas de bouleversement significatif de l’équilibre contractuel causé par un évènement irrésistible, imprévisible et externe aux parties, celles-ci devraient être tenues d’entamer des négociations et de les mener de bonne foi, aux fins de proposer une "solution de rééquilibre qui puisse être considérée juste et équitable à la lumière de l’économie du contrat".
Dans le cas de refus du bailleur ou de mauvaise foi de sa part dans la conduite des pourparlers, le preneur pourra alors saisir le juge qui, après avoir vérifié l’entité du préjudice causé par la fermeture du commerce, pourra réviser le contrat et déterminer de nouvelles conditions contractuelles, à condition toutefois de pouvoir définir les critères de révision à partir du contrat de bail ou des échanges des parties durant la phase de négociation.
A l’aune du rapport de la Cour de Cassation, les tribunaux transalpins ont justifié le rejet des demandes des bailleurs, en faisant référence à
"la clause générale de bonne foi et de loyauté, en vertu de laquelle les parties ont l’obligation de négocier afin de parvenir à un nouvel accord visant à rétablir l’équilibre du contrat dans les limites de l’aléa normal inhérent au contrat" (cfr Tribunal Rome, 25 juillet 2020 ; Tribunal Trévise, 21.12.2020, n.4688/2020)
et ont "fermement" invité les parties à trouver un accord (cfr Tribunal Venise, 30 septembre 2020, n.2020/4324, Tribunal Milan, 21 octobre 2020 : "accorder une remise sur le loyer étant la solution la plus sage, non seulement d’un point de vue commercial mais aussi d’un point de vue juridique").
A l’instar des juges italiens, leurs homologues français ont fréquemment examiné l’exception d’inexécution du preneur à la lumière du principe de la bonne foi visée par l’article 1104 c.c [19], aux termes duquel "les contrats doivent être exécutés de bonne foi, ce dont il résulte que les parties sont tenues en cas de circonstances exceptionnelles de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives", accordant le cas échéant au preneur des délais de paiement au visa de l’article 1343-5 c.c. [20] (cfr Tribunal Judiciaire Paris,10 juillet 2020, n.20/04516 ; Tribunal Judiciaire Limoges 31 juillet 2020, n.20/00387, Tribunal Judiciaire Paris 18 septembre 2020, n.20/54327 et 26 octobre 2020, n.20/53713 et 20/55901 ; Tribunal Judiciaire Grenoble, 4 novembre 2020 ; Tribunal Judiciaire Paris 11 décembre 2021, n.2020035120, Tribunal Judiciaire Paris 21 janvier 2021, n.20/55750).
La révision du contrat.
Certains tribunaux italiens ont disposé la réduction du loyer, faisant ainsi droit à la demande de modification des conditions contractuelles (cfr Tribunal Rome 27 août 2020, n.29683/2020, "la bonne foi peut également être utilisée avec une fonction intégrative obligatoire dans les cas où il existe des facteurs imprévisibles qui n’ont pas été pris en considération par les parties au moment de la stipulation du rapport ; réduction du loyer de 40 % pour les mois d’avril et mai 2020 et de 20 % pour les mois de juin 2020 à mars 2021, compte tenu du fait que, même après la réouverture du commerce, l’accès des clients reste restreint pour des raisons de sécurité sanitaire" et Tribunal Milan 15 septembre 2020, "réduction du loyer pour la période comprise entre le 9 mars et le 18 mai 2020, d’un montant égal à 60% du montant contractuel, condamnant ainsi le locataire à payer 40% du montant total").
Après avoir constaté l’impossibilité de la prestation du bailleur "temporaire et partielle", le même Tribunal de Rome avait déjà dans une décision du 29 mai 2020, ordonné une réduction du loyer à hauteur de 70% au visa de l’article 1464 c.c. ("lorsque l’exécution d’une partie n’est devenue que partiellement impossible, l’autre partie a droit à une réduction correspondante de la prestation qu’elle doit") pour les deux mois pendant lesquels le local était resté fermé.
Aucun tribunal français saisi en référé ne semble cependant encore avoir "franchi le Rubicon" de la révision du contrat, prévue par l’article 1195 c.c [21].
Selon le Tribunal Judiciaire de Paris dans sa décision du 21 janvier 2021, il revient au juge du fond de :
"Déterminer si la société peut s’appuyer sur les dispositions de l’article 1195 du Code Civil pour demander une adaptation du contrat pendant cette période" ;
Et le Tribunal Judiciaire de Strasbourg a indiqué le 19 février 2021 que :
"Si la règle selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l’usage déloyal d’une prérogative contractuelle et a pu justifier une obligation de renégociation du contrat, elle ne l’autorise pas à porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus entre les cocontractants".
L’obligation d’agir de bonne foi a également et logiquement comporté le rejet de certaines demandes en fonction des circonstances de l’espèce, du montant des loyers dus, du comportement des parties et des efforts déployés ou non par ces dernières pour faire face à leurs obligations (possibilité de mise en place de vente à emporter, click and collect, ouverture partielle, etc) et parvenir à une solution négociée.
Les tribunaux français et italiens ont ainsi rejeté les demandes d’un bailleur qui a "refusé immédiatement toute négociation et n’a jamais voulu envisager ne serait-ce qu’un rééchelonnement de la dette" (cfr Tribunal Judiciaire Paris 21 janvier 2021, n.20/58571) ou d’un locataire qui n’a "jamais formalisé de demande claire de remise totale ou partielle des loyers ni sollicité d’aménagement de ses obligations" (cfr Tribunal Judiciaire Paris 10 juillet 2020, n.20/04516), "la moindre des choses ayant été d’envisager une négociation avec le bailleur avant de prendre une décision unilatérale et brutale contraire à des mœurs apaisées entre les acteurs économique" (cfr Tribunal de commerce Paris 28 octobre 2020, n.2020018320).
Les demandes d’un preneur qui n’a pas "démontré l’entité des pertes subies et les mesures prises pour tenter d’y remédier" (cfr Tribunal Pise 30 juin 2020 ; Tribunal Macerata 28 octobre 2020) et qui n’a pas justifié de "difficultés de trésorerie rendant impossible son obligation de payer les loyers" (cfr Cour d’Appel Grenoble 5 novembre 2020, n.16/04533 Tribunal Judiciaire Nantes 10 décembre 2020, n.20/00877) ont été également rejetées.
Dans les deux pays, les motivations adoptées par les tribunaux ont donc varié et évolué au fil du temps et des décisions et, si la bonne foi semble rester le seul moyen sur lequel les locataires peuvent s’appuyer avec de bonnes chances de succès, il conviendra d’attendre les premières décisions sur le fond concernant un litige né à l’occasion du confinement, dans l’espoir d’y trouver solutions pérennes et unificatrices.
Dans cette attente, il sera prudent de suivre le vieil adage connu dans les deux pays selon lequel "un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès" et le preneur aura tout intérêt à engager des négociations ou à entamer une procédure de médiation avec le bailleur, avant de saisir le tribunal, pour convenir d’un échéancier et/ou d’une réduction (temporaire) du loyer.