Licenciement d’une salariée en arrêt maladie : un employeur condamné à payer 100.000 euros.

Par Mohamed Salama, Juriste et Anthony Chhann, Avocat.

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Explorer : # licenciement abusif # arrêt maladie # indemnités de licenciement # faute grave

La Cour d’appel de Paris a reconnu que le licenciement pour une absence injustifiée de la salariée, infirmière diplômée d’État, était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Arrêtée par son médecin traitant pour deux maladies simples, les arrêts de travail de la salariée avaient effectivement pris fin pour une des maladies, mais elle était toujours arrêtée pour l’autre maladie…

-

Par un arrêt du 6 novembre 2019, la Cour d’appel de Paris a donc condamné la SAS Hôpital Européen de Paris GVM Care & Research aux sommes suivantes :
- 77.285,28 euros à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 6.440,44 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
- 520,35 euros au titre des congés payés afférents ;
- 33.871,17 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;
- 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Rappel des faits et de la procédure

La salariée a été embauchée en contrat à durée indéterminée en 1991 avec reprise d’ancienneté au 26 novembre 1979 en qualité d’infirmière diplômée d’État.

Elle a été licenciée pour faute grave le 16 juin 2015, soit après 35 ans d’ancienneté, pour une absence injustifiée.

L’employeur lui reprochait de ne pas avoir repris son poste alors qu’elle n’était plus en arrêt maladie.

Le 3 août 2015, l’ancienne infirmière a saisi le Conseil de prud’hommes de Bobigny afin de contester son licenciement.

Le Conseil de prud’hommes lui a donné raison et l’employeur a interjeté appel du jugement rendu.

Décision de la Cour d’appel sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’employeur justifiait sa décision par un prétendu abandon de poste en s’appuyant, de manière erronée, sur un certificat médical final pour déduire que l’arrêt de travail de la salariée avait pris fin.

Il motivait également le licenciement par une mise en demeure de reprendre son poste, restée selon lui lettre morte, puis par l’absence de la salariée à l’entretien préalable au licenciement.

La procédure s’est donc poursuivie jusqu’au licenciement de l’infirmière.

Lorsque la salariée a rappelé par écrit qu’elle était arrêtée pour deux maladies différentes et que la consolidation n’avait eu lieu que pour une affection, de sorte qu’elle était toujours arrêtée pour l’autre, il était déjà trop tard…

En effet, le certificat médical final, délivré comme son nom l’indique en fin d’arrêt de travail, ne concernait qu’une seule maladie.

L’employeur ne pouvait l’ignorer et la Cour le confirme en déclarant le licenciement irrégulier.

Elle a classiquement fondé sa décision au visa de l’article L1235-3 du Code du travail, qui prévoit les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle a précisé que :

Les premiers juges avaient à bon droit « considéré que la salariée, qui souffrait de deux pathologies prises en charge au titre de la législation professionnelle et bénéficiait pour ces raisons d’arrêts de travail dont l’un a été prolongé ne pouvait se voir reprocher d’être en absence injustifiée, alors qu’elle a au surplus justifié à réception de la mise en demeure de l’employeur de la réalité de son arrêt de travail pour maladie ».

Elle a approuvé le Conseil de prud’hommes de Bobigny qui a jugé que le « défaut de réaction de la salarié vis-à-vis de l’entretien procédait à tout le moins d’une négligence fautive, celle-ci ne caractérisait pas une faute de nature à constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement ».

C’est la raison pour laquelle la Cour d’appel de Paris a confirmé le jugement « en toutes ses dispositions relatives à la rupture, qu’il s’agisse de l’appréciation du préjudice subi par la salariée du fait du licenciement illégitime sur le fondement de l’article L1235-3 du Code de travail, que des indemnités de rupture correspondant à ses droits ».

La présente décision intéressera plus particulièrement les employeurs dans la mesure où elle permet de préciser les contours de la notion de « faute grave » en matière de licenciement dans les circonstances particulières d’un arrêt maladie.

Mohamed SALAMA
Juriste

Anthony CHHANN
Avocat au Barreau de Paris

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 20 février 2020 à 14:41
    par Samia , Le 19 février 2020 à 09:59

    Bonjour j’ai étais licencié au bout de 20 ans de boîte tout ça parce que mon magasin a été racheté para Leclerc enfin moi ils ont trouvé des fautes ils mon licencier sans indemnités j’ai jamais reçu de courrier ou d’avertissement

    • par Anthony CHHANN , Le 20 février 2020 à 14:41

      Chère Madame,

      Il semblerait qu’il y ait effectivement une irrégularité dans votre licenciement.
      Je vous invite donc à vous rapprocher d’un avocat pour éventuellement faire valoir vos droits.

      Bien à vous,

  • Bonjour après mon accident de travail d’un arrêt de de mois à la reprise j’ai été licencié pour de faux motif et j’étais sous soins et je suis en prolongation d’arrêt d’accident de Travail

  • Dernière réponse : 18 février 2020 à 18:59
    par Dos Santos Pinto , Le 18 février 2020 à 15:08

    Bonjour.
    J’ai moi même été licenciée étant en arrêt maladie pour état dépressif du au harcèlement de mon ancien directeur... Licenciement pour pour "Faute grave ".... Je passe en conciliation prud’hommes le 27/02/2020...
    Je ne sais pas à quoi m’attendre ? Je n’ai pas d’avocat (Pas les moyens !!!)
    J’espère que la loi est aussi pour les " Salariés " ???
    Je suis ravie pour vous .

    • par Anthony CHHANN , Le 18 février 2020 à 18:59

      Chère Madame,

      L’audience de conciliation est un préalable obligatoire devant le Conseil de Prud’hommes.

      L’avocat n’étant pas obligatoire à ce stade, je vous conseille tout de même de vous faire assister pour la rédaction de vos conclusions.

      Si vous n’en avez pas les moyens, il est possible de vous faire prendre en charge par ordre de priorité :
      - par votre assurance de protection juridique (présente dans les contrats d’assurance de CB ou multirisque habitation) ;
      - par l’aide juridictionnelle (dossier à déposer et soumis à des conditions de ressource).

      Bien à vous,

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