I- Les textes applicables en la matière
A) Le droit pénal
1°- Au paragraphe "De l’atteinte au secret des correspondances" : l’article
226-15 du code pénal, modifié par loi n°2011-525 du 17 mai 2011 - art. 150
Le fait, commis de mauvaise foi, d’ouvrir, de supprimer, de retarder ou de
détourner des correspondances arrivées ou non à destination et adressées à
des tiers, ou d’en prendre frauduleusement connaissance, est puni d’un an
d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.
Est puni des mêmes peines le fait, commis de mauvaise foi, d’intercepter, de
détourner, d’utiliser ou de divulguer des correspondances émises, transmises
ou reçues par la voie électronique ou de procéder à l’installation
d’appareils conçus pour réaliser de telles interceptions.
2°- L’article du 432-9 du code pénal
Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée
d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à l’occasion de
l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, d’ordonner, de commettre ou de
faciliter, hors les cas prévus par la loi, le détournement, la suppression
ou l’ouverture de correspondances ou la révélation du contenu de ces
correspondances, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Est puni des mêmes peines le fait, par une personne visée à l’alinéa précédent ou un agent d’un exploitant de réseau ouvert au public de
communications électroniques ou d’un fournisseur de services de
télécommunications, agissant dans l’exercice de ses fonctions, d’ordonner,
de commettre ou de faciliter, hors les cas prévus par la loi, l’interception
ou le détournement des correspondances émises, transmises ou reçues par la voie des télécommunications, l’utilisation ou la divulgation de leur
contenu.
3°- La loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des
correspondances émises par la voie des communications électroniques.
Le principe est annoncé dans l’article 1 :
« Le secret des correspondances émises par la voie des communications
électroniques est garanti par la loi. Il ne peut être porté atteinte à ce
secret que par l’autorité publique, dans les seuls cas de nécessité d’intérêt
public prévus par la loi et dans les limites fixées par celle-ci. »
II- La jurisprudence : Principe et Limites
A) En matière de courrier et a fortiori de courriel
- Tribunal de Grande Instance de Paris 17ème chambre, chambre de la presse,
2 novembre 2000 rappelle la loi de 1991 ainsi que les dispositions de l’article 433-9 du code pénal. « Toutes relations par écrit entre deux personnes identifiables, qu’il
s’agisse de lettres, de messages ou de plis même ouverts constitue une
correspondance couverte par le secret."
A fortiori l’envoi de message électronique de personne à personne constitue
de la correspondance privée.
La messagerie électronique avec un accès "mot de passe", est protégée par le
secret de la correspondance ...
Les e-mails privés échangés relèveront du secret des correspondances
privées au sens de l’article 8 de la Convention Européenne des droits de
l’Homme ; 9 du code civil protégé par l’ article 226-15 du code pénal.
B) Les limites au secret des correspondance
1°- Le droit de direction ; de surveillance et contrôle de l’employeur sur la
messagerie électronique de ses salariés
L’employeur a un pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle des
activités de ses salariés, lorsque ceux-ci utilisent à des fins personnelles
le matériel informatique qu’il met à leur disposition pour un usage
professionnel.
Le fait pour des salariés fautif de détourner l’usage professionnel de la
messagerie électronique pour un usage privé, ne peut autoriser l’employeur à
prendre connaissance des messages privés.
Dans tous les cas, si le contenu du mail reste privé, il n’exclura pas la
possibilité de retenir une sanction fondée sur le motif légitime d’un
licenciement pour faute grave...
A contrario tout ce qui aura le caractère professionnel autorisera
l’employeur à consulter librement les messages concernés, ex fichiers, e-mails.
Soc. 18 octobre 2006, pourvoi N°04-48025 : le salarié qui empêchera
l’employeur d’accéder à son ordinateur avec un code ou un procédé de
cryptage, pourra licencié pour faute grave, quelque soit le contenu des
fichiers.
Soc, 30 mai 2007, pourvoi N° 05-43102 : Il appartient au salarié d’identifier les messages qui sont personnels.
Les fichiers portant une mention "personnel" ne pourront être ouverts sauf
en présence du salarié et après l’avoir prévenu.
Un ordinateur de bureau et une messagerie professionnelle fournis par
l’employeur, utilisés durant le temps et sur le lieu de travail ne
caractérisent pas les messages comme privés.
Soc,9 juillet 2008, pourvoi N°06-45.80 Soc, 9 février 2010, pourvoi
N08-45.253. Toutes connexions internet d’un salarié seront présumées avoir un
caractère professionnel.
La Chambre Sociale de la Cour de cassation a rendu trois arrêts le 2 février
2011, pourvoi N° 09-72313, N° 72449 et N° 72450 qui concernent la nature des
messages irrévérencieux du salarié sur l’employeur susceptibles d’être
invoqués dans le cadre d’une procédure de licenciement pour faute grave.
- pourvoi N° 09-72313 : pour un e-mail adressé en copie malencontreusement à
un collègue et à son épouse, portant insulte de sa hiérarchie, considéré
comme en rapport avec l’activité professionnelle. Cet e-mail n’a pas de
caractère privé
- pourvois N°09-72449 et 09-72450 pour des e-mails provocateurs portant la
mention « info » en rapport avec l’activité professionnelle. Ceux-ci ne
seront pas couverts par le secret de la correspondance.
2°- Les exceptions dans les interceptions.
La loi n°91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances
émises par la voie des communications électroniques porte des exceptions.
Article 3 : les exceptions dans les interceptions
Peuvent être autorisées, à titre exceptionnel, dans les conditions prévues
par l’article 4, les interceptions de correspondances émises par la voie des
communications électroniques ayant pour objet de rechercher des
renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde des éléments
essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la
prévention du terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées
et de la reconstitution ou du maintien de groupements dissous en application
de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et les milices
privées.
Article 4
L’autorisation est accordée par décision écrite et motivée du Premier
ministre ou de l’une des deux personnes spécialement déléguées par lui. Elle
est donnée sur proposition écrite et motivée du ministre de la défense, du
ministre de l’intérieur ou du ministre chargé des douanes, ou de l’une des
deux personnes que chacun d’eux aura spécialement déléguées (1).
Article 6 (durée de l’autorisation)
L’autorisation mentionnée à l’article 3 est donnée pour une durée maximum de
quatre mois. Elle cesse de plein droit de produire effet à l’expiration de
ce délai. Elle ne peut être renouvelée que dans les mêmes conditions de
forme et de durée.