Le statut de cadre dirigeant : vérification des fonctions réellement exercées par le salarié au regard de l’article L. 3111-2 du Code du travail.

Par Dalila Madjid, Avocat.

12062 lectures 1re Parution: 3 commentaires 4.95  /5

Explorer : # cadre dirigeant # article l. 3111-2 du code du travail # fonctions réelles # critères cumulatifs

Selon l’article L. 3111-2 du Code du travail, le cadre dirigeant exige la réunion de trois critères cumulatifs, à savoir :
1· Une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps,
2· Une prise de décision de façon largement autonome,
3· Et une perception d’une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise ou l’établissement.

-

En effet, l’article L. 3111-2 du Code du travail dispose que :
« Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ».

La participation à la direction de l’entreprise n’est pas un critère autonome et distinct se substituant à ces trois critères (Cass. soc., 22 juin 2016, n° 14-29246).

1- Les fonctions réellement exercées par le salarié au regard de l’article L. 3111-2 du Code du travail.

La Cour de cassation avait précisé qu’un salarié n’avait le statut de cadre dirigeant qu’au regard des fonctions qu’il a réellement exercées. Ce qui signifie que le simple titre de « responsable » et le niveau de classification du salarié, ne suffisent pas à eux seuls pour déterminer le statut de celui-ci.

Ainsi, dans ladite décision, une salariée engagée par une société, en qualité de contrôleuse de gestion, a été ensuite nommée au poste de directeur comptable.
Elle s’est vu confier en plus de ses fonctions habituelles, une mission de mise en place d’un progiciel de gestion intégrée, ainsi que la direction du service informatique.

Ayant été déchargée par son employeur de cette mission, elle avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l’employeur et de demande en paiement d’heures supplémentaires.

Les juges du fond avaient débouté la salariée de ses demandes d’heures supplémentaires et de repos compensateurs. Car, selon eux, à compter du 1er mars 2005, elle a été classée cadre au coefficient 600, niveau IV, ce qui est considéré dans le cadre de l’accord du 1er novembre 1998 sur la réduction et l’aménagement du temps de travail dans les entreprises de l’habillement comme un cadre dirigeant.

Ce n’était pas la position de la chambre sociale de la Cour de cassation, qui avait censuré l’arrêt de la cour d’appel au visa des dispositions de l’article L.3111-2 du Code du travail précisant que :
« Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III.
Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement »
.

Selon les Hauts magistrats, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article L. 3111-2 du Code du travail, car, le juge doit vérifier précisément les conditions réelles d’emploi du salarié concerné, peu important que l’accord collectif applicable retienne pour la fonction occupée par le salarié la qualité de cadre dirigeant.

En somme, un salarié qui ne participe pas à la direction de l’entreprise, autrement dit, qui ne fait pas partie du comité de direction, ne peut se voir attribuer le statut de cadre dirigeant, quand bien même il se verrait attribuer un niveau de classification correspondant à celui d’un cadre dirigeant.

(Chambre sociale, Cour de cassation, 4 février 2015, n° 13-22892)

2- Les trois critères cumulatifs exigés par l’article L. 3111-2 du Code du travail

Dans un autre arrêt, la Cour de cassation rappelle l’importance de la réunion des trois critères cumulatifs définit par la loi, dont les juges doivent vérifier pour attribuer à un salarié le statut de cadre dirigeant.

Dans cet arrêt, un salarié ingénieur de la convention collective des industries chimiques du 30 décembre 1952, après avoir réclamé un changement de classification professionnelle en excipant de sa qualité de cadre dirigeant, a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Pour débouter le salarié de l’ensemble de ses demandes, la cour d’appel retient que ce salarié assumait effectivement des attributions de direction de la société tant au plan commercial, administratif qu’opérationnel et disposait d’une délégation de signature mais que ces attributions devaient être appréciées au regard de la nature de l’activité de l’entreprise et de son effectif qui ne comportait aucun cadre, hormis le salarié, de sorte que ce dernier n’assumait ni une fonction de coordination entre de multiples activités, ni des responsabilités étendues à plusieurs services ou impliquant la supervision d’autres cadres, que jusqu’au mois de mai 2012, il était placé sous l’autorité directe du gérant de la société, qui procédait à son évaluation annuelle et validait les propositions de développement de l’entreprise qu’il avait élaborées, que le fait que le salarié participe, ponctuellement, aux côtés du gérant à des réunions du conseil d’administration de la société ne lui conférait pas pour autant la qualité de cadre dirigeant compte tenu de la taille des entités respectives et des liens croisés unissant les parties, le salarié n’étant pas, par ailleurs, membre du comité de direction de la société.

Or, pour la Cour de cassation, les juges du fond n’ont pas examiné, ainsi qu’il le leur était demandé, la situation du salarié au regard des critères définis par l’article L. 3111-2 du Code du travail. L’arrêt de la cour d’appel a été cassé, au motif que la décision a été privée de base légale.

(Cass. soc.,29 mars 2017, pourvoi n° 16-13421)

Dalila Madjid

Avocat au Barreau de Paris

e-mail : dalila.madjid chez avocat-dm.fr

blog : https://dalilamadjid.blog

site : http://www.avocat-dm.fr/

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

105 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 13 mars 2020 à 21:36
    par tonio , Le 10 janvier 2019 à 18:05

    J avais un contrat cadre dirigeant en 2017 mais je remplissais des feuilles de présence mensuellement où étais marqué forfait annuel en jours:216 jours. J’ai effectué 252 jours,est ce normal ?Je leur demande la différence,ils veulent rien savoir.Dois je prendre un avocat ?

    • par Dalila Madjid , Le 11 janvier 2019 à 10:10

      Tout d’abord, vous indiquez que vous étiez cadre-dirigeant soumis au forfait jour, ce qui n’est pas normal, puisque les règles relatives à la durée du travail ne s’applique pas aux cadres dirigeants.
      Un salarié en forfait jour ne peut pas être considéré comme cadre dirigeant.

      Dans un récent arrêt du 7 septembre 2017, la cour de cassation a précisé que lorsque le salarié est en forfait jours, les juges n’ont pas à rechercher une éventuelle qualité de cadre-dirigeant.

      Ensuite, la durée de travail de référence est de 218 jours, journée de solidarité comprise. Au-delà le salarié bénéficie de jours de repos (RTT).

      Avec l’accord de l’employeur, le salarié peut renoncer à des jours de repos en contre-partie une majoration de salaire qui ne peut être inférieur à 10 % doit être appliquée. Cet accord doit être écrit.

      Ainsi, dans votre cas, il y a le problème de votre statut incompatible de cadre dirigeant avec le forfait jour et il convient également de vérifier d’après les calculs, si le maximum dépassé des jours travaillé est ou non justifié.

      Je pense qu’il faudrait vérifier tout ça avec un avocat, avec des documents à l’appui pour une consultation juridique par exemple, avant de se lancer dans une revendication auprès de votre employeur,

    • par Tonio , Le 13 mars 2020 à 21:36

      Je reviens vers vous après consultation d’un avocat.
      Je remplissais des feuilles nominatives tous les mois où était écris forfait 216 jours.
      Je devais donner cette feuille tous les mois à ma comptable.
      Ces feuilles n’ont jamais été signées par ma direction.
      J’avais un contrat cadre dirigeant.
      Mon avocat demande le paiement de la différence.
      J’ai des chances de résultat positif ?

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27877 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs