Un salarié peut être harcelé par un tiers à l’entreprise
L’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, notamment en matière de harcèlement moral et que l’absence de faute de sa part ne peut l’exonérer de sa responsabilité.
Il doit également répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur les salariés.
Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Pour rejeter la demande de la salariée, la Cour d’Appel de Nîmes avait retenu que le harcèlement moral ne peut résulter de contraintes de gestion ni du pouvoir d’organisation et de direction de l’employeur et que l’auteur désigné du harcèlement n’était pas employé par la société mais représentait le propriétaire de la marque ayant passé un contrat de licence avec l’employeur et qu’il n’avait aucun lien hiérarchique ni n’exerçait aucun pouvoir disciplinaire sur la salariée.
La Cour de cassation a censuré cette analyse.
En statuant ainsi, alors que le tiers désigné comme l’auteur des faits de harcèlement moral était chargé par l’employeur de mettre en place de nouveaux outils de gestion, devait former la responsable du restaurant et son équipe et pouvait dès lors exercer une autorité de fait sur les salariés, la Cour d’Appel de Nîmes a violé les articles L. 1152-1, L. 1154-1, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
Cass. Soc., 1er mars 2011, n° 09-69.616
Lorsque leur patron est un voyou, les salariés peuvent occuper l’entreprise (sous conditions)
Que peuvent faire les salariés face à un employeur qui a décidé l’arrêt des activités et fermé l’unité de production sans information ni consultation préalable des institutions représentatives du personnel, a interdit aux salariés l’accès à leur lieu de travail en leur notifiant sans autre explication leur mise en disponibilité ?
L’occupation des lieux, intervenue en réaction à la fermeture de l’unité de production ne caractérise pas un trouble manifestement illicite en l’absence de dégradation du matériel, de violence, de séquestration ou autre comportement dangereux à l’égard des personnes se trouvant sur le site.
Cass. Soc., 9 mars 2011, n° 10-11588
Employeurs, attention aux visites médicales de reprises
Seul l’examen pratiqué par le médecin du travail en application des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du Code du travail met fin à la suspension du contrat de travail.
Il incombe à l’employeur de prendre l’initiative de cette visite médicale et de convoquer le salarié par tous moyens.
Le salarié ne commet aucun manquement en ne se présentant pas à une visite seulement envisagée par le médecin du travail
En l’absence de visite de reprise à l’initiative de l’employeur, le contrat de travail demeurant suspendu, le salarié ne commet aucune faute en ne se présentant pas à son poste.
Cass. Soc. 28 avril 2011, n° 09-40487
Un salarié peut voler son patron en toute impunité pour la première fois à partir de dix ans d’ancienneté…
Un salarié a été licencié pour faute grave pour avoir dérobé, au préjudice de son employeur la recette correspondant à la pose de deux pneus.
La Cour de Cassation a censuré la Cour d’Appel de Basse-Terre qui a jugé que le licenciement repose sur une faute grave.
Pour la Haute Juridiction, l’acte isolé d’un salarié qui justifie d’une ancienneté de plus de dix années n’est pas de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise.
Cass. Soc., 6 avril 2011 n° 10-15286
Votre employeur peut-il vous demander de rendre les clefs vous permettant d’accéder à votre lieu de travail ?
En l’absence de mise à pied, votre employeur ne peut vous demander de lui remettre les clefs vous permettant d’accéder à votre lieu de travail et ainsi vous empêcher de travailler.
Il s’agit d’un licenciement verbal qui ne peut être régularisé par l’envoi postérieur d’une lettre de rupture qui est nécessairement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. Soc., 9 mars 2011 n° 09-65441
Fous (pas) ta cagoule au boulot depuis le 11/04/2011 !
Depuis le 11 avril 2011, il est interdit dans l’espace public de porter une tenue destinée à dissimuler son visage.
La loi n° 2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public marque la volonté de la représentation nationale de réaffirmer solennellement les valeurs de la République et les exigences du vivre ensemble.
Se dissimuler le visage, c’est porter atteinte aux exigences minimales de la vie en société. Cela place en outre les personnes concernées dans une situation d’exclusion et d’infériorité incompatible avec les principes de liberté, d’égalité et de dignité humaine affirmés par la République française.
La République se vit à visage découvert. Parce qu’elle est fondée sur le rassemblement autour de valeurs communes et sur la construction d’un destin partagé, elle ne peut accepter les pratiques d’exclusion et de rejet, quels qu’en soient les prétextes ou les modalités.
La loi interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public a été publiée au Journal officiel du 12 octobre 2010, après avoir été soumise au contrôle du Conseil constitutionnel.
Elle pose le principe d’une interdiction générale de la dissimulation du visage dans l’espace public, son article 1er énonçant à cet effet que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». La loi sanctionne également le fait de contraindre un tiers à dissimuler son visage.
Si cette dernière sanction est entrée en vigueur immédiatement, la loi a prévu que la mesure d’interdiction générale de la dissimulation du visage ne serait applicable qu’à l’expiration d’un délai de six mois à compter de sa promulgation.
Cette interdiction a donc pris effet depuis le 11 avril 2011.
Les salariés sont concernés, dès lors qu’ils travaillent dans l’espace public.
La dissimulation du visage dans l’espace public est interdite à compter du 11 avril 2011 sur l’ensemble du territoire de la République, en métropole comme en outre-mer. Cette infraction est constituée dès lors qu’une personne porte une tenue destinée à dissimuler son visage et qu’elle se trouve dans l’espace public ; ces deux conditions sont nécessaires et suffisantes.
La définition de l’espace public
L’espace public est constitué des voies publiques ainsi que des lieux ouverts au public ou affectés à un service public.
La notion de voies publiques n’appelle pas de commentaire. Il convient de préciser qu’à l’exception de ceux affectés aux transports en commun les véhicules qui empruntent les voies publiques sont considérés comme des lieux privés. La dissimulation du visage, par une personne se trouvant à bord d’une voiture particulière, n’est donc pas constitutive de la contravention prévue par la loi. Elle peut en revanche tomber sous le coup des dispositions du code de la route prévoyant que la conduite du véhicule ne doit pas présenter de risque pour la sécurité publique.
Constituent des lieux ouverts au public les lieux dont l’accès est libre (plages, jardins publics, promenades publiques…) ainsi que les lieux dont l’accès est possible, même sous condition, dans la mesure où toute personne qui le souhaite peut remplir cette condition (paiement d’une place de cinéma ou de théâtre par exemple). Les commerces (cafés, restaurants, magasins), les établissements bancaires, les gares, les aéroports et les différents modes de transport en commun sont ainsi des espaces publics.
Les lieux affectés à un service public désignent les implantations de l’ensemble des institutions, juridictions et administrations publiques ainsi que des organismes chargés d’une mission de service public. Sont notamment concernés les diverses administrations et établissements publics de l’Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, les mairies, les tribunaux, les préfectures, les hôpitaux, les bureaux de poste, les établissements d’enseignement (écoles, collèges, lycées et universités), les caisses d’allocations familiales, les caisses primaires d’assurance maladie, les services de Pôle emploi, les musées et les bibliothèques.
La dissimulation du visage
Les tenues destinées à dissimuler le visage sont celles qui rendent impossible l’identification de la personne. Il n’est pas nécessaire, à cet effet, que le visage soit intégralement dissimulé.
Sont notamment interdits, sans prétendre à l’exhaustivité, le port de cagoules, de voiles intégraux (burqa, niqab…), de masques ou de tout autre accessoire ou vêtement ayant pour effet, pris isolément ou associé avec d’autres, de dissimuler le visage.
Les exceptions légales
En premier lieu, l’interdiction ne s’applique pas « si la tenue est prescrite ou autorisée par des dispositions législatives ou réglementaires ». Il s’agit par exemple de l’article L. 431-1 du code de la route qui impose le port du casque aux conducteurs de deux-roues à moteur.
En deuxième lieu, l’interdiction ne s’applique pas « si la tenue est justifiée par des raisons de santé ou des motifs professionnels ». Les motifs professionnels concernent notamment le champ couvert par l’article L. 4122-1 du code du travail aux termes duquel « les instructions de l’employeur précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d’utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses. Elles sont adaptées à la nature des tâches à accomplir ».
Enfin, l’interdiction ne s’applique pas « si elle s’inscrit dans le cadre de pratiques sportives, de fêtes ou de manifestations artistiques ou traditionnelles ». Ainsi les processions religieuses, dès lors qu’elles présentent un caractère traditionnel, entrent dans le champ des exceptions à l’interdiction posée par l’article 1er. Au titre des pratiques sportives figurent les protections du visage prévues dans plusieurs disciplines.
Les dispositions de la loi du 11 octobre 2010 s’appliquent sans préjudice des dispositions qui interdisent ou réglementent, par ailleurs, le port de tenues dans certains services publics et qui demeurent en vigueur.
Il en est ainsi de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics (article L. 141-5-1 du code de l’éducation nationale et circulaire d’application du 18 mai 2004). Demeurent également applicables la charte du patient hospitalisé, annexée à la circulaire du 2 mars 2006 relative aux droits des patients hospitalisés, et la circulaire du 2 février 2005 relative à la laïcité dans les établissements de santé.
Lorsqu’ils sont ouverts au public, les lieux de culte entrent dans le champ d’application de la loi. Le Conseil constitutionnel a toutefois précisé que « l’interdiction de dissimuler son visage dans l’espace public ne saurait, sans porter une atteinte excessive à l’article 10 de la Déclaration de 1789, restreindre l’exercice de la liberté religieuse dans les lieux de culte ouverts au public ».
Sanctions
La méconnaissance de l’interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe (d’un montant maximal de 150 euros). Le prononcé de cette amende relève de la compétence des juridictions de proximité.
L’obligation d’accomplir un stage de citoyenneté peut également être prononcée par les mêmes juridictions, à titre de peine alternative ou de peine complémentaire. Le stage de citoyenneté, adapté à la nature de l’infraction commise, doit notamment permettre de rappeler aux personnes concernées les valeurs républicaines d’égalité et de respect de la dignité humaine.
La dissimulation du visage constatée dans l’espace public peut résulter d’une contrainte exercée contre la personne concernée et révéler la commission par un tiers du délit de dissimulation forcée du visage.
Ce délit, prévu à l’article 4 de la loi (créant un nouvel article 225-4-10 du code pénal), est puni d’un an d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Lorsque le fait est commis au préjudice d’une personne mineure, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 60 000 euros d’amende.
La répression de ces agissements participe de la volonté des pouvoirs publics de lutter vigoureusement contre toutes les formes de discriminations et de violences envers les femmes, qui constituent autant d’atteintes inacceptables au principe d’égalité entre les sexes.
Circ. min. du 2 mars 2011, JO du 3
Peut-on licencier un salarié pour un fait tiré de sa vie privée ?
Si, en principe, il ne peut être procédé à un licenciement pour un fait tiré de la vie privée du salarié, il en va autrement lorsque le comportement de celui-ci a créé un trouble caractérisé au sein de l’entreprise.
Cass. soc. 14 septembre 2010 n° 09-65675
Cadres : vos « forfaits-jours » sont illicites !
Vous êtes soumis à un forfait en jours travaillés à l’année ?
Vous pouvez saisir les Conseils de Prud’hommes pour faire reconnaitre que votre convention de forfait est inapplicable car résultant d’un accord collectif qui met en œuvre un dispositif législatif non conforme à un texte supranational ou que l’accord collectif, pour les mêmes raisons, est sans effet.
En effet, la rémunération des heures supplémentaires, telle qu’elle est prévue dans le cadre du système de forfait-jours sur l’année est contraire à l’article 4, § 2 de la Charte sociale européenne dont le respect est garanti par le Comité européen des droits sociaux (CEDS).
Deux décisions du 23 juin 2010 confirment la violation par la France de la Charte sociale européenne sur ce point.
CEDS, 23 juin 2010, récl. n° 55/2009, CGT c/Gouvernement de la France et récl. n° 56/2009, CFE-CGC c/ Gouvernement de la France.
La loi du 19 janvier 2000 et la loi du 20 août 2008 sont considérées par le CEDS comme contraires à la Charte en ce que :
le système des « forfaits-jours » ne comportaient pas de limite hebdomadaire ;
la négociation collective n’était pas, en l’état des exigences relatives au contenu de l’accord collectif, de nature à assurer des garanties suffisantes permettant d’assurer le respect des principes de la charte ;
la rémunération des heures supplémentaires n’étant pas suffisamment prise en compte compte tenu de la grande flexibilité du dispositif.
Le support législatif des « forfaits-jours » ayant été jugé non conforme à la Charte, les accords collectifs et les clauses des contrats de travail sont inopérants car sans fondement législatif.
Ainsi comme le souligne M. MORAND ("Les forfaits-jours et la charte sociale européenne", La Semaine Juridique Social n° 19, 10 Mai 2011), vous pouvez revendiquer le paiement de vos heures supplémentaires chaque semaine pour lesquelles le temps de travail a dépassé 35 heures (dans les limites de la prescription quinquennale) et le cas échéant des dommages-intérêts pour dépassement de la durée maximale quotidienne ou hebdomadaire.
S’il apparaît, au travers des éléments de fait apportés que vous pouvez apporter, que votre durée du travail hebdomadaire a été excessive (dépassement régulier, par exemple, de la moyenne de 48 heures), la violation de la Charte devrait se traduire par l’octroi de dommages-intérêts fonction du préjudice subi, comme ce serait le cas pour le non-respect de la durée maximale hebdomadaire fixée par le Code du travail.
S’il apparaît en outre que cette durée excessive ne comporte pas une rémunération en adéquation avec les sujétions imposées, le juge pourrait utilement faire application des anciennes dispositions de l’article L. 212-15-4 du Code du travail ou de celles de l’article L. 3121-47 pour condamner votre employeur au versement d’une indemnité calculée en fonction du préjudice subi dès lors que la rémunération versée est sans rapport avec les sujétions qui sont imposées au salarié.
Cadres dirigeants : vous pouvez peut-être réclamer vos heures supplémentaires !
En vertu de l’article L. 3111-2 du Code du travail, les cadres dirigeants sont pour l’essentiel exclus de la législation sur la durée du travail et notamment des dispositions relatives aux heures supplémentaires et au repos compensatoire.
Sont considérés comme ayant la qualité de « cadre dirigeant », les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.
Certaines conventions collectives (Exemple : commerce et réparation de l’automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes) plus favorables que les dispositions légales, prévoient que l’exclusion, pour cette catégorie de cadres, de la réglementation de la durée du travail est subordonnée à l’existence d’un document contractuel écrit mentionnant les modalités d’exercice des responsabilités justifiant le forfait sans référence horaire.
La Cour de cassation considère qu’en l’absence de respect des dispositions conventionnelles, l’employeur ne peut tout simplement pas se prévaloir du statut de cadre dirigeant, le salarié étant dès lors fondé à exiger le paiement de ses heures supplémentaires et repos compensatoire.
En l’espèce, l’entreprise a été condamnée à verser à son cadre dirigeant les sommes de 93.382,25 euros à titre d’heures supplémentaires et 56.221,80 euros à titre d’indemnité de repos compensateur.
Cass. soc. 6 avril 2011, n° 07-42935
Ne touchez pas à la durée du travail !
Un employeur ne peut unilatéralement réduire la durée du travail d’un salarié lui occasionnant une perte de rémunération.
Le salarié peut refuser cette modification et prendre acte de de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc., 4 mai 2011 n° 10-14767
Ne touchez pas au salaire !
En application des articles 1134 du code civil et L. 1231-1 du Code du travail, la rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié ni dans son montant ni dans sa structure sans son accord, peu important que l’employeur prétende que le nouveau mode de rémunération est sans effet sur le montant global de la rémunération du salarié.
Il est indifférent que la modification n’ait pas d’incidence sur le montant de la rémunération
En l’espèce, la Cour de cassation a considéré peu important qu’une augmentation du salaire de base (de 7 %) permettait de compenser la baisse du taux des primes (de 6 %).
Le salarié peut refuser toute modification de sa rémunération et prendre acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Cass. soc. 18 mai 2011 n° 09-69175
Employeurs, défendez-vous contre le téléchargement illégal au travail
L’installation d’un logiciel permettant le téléchargement illégal d’œuvres musicales à partir de l’adresse IP de l’employeur est constitutive d’une faute grave rendant impossible le maintien du salarié à son poste de travail même pendant la durée du préavis.
Si la découverte du logiciel Emule, s’agissant d’un logiciel permettant le téléchargement illégal de musique, a nécessité l’ouverture d’un document identifié comme personnel à l’utilisateur de l’ordinateur il convient de relever que l’accès à un tel fichier peut être effectué une première fois afin de mettre fin à un téléchargement automatique de données étrangères à l’employeur mais réalisé à partir de l’adresse IP de l’entreprise et être effectué une seconde fois en présence du salarié. Ainsi, le salarié ne peut invoquer l’irrégularité de l’ouverture du fichier.
Cour d’Appel de Versailles, 31 mars 2011 n° 09/00742
Employeurs, n’embauchez pas un CDD un vendredi !
En application de l’article L. 1242-10 du Code du travail, le contrat de travail à durée déterminée peut comporter une période d’essai. Sauf si des usages ou des stipulations conventionnelles prévoient des durées moindres, cette période d’essai ne peut excéder une durée calculée à raison d’un jour par semaine, dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à six mois et d’un mois dans les autres cas.
Sauf disposition conventionnelle ou contractuelle contraire, toute période d’essai, qu’elle soit exprimée en jours, en semaines ou en mois, se décompte de manière calendaire.
Ainsi, mieux vaut embaucher un CDD à compter d’un lundi qu’un vendredi.
En effet, les samedis et dimanches non travaillés sont décomptés de la période d’essai, vous disposerez dès lors de moins de temps pour apprécier votre embauche.
Cass. soc. 28 avril 2011 n° 09-72165, n° 09-40464
Peut-on reprocher à un salarié de ne pas avoir fait taire sa femme ?
Un salarié a été licencié pour ne pas avoir empêché son épouse d’interpeller vivement l’employeur en sa présence.
La Cour d’Appel de Basse-Terre a prononcé la nullité du licenciement et ordonné la réintégration du salarié dans son emploi.
La Cour de Cassation a considéré qu’ayant constaté que la rupture était directement fondée sur le fait que le salarié était l’époux de Mme X… et n’aurait pas empêché la tenue des propos, regardés comme injurieux, de cette dernière, la Cour d’appel a pu retenir l’existence d’éléments de fait laissant présumer l’existence d’une discrimination fondée sur la situation familiale de M. X… ; qu’après avoir constaté que l’employeur ne démontrait pas que sa décision reposait sur des éléments étrangers à toute discrimination, la Cour d’Appel a prononcé à bon droit la nullité du licenciement.
Cass. soc., 30 juin 2010 n° 08-41936 08-42760
Votre employeur n’organise pas les élections professionnelles ? Demandez sa condamnation à vous verser des dommages et intérêts
En application de l’alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, de l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles L. 2323-1 et L. 2324-5 du code du travail et 1382 du Code civil, de l’article 8 § 1 de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne, l’employeur qui, bien qu’il y soit légalement tenu, n’accomplit pas les diligences nécessaires à la mise en place d’institutions représentatives du personnel, sans qu’un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause nécessairement un préjudice aux salariés, privés ainsi d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.
Les salariés peuvent légitimement saisir les juridictions prud’homales de demandes en dommages-intérêts du fait de l’absence d’institutions représentatives du personnel.
Cass. Soc., 17 mai 2011, n° 10-12.852
Évaluation professionnelle : attention à l’évocation de l’activité syndicale du salarié
En application de l’article L. 2141-5 du Code du travail, sauf application d’un accord collectif visant à en assurer la neutralité ou à le valoriser, l’exercice d’activités syndicales ne peut être pris en considération dans l’évaluation professionnelle d’un salarié.
A défaut, un salarié peut justement saisir le Conseil de Prud’hommes d’une demande tendant à voir analyser sa prise d’acte de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse, du fait de l’entrave apportée par l’employeur à l’exercice de son activité syndicale,
Cass. soc., 23 mars 2011, n° 09-72733
Salariés, Syndicats, Représentants du personnel : Attention à vos tracts
D’une part, en application des articles 35 et 55 de la loi du 29 juillet 1881, vous devez respecter le délai de dix jours après la signification de votre citation en diffamation pour faire votre offre de preuve de la vérité des faits imputés dans votre tract.
D’autre part, en application de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881, le fait justificatif de bonne foi distinct de l’exception de vérité des faits diffamatoires se caractérise par la légitimité du but poursuivi, l’absence d’animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l’expression ainsi que par le sérieux de l’enquête, la cour d’appel, qui n’a pas constaté la réunion de ces éléments.
Cass. soc., 17 mars 2011, n° 10-11784
Sportifs amateurs, faites reconnaitre votre subordination à votre Club
Footballeurs, Rugbymen, Tennismen… amateurs, vous pouvez saisir le Conseil de Prud’hommes pour faire reconnaitre votre contrat de travail.
Une convention prévoit votre participation aux entraînements et aux rencontres sportives ainsi que le versement d’un défraiement outre des primes de matches, vous pouvez soutenir être lié à votre association sportive par un contrat de travail et saisir la juridiction prud’homale.
L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs.
Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Il ne peut vous être opposé votre exercice parallèle à temps complet d’une activité professionnelle.
En effet, la Cour de cassation considère dès lors que, d’une part, vous êtes tenu, sous peine de sanctions, conformément au règlement interne du club et la charte des droits et des devoirs du joueur de participer aux activités sportives, de suivre les consignes données lors des entraînements et de respecter le règlement du club, et que, d’autre part, vous percevez des sommes en contrepartie du temps passé dans les entraînements et les matches, ce dont il résulte que, nonobstant la qualification conventionnelle de défraiement, elles constituent la rémunération d’une prestation de travail.
Vous êtes lié à votre club par un contrat de travail.
Cass. soc., 28 avr. 2011, n° 10-15573
Un salarié peut signer une pétition
En application de l’article L. 1121-1 du Code du travail, sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à laquelle seules les restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées.
La signature d’une pétition portant sur une demande de personnel supplémentaire, qui ne contient aucun propos injurieux, diffamatoire ou excessif, ne caractérise pas un abus de la liberté d’expression du salarié.
Cass. soc., 3 mai 2011, 10-14104
Footballeurs professionnels vous pouvez critiquer votre entraineur
Sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché peuvent être apportées.
En conséquence, un joueur peut « d’une part déclarer dans la presse que l’entraîneur manquait de cohérence et de diplomatie et salissait les joueurs pour laver sa responsabilité, alors que de son côté, l’entraîneur avait affirmé que le joueur n’avait plus le niveau de ligue 1 et était très orgueilleux et égocentrique et, d’autre part, que le président n’avait pu ou avait été incapable d’arrêter un lynchage médiatique ».
Pour la Cour de cassation, « les propos reprochés s’inscrivant dans une polémique médiatique avec l’entraîneur, la Cour d’appel de Reims a pu décider que le salarié n’avait pas abusé de sa liberté d’expression ».
Cass. soc., 28 avr. 2011, n° 10-30107
Représentants du personnel : demandez au juge de vérifier que votre licenciement est sans lien avec l’exercice de votre mandat
En vertu des dispositions du Code du travail, le licenciement des salariés légalement investis des fonctions de délégué syndical et de délégué du personnel, qui bénéficient d’une protection exceptionnelle dans l’intérêt de l’ensemble des travailleurs qu’ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l’inspecteur du travail.
Lorsque le licenciement d’un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l’appartenance syndicale de l’intéressé.
Dans le cas où la demande d’autorisation de licenciement est motivée par la circonstance que le salarié ne remplit pas les conditions légalement exigées pour l’exercice de l’emploi pour lequel il a été embauché, il appartient à l’inspecteur du travail et le cas échéant au ministre, de vérifier, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, que la demande d’autorisation de licencier est sans lien avec les mandats détenus et que le motif avancé est établi et justifie le licenciement, compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé, des caractéristiques de l’emploi exercé et des exigences propres à l’exécution normale du mandat dont il est investi.
En outre, pour refuser l’autorisation sollicitée, l’autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d’intérêt général relevant de son pouvoir d’appréciation de l’opportunité, sous réserve qu’une atteinte excessive ne soit pas portée à l’un ou l’autre des intérêts en présence.
CE, 15 déc. 2010, n° 329674
Opposez à votre employeur ses engagements devant le Comité d’Entreprise
Les engagements de l’employeur consignés dans les procès-verbaux de réunions du Comité d’entreprise lui sont opposables.
C’est dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et de la portée des déclarations faites par l’employeur devant le comité d’entreprise, et sans dénaturation du procès-verbal dressé à cette occasion, que les juges du fond peuvent retenir que celui-ci avait pris en connaissance de cause, sans réserve ni condition, un engagement.
Cass. Soc. 16 février 2011, n° 09-41401
Votre employeur diminue vos responsabilités et prérogatives ?
La Cour d’appel de Rennes avait constaté que, d’une part, un salarié, s’était vu retirer notamment toute responsabilité au niveau de la planification et de l’organisation des ressources humaines et matérielles, avait cessé d’avoir les fonctions d’encadrement qu’il assurait depuis de nombreuses années et s’était heurté à l’interdiction d’accéder à l’atelier, et, d’autre part, que la planification des ressources matérielles, le suivi de la fabrication, la formation du personnel de production et la maintenance générale avaient été confiées à un autre salarié.
La Cour de Cassation a considéré que la cour d’appel a pu en déduire qu’une telle diminution des responsabilités et des prérogatives du salarié constituaient une modification du contrat de travail.
Recherchant la véritable cause du licenciement, la Cour d’appel de Rennes a justement retenu que le salarié n’avait pas été licencié à cause de son comportement mais en raison de son refus d’accepter la modification du contrat de travail.
Cass. Soc. 6 avril 2011 n° 09-66818
Vous manquez de moyens pour vos fonctions de représentant du personnel ?
Demandez la résiliation judiciaire de votre contrat de travail aux torts de votre employeur !
En effet, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié investi d’un mandat représentatif doit être appréciée en tenant compte de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et des exigences propres du mandat.
Cass. soc. 4 mai 2011, n° 09-70702
Journée de solidarité : votre employeur vous arnaque-t-il ?
Au nom de la journée de solidarité, de nombreux salariés se font « arnaquer » par leurs employeurs qui procèdent sur leurs salaires à une retenue supérieure à la contribution de 0.3% de la masse salariale brute fixée par la loi (151h67 x 0.3% = 0h455 pour une retenue en général de 7h / 12 mois = 0h583 pour un salarié à temps complet).
Cette pratique est totalement illégale même si elle est parfois prévue dans les accords collectifs.
Aux termes de l’article L 3133-7 du Code du travail, une journée de solidarité est instituée en vue d’assurer le financement des actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées ou handicapées.
Cette journée de solidarité prend la forme, pour les salariés, d’une journée supplémentaire de travail non rémunérée et, pour les employeurs, de la contribution prévue à l’article 11 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
L’article L 3133-8 du Code du travail dispose que les modalités d’accomplissement de la journée de solidarité sont fixées par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par accord de branche.
Cet accord peut prévoir soit le travail d’un jour férié précédemment chômé autre que le 1er mai, soit le travail d’un jour de repos accordé au titre de l’accord collectif conclu en application de l’article L 3122-2, soit toute autre modalité permettant le travail de sept heures précédemment non travaillées en application de dispositions conventionnelles ou des modalités d’organisation des entreprises.
Selon l’article L 3133-10 du code du travail, le travail accompli, dans la limite de sept heures, durant la journée de solidarité ne donne pas lieu à rémunération pour les salariés mensualisés dans cette limite de sept heures, et pour les salariés dont la rémunération est calculée par référence à un nombre annuel de jours de travail dans la limite de la valeur d’une journée de travail. Pour les salariés à temps partiel, la limite des sept heures est réduite proportionnellement à la durée contractuelle.
Il résulte de ces textes que les entreprises peuvent parfaitement conclure un accord d’établissement aux fins d’organiser en leur sein la mise en œuvre de la journée de solidarité.
Toutefois, l’article L 1331-2 du Code du travail dispose que les sanctions pécuniaires sont prohibées.
Ainsi, il est de jurisprudence constante qu’un employeur ne peut procéder à une retenue sur salaire dans le cadre de la journée de solidarité qu’à l’égard du salarié qui était absent le jour fixé pour celle-ci.
Dès lors, un employeur ne peut procéder à une retenue sur salaire à titre de modalité exclusive d’accomplissement de la journée de solidarité.
Il ne peut vous être retiré 0,56 heures de rémunération chaque mois au titre de la journée de solidarité même en application d’un accord d’établissement. Cet accord collectif apparait ainsi contraire aux dispositions précitées du Code du travail.
Conseil de Prud’hommes de Paris, Départage du 1er avril 2011, RG n° F 09/00231
Ne pas organiser les élections des délégués du personnel peut coûter cher à l’employeur
Il résulte de l’article L. 1226-10 du Code du travail que l’avis des délégués du personnel doit être recueilli avant que la procédure de licenciement d’un salarié inapte à son emploi en conséquence d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne soit engagée.
L’employeur ne saurait se soustraire à cette obligation dès lors que la mise en place de tels délégués est obligatoire en application de l’article L. 2312-2 du Code du travail et qu’aucun procès-verbal de carence n’a été établi.
Seul un procès-verbal de carence établi à l’issue du second tour de scrutin est de nature à justifier le respect par l’employeur de ses obligations en matière d’organisation des élections de délégués du personnel.
Le non-respect par l’employeur de l’obligation, prévue par l’article L. 1226-10 du code du travail, de consultation pour avis des délégués du personnel implique, par application de l’article L. 1226-15 du même code, l’octroi au salarié d’une indemnité non inférieure à douze mois de salaire.
Cass. Soc., 28 avril 2011, n° 09-71658
Le danger de ne pas informer son employeur de la prolongation de son arrêt de travail
Le salarié qui ne reprend pas son poste au terme de son arrêt de travail sans justifier de la raison de son absence et attend un mois pour répondre à la demande d’explication de son employeur, fait preuve d’une négligence blâmable qui rend impossible son maintien dans l’entreprise et constitue une faute grave.
Cass. Soc., 6 avril 2011 n° 10-10479
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