Contrefaçon de marque : la guerre des scottishs.

Par Alexandre Blondieau, Avocat.

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Explorer : # contrefaçon # marque # bijoux # risque de confusion

Dans un arrêt du 12 juin 2012, la Cour de cassation rappelle la méthode à suivre pour apprécier le risque de confusion en matière de marques et caractériser la contrefaçon.

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La société Agatha, spécialisée dans le bijou fantaisie, est propriétaire d’une marque figurative constituée par la représentation d’un scottish-terrier stylisé, vu de profil gauche et portant un collier. Cette marque a été déposée à l’INPI en 1993 pour désigner un certain nombre de produits et notamment des bijoux. La société Swarovski, autre spécialiste du bijou, a commercialisé, via son site internet et certaines de ses boutiques, un pendentif représentant également un scottish-terrier stylisé, vu de profil gauche et portant un collier lui aussi.

Constatant ces faits, la société Agatha s’en est émue et a assigné en contrefaçon de sa marque la société Swarovski. La Cour d’appel de Paris, dans une décision en date du 1er avril 2011, a fait droit à cette demande en reconnaissant qu’en imitant le dessin du scottish-terrier, la société Swarovski avait commis des actes de contrefaçon. La juridiction a condamné cette dernière à ne plus exploiter de quelque manière que ce soit le pendentif litigieux ainsi qu’à verser à la société Agatha les somme de 20.000 euros au titre de l’atteinte à la marque et de 40.000 euros au titre de son préjudice commercial. La société Swarovski s’est alors pourvue en cassation.

Dans le contentieux de la contrefaçon, lorsque le signe litigieux n’est pas identique à la marque mais seulement similaire, il est nécessaire de caractériser l’existence d’un « risque de confusion dans l’esprit du public » pour retenir la contrefaçon, c’est-à-dire le risque qu’un consommateur moyen pense que les produits en cause proviennent de la même entreprise. En l’espèce, dans son analyse des deux signes, la Cour d’appel s’était bornée à prendre en considération les dessins des deux chiens pour affirmer leur trop grande identité.

C’était un peu court. Comme elle y était invitée par le pourvoi, la chambre commerciale de la Cour de cassation, dans son arrêt du 12 juin 2012, rappelle que pour se prononcer sur la contrefaçon, il fallait apprécier le risque de confusion en utilisant la « méthode de l’impression d’ensemble produite par les signes ». Cette méthode, imposée par la Cour de Justice des Communautés Européennes se réfère à la perception du consommateur moyen. Celui-ci, lorsqu’il est en contact avec les deux produits reproduisant le signe (ici la marque Agatha et le pendentif), ne procédera pas nécessairement à une démarche très poussée pour les distinguer. Il se représentera chacun de ces signes dans sa globalité, sans soucis pour les détails, ne retenant qu’une impression d’ensemble.

Logiquement, la Cour de cassation casse donc l’arrêt de la Cour d’appel, lui reprochant de n’avoir pris en considération que les dessins des deux signes, sans avoir tenu compte de la couleur, du matériau, de la taille en facettes, ainsi que de l’aspect d’ensemble tridimensionnel du pendentif.

En deux dimensions, les deux scottishs se ressemblaient sûrement beaucoup et de ce point de vue la contrefaçon était peut-être évidente. Mais la comparaison devait se faire entre le dessin du premier, déposé à titre de marque figurative, et le pendentif prenant la forme du second, en trois dimensions avec sa couleur propre. La Cour de cassation a rappelé cette règle essentielle qu’est l’examen de l’impression d’ensemble. Il reviendra à la Cour d’appel de Paris, composée de magistrats différents, de l’appliquer et de dire si oui ou non, à cette aune, les scottishs conservent un air de famille trop prononcé.

Alexandre BLONDIEAU
Avocat à la Cour

www.blondieau-avocats.com

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